Magazine France

Hadopi pour rien

Publié le 09 mars 2009 par Nicolas J
Hadopi pour rienJe crois que c’est pour mes 17 ans, en 1983, que mon grand frère, alors étudiant à Rennes, m’avait offert Murmur, le premier album d’un tout nouveau groupe alors inconnu. J’avais adoré (et j’ai toujours le CD dans ma voiture) et j’en avais fait des copies sur des cassettes que j’avais donné à mes copains. Tout le monde avait adoré. C’était mal. J’avais piraté. Je ne crois pas que ça a empêché à REM de faire une immense carrière depuis, avec, une dizaine d’années plus tard, deux tubes légendaires : Losing My Religion et Everybody Hurts.
C’est en lisant le billet de Seb, ce matin, que je me suis aperçu que je n’avais pas fait de billet sur la loi Hadopi qui va bientôt passer à l’Assemblée. Une fois n’est pas coutume, je suis d'ailleurs d’accord avec Seb.
J’avais bien mis l’espèce de carré noir en haut à gauche, sur le blog, pour exprimer ma solidarité avec les infonautes mais je ne connais pas grand-chose au sujet (je ne télécharge d’ailleurs jamais rien d’illégal, ni rien du tout d’ailleurs, à part deux ou trois trucs quand j’ai acheté l’iPhone, pour essayer). Comme d’autres blogueurs, d’ailleurs, je ne crois pas spécialement à l’efficacité de ce black out, mais quand je vois des andouilles ouvrir le débat, ça m'énerve : si on ne se bat pas, on n’obtient rien. Je vais néanmoins très prochainement virer ce carré noir (mais n’y voyez aucun aspect politique : tous ces widgets dans la colonne de gauche foutent la grouille quand je veux répondre aux commentaires à partir de l’iPhone).
Je laisse mes collègues blogueurs aborder quelques points très importants à propos de cette loi, son amoralité, son côté liberticide, … pour évoquer le volet économique qui me fait doucement rigoler.
Par exemple, je lisais dans « Métro » ce matin une interview de Thomas Dutronc qui défendait cette loi au nom de la « création ». Pouf Pouf. A moins de porter le nom d’un chanteur célèbre, la meilleure manière de se faire connaître, pour un musicien, est de créer du « buzz », de faire parler de soi, … Le piratage et la diffusion des œuvres dans les cours d’école est le meilleur moyen : je parierais bien, d’ailleurs, que « certains » l’encouragent secrètement. Je me rappelle que des copains à moi avaient déjà vu les Ch’ti avant la sortie en salle ! Ca n’a pas empêché Dany Boom d’empocher l’équivalent de 2090 années de SMIC. Un bon buzz avant la sortie en salle…
Ainsi, il serait amusant de demander un rapport officiel sur le coût de la fraude, c'est-à-dire le manque à gagner pour les professionnels. Il est fort probable que 90% des types qui piratent un truc n’auraient pas acheté le disque ! Si on aime voir un film au ciné, on le regarde au ciné et si on aime réellement un musicien, on achète le disque et on va voir le musicien sur scène. En outre, il n’y a que des gens qui ont du pognon qui peuvent acheter des disques ou des séances de ciné : ils ne vont pas s’amuser à pirater des trucs à un point que ça nuise à l’industrie concernée.
Les principaux emmerdés avec cette histoire de piratage sont les vendeurs de disque. Les gens ne viennent plus acheter des disques dans leur magasin. D’ailleurs, n’oublions pas que le rapport à l’origine de la loi a été rédigé par le patron de la FNAC ! Ca rend d’autant plus grotesque cette loi… d’autant que ce n’est pas le piratage qui est en cause mais le téléchargement de musique ! Par exemple, j’ai acheté l’iPhone à peu près au moment de la sortie du dernier disque de Franz Ferdinand que je voulais acheter. Finalement, je l’ai téléchargé légalement. Il faudra bien que les vendeurs de CD divers se rendent compte que leur métier est fini. Ca va nous mettre des caissières au chômage (d’ailleurs un plan social est en cours à la FNAC), c’est dramatique, mais ce n’est pas une loi bidon qui l’empêchera !
Cette loi va d’ailleurs totalement à reculons. D’une part, elle ne changera rien : nos joyeux fraudeurs finiront bien par trouver un truc pour contrôler et nos FAI auront du mal à repérer les téléchargements illégaux parmi les centaines de milliards de machins qui vont s’échanger sur le net. D’autre part, avec le progrès technologique, nous aurons tous internet avec des milliers de gigamachins de débit d’ici cinq ou dix ans et c’est toute l’industrie de la musique et du disque qui s’en trouvera bouleversée. Pour résumer, on regardera des films comme on commence, maintenant, à écouter de la musique avec des trucs comme Deezer.
Ainsi, nos industriels ont raté le train. Ils ont perdu un moyen de gagner de l’oseille et négocient avec nos dirigeants pour tenter de rattraper le coup. Ces derniers nous refilent la loi la plus ringarde de tous les pays Européens pour leur rendre service. Les députés auraient mieux à faire. Les industriels n’ont qu’à trouver d’autres trucs pour gagner des sous (ce que soulève d’ailleurs Seb dans son billet).
Peut-être arrivera-t-on à une situation normale : les chanteurs gagnant de l’oseille en faisant de la scène et pas en vendant des nouilles et les cinéastes gagnant du blé en projetant des films sur des grands écrans dans des salles noires et pas en vendant des pin’s avec la tête de Zac Efron.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Nicolas J 58 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte