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Battre ton tambour

Publié le 02 mars 2009 par Menear
1
Entre deux portes ouvertes, celle du bureau qui se ferme rue du Louvre et celle de chez moi qui s'ouvre à Y., trois heures s'écoulent. Il y a eu un accident, ils disent, de la tôle froissée sur passage à niveau, du gasoil répandu sur les voies et les lignes électriques tranchées par l'impact. J'attends avec les autres, ceux qu'on voit mal, que le périple cesse. Trois heures, cela se prolonge, soit le temps fictif que j'aurais mis, partant de Gare de Lyon, pour rejoindre Saint-Étienne en TGV. Comme le temps est malléable, on se dit.
2
Le bus relai qu'on prend entre S. et Y. me rappelle les retours secs sur les routes sarthoises, l'année dernière. Au détour d'un virage, après quartier résidentiel mousseux, la façade d'une de ces maisons témoins qu'on visite pour copier l'intérieur. La publicité au mur : « Ouvert sept jours sur sept (sauf le mercredi) ».
3
Sur l'asphalte de la gare routière Zola, l'agent SNCF en charge de gérer les nerfs de la foule est superbe d'effacement. Il a le bleu du gilet, joues rasées de rien et la clope aux lèvres qu'il tombe en marchant entre. Il parle, est écouté, ses yeux fixés sur l'envers du reste, il n'est pas là. Il aurait fallu sortir la machine à penser vite et à fixer mental, mais j'étais usé déjà, et le croquis n'a pas pris.
4
Nous avons attendu longtemps à S. avant qu'ils mettent en place les premiers bus de remplacement. Deux d'abord, cinq autres ensuite : nous étions trop nombreux. Les corps se sont jetés sous les roues du scolaire qui s'est approché le premier. Nous nous sommes retrouvés aspirés dans le siphon de l'entrée, pressés par les corps derrière, sous les gaz d'échappement du second bus en attente.
5
L'agent SNCF a dit : le bus ne partira pas tant qu'il y aura encore des gens debout derrière. J'étais tout au fond déjà, le nez dans la vitre. Mon voisin de gauche m'a dit : « baisse la tête sinon il va te compter ». Je suis resté dans ma vitre.
6
Après avoir lu Cormac McCarthy, maintenant Antoine Emaz, je me dis : jamais je n'arriverai, les jours prochains, à construire des phrases de plus de dix mots.

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