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Une longue histoire ( Dernière partie )

Par Daniel Valdenaire

 DERNIER CHAPITRE

La tente de Kadhafi, tout le monde l’a vue à la télé, mais la voir en vrai, c’est recevoir un choc. Elle est grande comme la moitié d’un stade de foot ! Il doit y avoir la climatisation parce qu’il y règne une fraîcheur étonnante. Au fond, doit se trouver l’intendance. Au moins six créatures de rêve ( 1,85 m yeux noirs et cheveux noirs que recouvre un foulard marron qui ajoute au charme évident de ces jeunes femmes. ) s’affairent en silence.

Dans la première partie, celle où les invités sont reçus, une multitude de coussins chamarés sont posés à même le sol. Au milieu une dizaine de fauteuils Louis XV trônent autour d’une table basse d’au moins six mètres de longueur.

Kadhafi attend sur le seuil de la tente. Il est grand, large. On ne distingue rien derrière ses grosses lunettes noires. Son visage buriné est impassible et Cécilia ne pu s’empêcher de se dire que cet homme avait quelque chose de maléfique.

Sarkozy l’avait prévenu :

- Surtout, ne te laisse pas impressionner. Il va faire son cinéma de bédouin dans le désert, mais il n est pas plus bédouin que moi. Ces gens là, si on se laisse faire, ils nous bouffent. Sois forte, pense au résultat !

- Entrez, prenez place !

Une créature s’était déjà préparée à avancer les fauteuils. L’ambiance était surréaliste. Cécilia en aurait des choses à raconter à ses copines.

Un silence pesant se crée pendant quelques secondes. Les hôtes ont les yeux fixés sur Kadhafi et n’osent entamer la discussion, mais il intervient :

- Bon, vous connaissez sûrement mes exigences, mais je vais vous les répéter. Pour les enfants, j’ai fait vérifier si l’argent était bien arrivé. J’ai su que l’Emir du Quatar vous avais avancé l’argent. Quand je lui demande des sous à celui-là, soi-disant il n’en n’a pas , mais quand c’est pour se faire bien voir de L’Europe, là il se bouge. Je me demande où elle est la solidarité des Arabes !

Tout son corps est en mouvement, les bras sont tendus comme pointés sur les invités et ceux-ci se disent que c’est mal parti.

Bon, excusez-moi, je m’emporte, mais ce n’est rien, où en étions-nous ? Ah ! Oui, vous êtes là pour les infirmières.

A ces mots, Cécilia manque de tomber de sa chaise. S’il ne sait pas pourquoi nous sommes là se dit-elle, je ne vois pas comment nous pourrons aboutir.

Il reprend, alors que personne n’a encore pris la parole :

- Voilà ce que je veux, je veux une centrale nucléaire pour désaliniser l’eau. Est-ce que vous pouvez m’apporter des éléments aujourd’hui, sinon, ce n’est même pas la peine de continuer !

Guéant gigote sur son fauteuil. Pourquoi n’est-il pas dans son potager avec ses fraises et ses tomates. La commissaire, béate, ne semble pas être consciente de ce qui se passe. Depuis qu’elle a su qu’elle participerait à cette aventure elle ne tient plus en place.

Saïf, dans un coin de la tente lorgne sur les créatures, il n’a pas osé se joindre au groupe.

Cécilia se dit que c’est le moment de s’imposer, sinon il vont tous repartir «  la queue entre les jambes « 

- Monsieur le président, nous avons avec nous le dossier de préparation d’une étude de faisabilité d’une centrale dans votre pays.

- Quoi ? Un dossier de faisabilité ?  Vous vous moquez de moi ? Il rugit, son visage s’est durci, les rides se sont creusées et il abat sa canne sur la table. Je ne veux pas d’étude ! Je veux ma centrale, sinon vous repartez tout de suite !

- Je vous prie de bien vouloir me pardonner, je me suis mal exprimée, je voulais simplement vous indiquer que le projet était prêt, mais que sa réalisation passe, et vous le comprendrez, par une étude avec vos services. Je suis sûre que vous vous rendez compte de l’importance que représente la construction d’une centrale nucléaire. Je tiens à vous dire que mon mari doit se rendre dans votre pays dès lundi prochain pour signer nos accords.

- Vous savez depuis combien de temps, je veux une centrale ? Non vous ne le savez pas, j’en suis sûr, vous étiez encore petite ! Cela fait trente ans que j’en veux une ! Trente ans ! Trente ans ! L’Iran en aurait une et pas moi ? Vous savez que je suis le leader des pays Arabes ? Rien ne peut se faire sans moi.

Guéant, dans un effort surhumain, prend la parole :

- Soyez rassuré, nous allons signer, si vous le désirez l’avant projet…

- Je ne veux pas d’avant projet ! Je veux ma centrale, c’est clair !

- Très bien M. le président, nous signerons.

Cécilia commence à bouillir. La diplomatie ça va un moment, mais son tempérament ne lui donne pas beaucoup de marge avant de se mettre en colère.

Guéant s’en aperçoit. Il frémit. Il réussit à lui faire comprendre qu’elle doit prendre sur elle. La commissaire est toujours béate. Un peu à l’image de L’Europe quand elle doit agir dans le monde.

Cécilia ne peut se contenir :

M. le président, nous sommes là pour négocier la libération des infirmières et du médecin et nous entendons réussir notre mission. Je me permets de vous rappeler que votre pays a tout intérêt à se sortir de cette impasse. Vous pouvez reporter cette libération, mais nous pouvons différer également la signature du contrat concernant la construction d’une centrale.

Kadhafi blémit, sa lèvre supérieure se soulève, il tend la canne en direction de Cécilia :

- Madame, vous n’avez pas le droit de me parler comme ça. Savez-vous qui je suis ?

- Guéant :

- Je pense que nous nous égarons. Nous avons de quoi satisfaire à toutes vos demandes et il serait dommage que nos efforts soient vains.

- Vous avez raison. Calmons-nous. Le guide suprême se radoucit.

- Saïf ! Viens là !

Le fils surgit comme monté sur ressorts.

- Voilà, fils, le premier ministre va arriver, vous allez continuer la discussion. Tu connais mes demandes ? On ne doit pas en démordre ! T’as compris ?

- Oui p’pa.

Cécilia sursaute et se lève.

Guéant se tasse .

La commissaire est toujours béate.

- M. le président, je suis désolé, mais vous ne pouvez partir sans nous donne des assurances sur la libération.

Elle est droite devant Kadhafi. Elle est aussi grande que lui. Elle le défie. Malgré les lunettes, on peut sentir le regard masculin sur cette femme qui ose le défier.

- Continuez la discussion et vous me tiendrezt au courant quand ce sera terminé. Je ne dors pas beaucoup. Vous pouvez me déranger quand vous voulez, mais pour le moment je dois partir et vous ne m’en empêcherez pas !

Elle est obligée de le laisser partir sans savoir ce qu’il adviendra de ce qu’elle et son mari attendent tant. Elle essuie un moment de découragement.

Le bruit du 4×4 résonne comme un espoir déçu.

Saïf intervient. Son père parti, il retrouve sa superbe et son sourire ramène un peu de baume au cœur des négociateurs.

Il demande aux créatures d’apporter des boissons, lesquelles arrivent dans les dix secondes. Magique !

- Mon père a son caractère. Mais je voudrais vous assurer que nous avons de nombreuses discussions avec le gouvernement tout entier et que la Lybie souhaite plus que tout à se sortir de cette situation. Je pense que vous avez fait de gros efforts et vous pouvez compter sur mon aide.

Cécilia respire, son polo Lacoste est trempé. Quelle horreur ! Heureusement, elle a pensé à en emporter plusieurs. Elle demande à téléphoner à Paris.

- Allo !

- C’est Cécilia !

- Ah ! Ma Cécilia ! Tu sais que nous sommes sur les dents, ici !

- Peut-être, mais c’est rien à côté de ce que nous vivons…

- Qu’est-ce qui se passe ? Ca marche pas ? Ah ! Non ! Je vais y aller moi, tu vas voir !

- Arrête, calme-toi ! C’est dur, mais je pense que ça va marcher. Mais quand même cette centrale, j’espère que tu sais ce que tu fais. En tout cas, lui il la veut sa centrale.

- Oui, je sais, on va lui faire sa centrale. De toutes façons avant qu’elle soit au point, l’eau coulera sous les ponts ! Promettez lui tout ce qu’il veut. Mais ramenez les infirmières !

- Bon je vais y retourner. Occupe toi bien de Louis. T’as des nouvelles de Rachida ? J’aimerais qu’elle m’appelle dans quelques heures. Bisous.

- Bisous, ma chérie.

Jamais, il n’aurait imaginé mettre sa femme dans une telle situation. Si elle se sort de ce guêpier, il pourra être fier d’elle et les loups pourront bien hurler.

Il aura fallu encore toute la nuit pour obtenir l’accord de Kadhafi qui à chaque avancée en rajoutait. Guéant était crevé. La commissaire était béate. Au dernier moment il fallu rajouter à l’addition une autoroute traversant le pays de la Tunisie à l’Egypte.

La suite on la connaît.

motpassant

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