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Tribunal constitutionnel espagnol : protection des mineurs isolés étrangers contre l’éloignement et droit d’ester en justice

Publié le 23 janvier 2009 par Combatsdh

Le Tribunal constitutionnel espagnol, dans une décision du 22 décembre 2008, a reconnu à un mineur marocain le droit de s’opposer judiciairement à son rapatriement, du fait d’une “capacité et maturité suffisante” pour ester en justice.
Face à cette décision qui garantit le droit à la tutelle judiciaire effective des mineurs étrangers placés sous tutelle de l’Administration Publique, jusqu’à présent dépourvus de capacité procédurale pour contester les décisions contraires à leurs intérêts sans le consentement de leurs tuteurs, l’Association Pro Derechos Humanos d’Andalousie (APDHA) veut manifester sa satisfaction pour cette grande avancée en matière de protection des mineurs étrangers contre les procédures irrégulières d’expulsion cachée.

Voir le communiqué original en Espagnol EL TC RECONOCE LA CAPACIDAD DE UN MENOR MARROQUÍ A OPONERSE A SU REPATRIACIÓN

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Rappelons qu’en France, suite à une mobilisation associative pour dénoncer l’absence de protection des mineurs isolés en zone d’attente (notamment par la saisine systématique du juge des enfants), la loi “Royal”du 4 mars 2002 a créé un système d’administrateurs ad’hoc (v. sur le site de l’Anafé ).

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En 2006, la Délégation du Gouvernement à Madrid a ordonné le rapatriement d’un mineur marocain de 17 ans placé sous tutelle et protection de la Communauté Autonome de Madrid. Le mineur a judiciairement contesté cette décision grâce à un avocat du Collectif de soutien de la Coordinadora de Barrios de Madrid, qui est parvenu à stopper le rapatriement in extremis, alors que le mineur se trouvait dans l’avion en direction de Rabat.

Alléguant qu’aucun conflit d’intérêts n’existait entre l’Administration tutrice et le mineur sous tutelle, qui n’avait pas la capacité procédurale de désigner un défenseur judiciaire indépendant, la Communauté de Madrid et l’avocat représentant les intérêts de l’État contestèrent la nomination et la légitimité d’action du défenseur du mineur devant le Tribunal Supérieur de Justice de Madrid (TSJM).

Bien que lui soit légalement reconnu le droit à être entendu dans tous les procédés judiciaires affectant sa vie personnelle, le Tribunal Autonome a estimé que n’avait pas été bafoué le droit de représentation légale du mineur non émancipé, soumis à tutelle de l’Administration Publique, considérant que seuls ses parents ou le Ministère public avaient la capacité de contester le procédé de rapatriement.

Contre ces arguments, le défenseur judiciaire a présenté un « recours en protection » (Amparo) devant le Tribunal Constitutionnel, qui a considéré que le TJSM avait privé le mineur demandeur du droit constitutionnel à la tutelle judiciaire effective, puisque “avait été avortée la possibilité de se prononcer sur une violation de [ses] droits fondamentaux“, à l’heure d’être expulsé sans avoir été entendu en voie administrative ou judiciaire.

L’APDHA se félicite de cette révision des critères du Gouvernement, des Communautés autonomes et de certains organes judiciaires, telle que nous la réclamions avec d’autres organisations, face au conflit d’intérêts existant entre le mineur protégé et l’Administration chargée de sa tutelle, lorsqu’elle décide de ne pas contester son expulsion malgré le grave préjudice porté à ses intérêts. Dans ce type de cas, le Tribunal Constitutionnel habilite le mineur à bénéficier d’une représentation juridique indépendante pour la défense authentique de ses intérêts.

En rappelant aux autorités compétentes, garantes de la sécurité des mineurs protégés, qu’elles doivent scrupuleusement s’acquitter des devoirs dérivés de la législation en vigueur qui leur incombent, cette importante décision du Tribunal Constitutionnel espagnol, comme l’a bien précisé le Défenseur du Mineur de la Communauté de Madrid, “remet en cause le procédé d’expulsion” des mineurs étrangers mené à bien par les Institutions espagnoles, puisqu’en pratique ces rapatriements sont des expulsions camouflées, qui contribuent à une plus grande détérioration des mineurs, dont on dit vouloir protéger l’intérêt.

Par conséquent, l’APDHA veut féliciter la Coordinadora de Barrios de Madrid et son avocat Ignacio de la Mata pour cette conquête en faveur des mineurs isolés étrangers, et ne peut que se sentir satisfaite de cette décision historique qui garantit, enfin, un véritable respect de l’intérêt supérieur du mineur, ainsi qu’un respect effectif de ses droits fondamentaux.

Cette décision suppose en outre un appel à rectification envers les autorités espagnoles et un avertissement selon lequel la logique répressive du contrôle des flux migratoires ne peut jamais primer sur l’intérêt supérieur du mineur.

APDHA- Janvier 2009

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V. la décision du tribunal constitutionnel espagnol

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  • Sala Primera. Sentencia 183/2008, de 22 de diciembre de 2008.

Recurso de amparo 3319-2007. Promovido por don B.E. frente a la Sentencia de la Sala de lo Contencioso-Administrativo del Tribunal Superior de Justicia de Madrid que, en grado de apelación, inadmitió su demanda contra el Delegado del Gobierno en Madrid sobre su repatriación a Marruecos.

Vulneración del derecho a la tutela judicial efectiva (acceso a la justicia): inadmisión de demanda contencioso-administrativa por falta de capacidad de un menor de edad, y denegación de un defensor judicial por contradicción de intereses con la Administración de tutela, que impiden que sea oído en la adopción de medidas que afectan a su esfera personal (STC 221/2002).


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