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Quand la fête continue

Par Jlk
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Un nouveau régal postmoderne signé Daniel Kehlmann, avec Gloire, roman en neuf nouvelles.
Deux ans après la découverte des mémorables Arpenteurs, c’est une modulation tout actuelle de l’observation de Daniel Kehlmann que nous vaut Gloire (Ruhm, 2009) sous la forme d’un ensemble composite et cependant lié, rappelant le roman-en-histoires de L’Epigramme de Gottfried Keller, avec une suite de nouvelles dont certains personnages et certains thèmes reviennent de l’une à l’autre. On est ici dans le vif et les embrouilles de la société de consommation et de communication, où les formes même de celle-ci (du SMS au message vocal ou du mail à la Toile) déterminent les formes du récit.
C’est ainsi que, dans le premier de ceux-ci, intitulé Voix, tel quidam, réparateur d’ordis fatigué de son épouse légitime (et vice versa), se trouve soudain en butte aux messages privés et professsionnels adressés à un acteur de cinéma très en vue, qui devient ensuite le sujet de la quatrième nouvelle du livre, L’issue.
Comme J.M. Coetzee dans Elizabeth Costello, ou comme Amos Oz dans Vie et mort en quatre rimes, Daniel Kehlmann se plaît à brocarder la vie de l’écrivain célèbre par les temps qui courent, notamment dans En danger où voyagent, d’un centre culturel à l’autre, un romancier égocentrique et pusillanime comme pas deux, qui croit vivre une vie dangereuse, et sa compagne du moment, cadre dans l’humanitaire, recevant les dernières nouvelles, sur son portable, de trois de ses délégués pris en otages quelque part en Afrique.
Daniel Kehlmann a-t-il lu Marcel Aymé ? Cela m’étonnerait, et pourtant la troisième histoire de Gloire recoupe exactement le canevas du Romancier Martin, qui évoquait les relations d’un écrivain avec ses personnages fâchés du sort qu’on leur réservait. Ici, dans Rosalie s'en va mourir, la vieille Rosalie a aussi de quoi se plaindre de son créateur, qui lui découvre un cancer du pancréas fatal et l’envoie à Zurich se faire administrer une certain potion d'ultime soulagement, avant que le récit ne dévie...
Toujours vif de ton et de patte, très poreux de feeling et très finement intelligent dans ses constructions narratives, Daniel Kehlmann parle de notre drôle d’époque avec autant de bonheur que du XIXe bouvard-et-pécuchesque de ses Arpenteurs. Je reviendrai sous moins que peu à l'entier de Gloire…
Kehlmann6.jpgDaniel Kehlmann. Gloire. Actes Sud, 175p.

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