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Benjamin Button, by Alex C.

Publié le 05 février 2009 par Suffragettes
Une fois n'est pas coutume, j'ai décidé de laisser la parole à une personne qui m'est chère et qui vous expose ici, une critique non seulement riche, complète mais passionnée, du dernier film de David Fincher, L'étrange histoire de Benjamin Button.

INTRO : Œuvre massive, riche et dense fruit d’une gestation de près de 10 ans, L’étrange histoire de Benjamin Button s’impose comme une fresque flamboyante d’une infinie beauté sur l’amour, la vie, la mort, la solitude et un destin hors du commun.

David Fincher signe le film parfait, son meilleur aussi surprenant qu’incroyablement logique. Brad Pitt y est sidérant. 

CRITIQUE : Fincher est un génie, cela n’est plus à prouver. Mais si l’on nous avait dit un jour que le réalisateur transgressif et hardcore de Alien 3, Seven, The Game, Fight Club, Panic Room et Zodiac allait signer un film grand public capable de réunir les foules, nous aurions cru à une blague. Il n’en est pourtant rien.

Véritable scission (entamée avec Zodiac) par rapport à ses précédents films, David Fincher signe une double prouesse : se relever de lynchages médiatiques passés pour renouer avec un succès populaire mais aussi conserver ses identités et visions des choses de la vie.

Sublime, poétique, magnifique, troublant, magique, féerique, dur, saisissant, enchanteur… L’étrange histoire de Benjamin Button est tout cela à la fois mais avant tout un film parfait, maîtrisé de bout en bout, d’une densité absolue, glacial et surtout désespéré.

Soyons honnête : s’il ne plaira pas à tous les publics, le film aura pour lui d’éviter tout manichéisme, toute guimauve d’accoutumée de style et tout maniérisme. L’étrange histoire de Benjamin Button n’est pas entièrement compréhensible et se doit d’être vu plusieurs fois pour en saisir toutes les subtilités.

Incroyablement froid et intelligent, le film de Fincher flirte avec le drame déchirant sans plonger dans les clichés. Mieux, il rebondit et surprend par un refus de vague larmoyante tout en cédant aux passages poignants.

Concoctée par un génie de l’image, cette fable douce, amère mais au combien envoûtante sur un destin hors du commun, brille dans un premier contexte par la réappropriation des codes de « drama à oscars » par Fincher.

C’est bien connu, le monsieur n’aime pas faire comme tout le monde. Comme le dit Brad Pitt qui le côtoie pour la troisième fois, cet homme est tout d’abord un sculpteur, un génie qui a tout en tête. L’étrange histoire de Benjamin Button sublime par son visuel et sa narration. En reprenant les modèles de films à l’ancienne (narration voix-off, sauts dans le temps entre présent et passé…) David Fincher remodèle une nouvelle littéraire (signée F.Scott Fitzgerald) selon sa propre vision du monde.

Chaque cadre, chaque photo, chaque mouvement de caméra est porteur d’une idée nouvelle, d’une ambiance bien définie. Rien ne déborde des cases, tout est calculé, bien pensé, sidérant. L’auteur de Fight Club se permet des plans de dingues aussi virevoltants qu’émouvants selon la scène.

Qu’il s’agisse du prologue avec Mr Gâteau (lourd de sens) à la scène de danse de Blanchette en mode nocturne face à un Pitt tout falot ou bien de la scène « d’accident » minutée façon Magnolia comme quoi rien n’est dû au hasard… chaque plan traduit une maîtrise insolente et jouissive.

Couleurs chaudes pour ambiance froide, Fincher alterne les ambiances en tutoyant le « glacial » de la marche funeste inversée d’un homme définitivement seul.

Monté avec brio malgré quelques légères coupes imposées (le film fait 2h45 au lieu des 3h passées), le film baigne dans un univers de coton, de douceur nostalgique. En suivant le destin de cet être qui vieillit au fur et à mesure qu’il rajeunit, le film prend à contre-pieds.

La maturité et la sérénité accumulée par Benjamin durant son enfance dans un corps de vieillard au sein d’une maison de retraite permet au héros d’appréhender la vie avec recul et aisance. Puis au fur et à mesure que le temps file, le physique se rajeunit et l’insouciance allant avec le physique d’ado emboîte le pas d’un vieillard parti profiter de la vie.

Au final, il résulte de cette vie une richesse foudroyante qui met K.O.

Jonglant avec les thèmes essentiels universels : l’amour, la mort, la vie, la solitude, l’amitié, l’apprentissage… L’étrange histoire de Benjamin Button fait rapidement office de maestria commandée par un pur génie. Car il y a de tout dans la vie de Button : des rapports paternels déstructurés (gardons la surprise pour ne rien gâcher), une histoire d’amour, une passion, la guerre, un rapport mère / fille émouvant, des histoires d’amitiés, une vie à rebours…

Accompagné d’une bande originale enchantée du français Alexandre Desplat, le film prend des allures de conte flamboyant enchanteur.

Dopé par des effets spéciaux sidérants et bluffant, une reconstitution des époques absolument fabuleuse et une symbiose totale entre récit, scénario, narration et action, l’œuvre de David Fincher tutoie le sublime.

Oscillant constamment entre le drame et quelques touches d’humour pour alléger l’ensemble, L’étrange histoire de Benjamin Button est un vrai régal et ne perd jamais le fil du temps qui passe.

Du running gag de l’homme foudroyé par la foudre (storyline linéaire permettant à Pitt de voir au combien il évolue) au dénouement déchirant que personne n’est prêt d’oublier (sortez les mouchoirs et savourez le générique final pour vous remettre), le film de Fincher trace sans sourciller et déstabilise.

Enfin, que serait L’étrange histoire de Benjamin Button sans Brad Pitt. Pivot essentiel au déroulement du film, l’acteur trouve ici le rôle de sa vie. Somme de tous les rôles de sa carrière, le personnage de Benjamin offre à Pitt l’occasion de passer en revue sa vie, ses images tamponnées par Hollywood à grand coup d’autodérision, ses différentes facettes allant du beau au laid, du jeune au vieux.

Qu’il soit fringant comme un bellâtre quarantenaire ou bien qu’il nous fasse croire via un regard et des mimiques à tomber qu’il a 7 ans dans un corps de 80 ans, Pitt est éblouissant et parfait à l’image du film. A ses côtés, Cate Blanchett fait des miracles. Belle, gracieuse, à l’humanité débordante, elle est la constante de Button.

Les seconds rôles comme Elias Koteas, Tilda Swinton ou bien encore Jason Flemyng complètent l’ensemble avec justesse.

Au final, L’étrange histoire de Benjamin Button est un film sur la solitude doublé d’une réflexion sur la vie et la mort… de la meilleure manière de jauger son existence. Course perdue contre le temps qui passe (en sens inverse), drame entre l’être et le paraître, l’œuvre massive de David Fincher est avant tout une formidable histoire d’amour désespérée et glaciale reflétant les maux d’un homme en marge d’une société mais renfermant en lui une partie de chacun de nous.

D’ores et déjà catalogué comme un grand classique au Panthéon du 7ème art et grand favori des prochains Oscars (ils méritent les 13 statuettes haut la main),

L’étrange histoire de Benjamin Button est un film important, complexe et d’une infinie beauté ou chaque détail compte.

Un grand film unique, beau, intelligent et sincère. Un film parfait. Un chef d’œuvre complet.


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