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Les sanglots longs des violons de l'Elysée

Publié le 05 février 2009 par Thedailyplanet

Devant des millions de télespectateurs en prime time et diffusé en direct sur 3 chaines, Nicolas Sarkozy a tenté vainement de convaincre les Français que son plan de relance pour l'économie était le bon. Le problème, c'est que nous n'avons pas vraiment appris grand chose et que nous avons désomais la certitude que le gouvernement ne tire absolumment pas les leçons des erreurs politiques passées. Reconnaissant toutefois que les inquiétudes des Français en terme d'emploi, de pouvoir d'achat, d'éducation, d'écologie, et de santé sont légitimes (le contraire aurait provoqué un tollé), il ne gomme absolumment pas ce sentiment de malaise que provoque son exercice du pouvoir et sa gestion de la crise.

Dans un discours qui suintait la langue de bois (habitude qui a perduré malgré une soit-disant rupture...), le chef de l'Etat français a tenté de jouer un numéro de charme qui s'avère être bien fade face à la dure réalité de la vie. Ainsi, nous apprenons que nos chers compatriotes n'ont pas déboursé un seul centime pour renflouer les banques françaises. Dans ce cas là, d'où viens donc une partie du budget de l'Etat si ce n'est du contribuable ? De mystérieux personnages qui prêtent de l'argent à l'Etat lui permettant de mener à bien ses réformes et de creuser encore plus le déficit économique de la France par coups de milliards. Dans ce cas là, pourquoi le taux de rénumération du livret A est passé de 5,5% à 2,5% menaçant encore de baisser davantage ? La majorité de cet argent venant... du contribuable ira directement et simplement dans les poches de l'Etat. M. Sarkozy a beau dire le contraire, c'est le contribuable qui va payer la crise et non pas ceux qui l'ont provoqué.

Entre autres, notre cher président (fustigeant au passage les 35 heures dont l'échec a été causé par les entreprises qui n'ont pas voulu jouer le jeu en employant plus de personnel pour réduire le chômage) a milité pour que les profits des entreprises soient redistribués équitablement entre salariés, actionnaires, et dirigeants. Très bien se dit-on, mais le bémol va très vite arriver. De manière très vague, le président a argumenté qu'il faudrait déterminer quelles entreprises seraient concernées par ce dispositif (c'est à dire quelques unes seulement), à partir de quelle marge bénificiaire (ne portant pas atteinte aux investissements des entreprises se chiffrant à plusieurs dizaines de millions), et surtout déterminer quelle part pour chacun car si c'est pour que les salariés aient seulement 20 Euros de plus sur leur salaire alors que les actionnaires et dirigeants perçoivent 1000 fois plus que ce 'bonus" car moins nombreux, le système continuera et se replantera une nouvelle fois (et en faisant bien plus de dégâts).

Avec la même logique, Nicolas Sarkozy a critiqué la politique du président américain Barack Obama qui consiste à mettre à un niveau limite tous les salaires des dirigeants. Ce n'est pas aux dirigeants performants de limiter leur salaire, il faut limiter voire supprimer les bonus des traders qui ont accéléré la crise financière. Sauf que ce que Sarkozy a oublié de dire, c'est que si Obama a entrepris cette politique, c'est pour supprimer à moyen terme les parachutes dorés des dirigeants et les mettre en face de leurs propres responsabilités (à noter que le président américain a piqué une grosse colère en apprenant que les traders ayant précipité la crise financière avec des actions spéculatives à coups de milliards avaient reçus des bonus phénoménaux de la part des banques qui les emploient).

La réponse de Sarkozy au chomâge ? Puisque les entreprises délocalisent à l'étranger et ferment leurs usines en France, la seule solution est donc de supprimer la taxe professionnelle pour toutes les entreprises. Sauf que cela augmentera encore plus le déficit de la France et la taxe professionnelle pour les grandes entreprises est une goutte d'eau par rapport à leurs bénéfices. La question serait plus tôt de se demander pourquoi des entreprises faisant des bénéfices monstres délocalisent à l'étranger et licencient autant de gens pour rien, sous couvert de crise financière. Parce que les entreprises qui font du profit veulent toujours plus de profit, qu'importe les conséquences que celà peut engendrer. Et ça, ce n'est certainement pas un défenseur du libéralisme, du capitalisme, et de la mondialisation qui changera quelque chose à ce système qui lui profite pleinement. Justement, de la fameuse "refonte du capitalisme" soutenue par Sarkozy, parlons-en. La solution selon notre chef de l'Etat serait de supprimer la domination du dollar instituée par les accords de Bretton Woods dans les échanges internationaux. Pour arriver à ce résultat, une réponse commune de l'ensemble des Etats membres de l'Union Européenne est nécessaire selon lui. Mais que personne ne se leurre: ce n'est pas pour faire une monnaie unique mondiale qui soit dépendante de toute autre monnaie et de toute autre puissance, c'est uniquement pour essayer d'imposer l'Euro en tant que monnaie unique internationale. La différence, c'est que si les Etats de l'UE y parviennent, ça ne réformera absolumment rien au système financier (la seule chose qui changera en sera la direction dominante) et ça provoquera une autre crise financière mais causée cette fois-ci par les Européens et non pas par les Etats-Unis.

Pour les investissements destinés à relancer l'économie, Sarkozy s'axe sur l'industrie automobile, le nucléaire, les transports fluviaux et ferroviaires et les universités autonomes. Où sont donc passées les énergies renouvelables, l'écologie, la santé, la recherche, l'éducation pour tous sans discrimination positive, la protection sociale, le pouvoir d'achat et la consommation, la protection des libertés fondamentales pour bâtir une société plus juste ? Nulle part. Au contraire, les dernières réformes nous pousse au pessimisme le plus grand avec encore plus d'inquiétude pour l'avenir.

L'idée selon Sarkozy, c'est de relancer la consommation de voitures en France pour redynamiser le secteur automobile qui embauche 10% des salariés en France grâce à des primes à la casse et au bonus/malus écologique. Tout celà c'est bien beau, mais le marché automobile français est déja saturé au niveau de son parc. Si les gens n'ont pas assez d'argent pour se payer leur voiture et l'essence comment fait-on ? Si les gens qui ont déjà des voitures ne changent pas de voitures tous les ans par souci d'économie comment fait-on ? Et si on met à la casse son ancienne voiture, que fera-t-on des caracasses de véhicules que l'on ne pourra guère recycler pour en construire de nouveaux ? Les transports ne sont pas mieux lotis. En effet, mise à part le développement du TGV en France avec l'annonce de la création de 4 nouvelles lignes par an (bien qu'il faudra m'expliquer comment ne pas dépasser les délais de construction et les coûts de construction sachant le passé peu glorieux du TGV en la matière), le transport fluvial ne sera développé qu'au nord de la France (c'est à dire via un canal reliant la Seine et les fleuves du Nord de l'Europe). A la poubelle le projet de canal Rhin-Rhône demandé depuis des années par les habitants et les acteurs économiques. Encore faudrait-il savoir si ce ne sont pas des effets d'annonce qui vont finalement tomber à l'eau (c'est le cas de le dire) comme à chaque fois que le dossier est ressorti du placard (et celà fait 40 ans que ça dure !).

L'écologie en prend un coup aussi. Nicolas Sarkozy a confirmé qu'il développerait le nucléaire (tout en occultant complétement la question des énergies renouvelables) grâce à ses fameux EPR afin de vendre de l'électricité à nos voisins. Pour peu qu'on s'intéresse au problème du nucléaire, tout le monde sait que cette énergie est loin d'être écologique (danger de la prolifération nucléaire, contamination à l'uranium en cas de fuite, déchets nucléaires que l'on ne peut pas recycler) et loin d'être durable (les stocks d'uranium s'épuisent aussi vite que ceux du pétrole). Investir sur une énergie coûteuse, qui ne sera pas rentable, qui créera très peu d'emplois, et ne pourra pas fonctionner sur le long terme (en raison de la raréfaction progressive du combustible nucléaire) ne sert qu'à creuser encore plus le trou dans lequel notre pays est. La deuxième solution de notre cher président pour lutter contre le changement climatique est la captation de carbone. En gros, l'idée est de récupérer les gaz à effets de serre nocifs dissiminés dans l'air et de les enfermer dans des couches géologiques afin de "purifier" notre air. Le problème, c'est que l'on ne maîtrise absolumment pas cette technologie. En effet, sur le principe, à quoi cela servira-t-il de stocker des "déchets de gaz" (à même titre que ceux du nucléaire que l'on ne peut pas recycler) si nous ne réduisons pas drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre. Après, sur la pratique (et sachant la concentration de gaz nocifs que nous avons provoqué), il n'y a aucune études qui permet de prouver à 100% que les couches géologiques seront hermétiques (et donc que le gaz ne s'échappera pas d'un coup provoquant une brusque variation de climat en quelques heures) et que cela ne nuira pas à l'écosystème (car encore une fois, c'est nous qui avons provoquer ce changement climatique et non pas la nature). C'est jouer à l'apprenti sorcier encore une nouvelle fois en laissant l'addition très salée (et polluée) aux générations futures.

Après l'écologie, Sarkozy s'attaque à l'éducation. Autant vous le dire de suite pour couper court aux espoirs: la réforme des universités et de l'enseignement aura bien lieu et n'est absolumment pas abandonnée. Suppression de postes d'enseignants (y compris dans les universités), refonte des programmes qui seront désormais à visée uniquement professionnels (en résumé la fin de la recherche), quotas mis à l'entrée de toutes les filières universitaires (en fonction des demandes de l'emploi donc accrochez-vous si vous voulez faire le boulot que VOUS voulez), nomination des enseignants par les présidents d'université sur critère "personnel" (et non plus par rapport aux compétences et à la richesse de la diversité de l'enseignement), arrêt des suventions de l'Etat par la mise en place du financement de l'éducation par les entreprises, augmentation importante des frais de scolarité des étudiants pour remplacer le manque à gagner par rapport au désengagement de l'Etat (alors qu'un étudiant dépense environ 8000 Euros/an en faculté et 14000 Euros/an en classe prépa). Ce qui s'annonce ? La fuite des "cerveaux" vers des pays plus favorables à l'éducation, des fermetures d'universités qui ne seront plus rentables car dispensant des formations "inutiles" qui "n'assureraient pas un emploi" (faculté de lettres ou des arts par exemple), une augmentation importante du chômage (les + 50000 chômeurs/mois que nous avons en France actuellement ne sont rien par rapport à ce qui s'annonce. Et tout cela dans le but de rendre compétitif et autonome l'éducation...(pincez-moi je crois que je rêve en entendant des inepties pareilles)

Après l'énumération des points de son fameux plan de relance, les deux journalistes ont demandé au président s'il comptait se représenter aux prochaines élections en 2012. Grosse surprise: fini le langage langue de bois, place à ce qui ressemblerait pour de l'honnêteté (apparemment, il n'avait pas prévu cette question et c'est malheureusement la seule fois où on le sent presque sincère). Sous le son silencieux des violons larmoyants, Nicolas Sarkozy qui parla avec son coeur empreint d'humanité, avoua que l'exercice du pouvoir était une tâche difficile et épuisante. Evoquant sa réforme sur la limite maximale à deux mandats consécutifs d'un président de la République, il parle de ses doutes et interrogations qui le poussent à ne prendre position ni pour ni contre un engagement dans une nouvelle bataille présidentielle tout en rappelant l'importance de ne pas avoir des gens qui s'attachent toute leur vie à un siège sans vouloir le quitter. Toutefois, il insiste sur le fait qu'il ira au bout de son mandat, qu'il y jettera pendant le temps restant toutes ses forces restantes malgré l'usure et la pression qu'exerce sur lui la présidence. Au fond de lui, on sent qu'il ne tenterait pas une seconde expérience. Mais en 3 ans les choses et les opinions peuvent changer. Peut-être a-t-il simplement peur de se retrouver avec un gouvernement de gauche en 2012 qui l'empêcherait de gouverner à sa guise. Peut-être en habile tacticien met-il exprès le doute dans l'esprit des gens pour se rendre plus humain (j'ai presque eu de la pitié pour lui à ce moment là, surtout en repensant au bouclier fiscal qu'il a généreusement donné aux plus riches, en repensant au salaire très modeste qu'il s'est octroyé, en repensant même au discours de Dakar sur la place "inexistante" et appartenant au passé de l'Africain dans le monde, et en repensant inévitablement à ses "petites phrases" vulgaires empreintes de douceur et de générosité). Une chose est sûre: son plan est voué à l'échec et la résistance à des réformes liberticides commence doucement mais sûrement à s'organiser.


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