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GRAN TORINO (de Clint Eastwood)

Publié le 04 mars 2009 par Devotionall


J'ai lu certaines critiques de GRAN TORINO qui faisaient preuve de mauvaise foi, ou d'incompétence patente. Ce film est grand, Eastwood est grand. Oui c'est vrai, le Kowalski qu'il y interprète est imbuvable, un vieux raciste acariâtre qui préfigure ce que de pire on peut trouver chez un républicain pur jus, mais de là à y voir le penchant naturel de Clint pour la loi et l'ordre ( certes, coté politique, Clint n'est pas un démocrate...) et une certaine idée de préférence nationale, je ne suis pas d'accord. GRAN TORINO parle à mon sens d'un monde où sont absent les valeurs et les points de repères, où le seul américain dans un quartier d'immigrés thaïlandais ou afro américains est aussi l'écho d'un homme qui ne trouve plus dans les dernières générations ( chez ses propres petits enfants, des pestes superficielles ) les règles de vie qui ont toujours guidés ses pas. Attention, Kowalski a ses fantômes, il a servi (servilement ?) en Corée et a du sang sur les mains ( ce qui le tourmente dans le film ), mais quelle guerre peut se targuer d'être propre, ou juste ? Dans GRAN TORINO, c'est toute une Amérique qui fut, et semble en voie de disparition définitive, qui lègue un testament surprenant, qui échoie au plus méritant, au mépris des lois filiales.

Walt Kowalski, vétéran de la guerre de Corée, est un homme inflexible, amer et pétri de préjugés. Il vit seul dans un quartier peuplé d'immigrés. Un jour, sous la pression d'un gang, un ado hmong ( ethnie thaïlandaise ) tente de lui voler sa précieuse Ford Gran Torino... Walt fait face à la bande, et devient malgré lui le héros du quartier. Sue, la soeur aînée de Thao, insiste pour que ce dernier se rachète en travaillant pour Walt. Surmontant ses réticences, ce dernier confie au garçon des "travaux d'intérêt général" au profit du voisinage. C'est le début d'une amitié inattendue, qui changera le cours de leur vie. Eastwood en vieux sage inflexible et impitoyable, est tout bonnement parfait.
Eastwood semble réaliser là une sorte de synthèse idéale de toute la gallerie de personnages qu'il a pu incarner à l'écran : ses grimaces et ses grognements devant un monde qu'il ne comprend pas et réfute d'emblée ( ses voisins asiatiques ) sont une caricature surjouée, mais avec tellement de naturel et d'humour que ça fonctionne à merveille. On pourra accuser le réalisateur de traiter les thaïlandais avec peu de finesse et de les assimiler à une masse sans visage, un groupe stéréotypé et peu caractérisé, mais soyez un peu honnête... Si vous avez comme nous ici à Nice un quartier haute concentration de fast food asiatiques, regardez les visages et les attitudes, et vous comprendrez ce que Clint a voulu signifier, aux yeux du profane, voire de celui qui se méfie et rejette instinctivement qui ne lui est pas assez semblable. La scène finale est émouvante et touchante : Eastwood s'en sort par une jolie pirouette à l'opposé de ce qu'on pouvait légitimement attendre de lui, et ajoute une ultérieure réussite incontestable à une carrière vraiment bien remplie. Peut-on vraiment parler de testament, de dernière grande réussite? En tous les cas, tout y est : du Eastwood dans le texte, de l'humour décapant, de l'action et de la morale ( car oui la morale est parfois salutaire et bienvenue ) et un jeu d'acteur qui frôle la perfection. Si vous n'allez pas voir ce film, je ne peux plus rien pour vous. ( 8,5/10)

GRAN TORINO (de Clint Eastwood)


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