Magazine Culture

L’après mur

Par Zappeuse

9 novembre 1989 : ouverture du mur de Berlin. Enthousiasme et fort désir de renouveau, basé sur un effacement physique et systématique du passé. C’est pour cela que les traces du mur sont si peu faciles à déceler en centre-ville. Et surtout, en même temps que ce désir d’effacer le passé, il y eut une volonté forte de reconstruire aussitôt, notamment dans cette zone de friche que constituait le no man’s land entre les deux palissades de béton. Cette volonté s’est traduite de manière brutale sur la p2.1232037595.jpgPotsdamer Platz, devenue en moins de deux décennies un “petit Manhattan” (selon les paroles du géographe Boris Grésillon). Petit historique de cette place :
Avant l’édification du mur en 1961, et plus encore avant les bombardements de 1943, cette place était le centre névralgique de Berlin. Lignes de métro et de tram s’y croisaient. p1.1232037655.jpgC’était un lieu actif, commerçant, très vivant. Le mur enserre la place entre ses palissades, plus large là qu’ailleurs : la place autrefois vivante est remplacée par un élément de ce fameux no man’s land. Lorsque le mur tombe enfin, là où autrefois il y avait des bâtiments il n’y a plus qu’un vulgaire terrain vague. La reconstruction est aussi rapide qu’ambitieuse : des tours de bureaux, le Sony Center (siège social de Sony en Europe, mais la firme n’y installe cependant pas le centre de recherches prévu initialement), de multiples commerces et même, comme j’ai visité la ville en hiver, une piste artificielle de luge (en guise de luges : de gros pneus, un peu comme ces énormes boudins flottants avec lesquels on peut s’amuser à la plage). Du mur il ne reste rien de visible, si ce n’est que le chantier n’est visiblement pas encore achevé.
k2.1232037744.jpgAutre conséquence de cette chute du mur : une involontaire mais heureuse recomposition sociale, très nette dans le quartier de Kreuzberg. Ce quartier était accolé au mur côté ouest. Les populations aisées ont rapidement quitté cet espace, se sentant proprement enfermées, au profit de quartiers situées plus à l’ouest, plus loin de l’hypercentre, et donc sans une barre de béton en guise d’horizon. Sont restées sur place les populations les moins aisées, qui n’ont pas eu les moyens de changer de paysage. Parmi ces populations se trouvaient — et se trouvent toujours, même si elles ont pu acquérir la nationalité allemandek1.1232037805.jpg — des minorités ethniques, en particulier des Turcs. Aujourd’hui, ces populations autrefois plus ou moins marginalisées, se retrouvent en plein centre-ville, dans un quartier de plus en plus prisé où la mixité sociale se fait tout naturellement. On y voit ainsi des immeubles de style HLM, avec leur forêt d’antennes paraboliques, mais aussi des immeubles plus anciens fort bien rénovés.

Source : intervention du géographe Boris Grésillon (université Aix-Marseille) à l’émission Planète Terre (France-Culture) du 31 décembre 2008.

é

é


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Zappeuse 1046 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossiers Paperblog