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Watchmen de zack snyder : la critique cinÉma de frÉdÉrick sigrist

Par Anomalie


Une critique, on l’oublie assez souvent, est par essence subjective. Certaines plumes érudites peuvent donner l’illusion de l’impartialité, mais soyons honnêtes : un avis n’est jamais qu’un jugement personnel établi sur la base d’une expérience qui ne l’est pas moins. Donc je vous le dis d’entrée de jeu, cette critique de
Watchmen, le nouveau film de Zack Snyder, le réalisateur du non moins polémique 300, ne sera pas objective.
Watchmen le film est l’adaptation de Watchmen le graphic novel, paru en 1987, écrit par le Britannique Alan Moore et dessiné par Dave Gibbons. Si la passion du comic book était une religion, autant le dire de suite, Watchmen en serait la bible. L’œuvre fondatrice de toute la culture comics moderne. Les dernières grandes sagas des deux grandes maisons d’édition que sont Marvel et DC, notamment « Civil War » ou « Identity Crisis », ne sont qu’une variation de moindre qualité sur des thèmes abordés dans Watchmen.
Bien plus que les ouvrages de Frank Miller, c’est ce roman graphique qui a fait entrer le comic book dans l’âge adulte. En nous présentant une Amérique impérialiste coincée dans une Guerre froide sans lendemain, Moore nous parle de la fin d’une époque, de la fin d’un rêve américain, symbolisé par des héros perdus, névrosés, sociopathes et en quête de sens. Dans un monde où la politique, les idéologies et l’économie prédominent, que peut réellement la figure du vigilante masqué ? Plus simplement,
Watchmen nous apporte la réponse à cette question : Que serait le monde si Superman existait ? Le monde ne changerait sûrement pas fondamentalement, mais Superman, si.
Qu’en est-il du film
Watchmen ?
Œuvre autrement plus subtile que
300, la précédente adaptation de Zack Snyder, ce dernier était attendu au tournant par des millions de fans de par le monde. Truffé d’intrigues parallèles, de personnages secondaires, de différents niveaux de lecture, ce récit a longtemps été qualifié d’inadaptable, à l’instar du Seigneur des anneaux. Zack Snyder est-il de la trempe de Peter Jackson ? À la vision du film, la réponse est sans appel… Non ! Snyder a fait le choix de la non-adaptation en réalisant un film tout entier dédié aux fans de l’œuvre originelle. Aucune passerelle n’est établie afin que le néophyte puisse s’approprier les règles du genre. Le spectateur doit accepter d’emblée l’existence des supers héros, d’un Docteur Manhattan démiurge bleu complètement nu philosophant sur sa condition à la surface de la planète Mars, mais surtout doit faire face à l’absence d’un personnage candide censé incarner le regard du béotien.
Watchmen déstructure la cosmogonie des super héros, mais pour applaudir à l’exercice, il faut déjà avoir une connaissance aigue de ladite structure. Snyder présuppose que les récents succès de films de super héros ont développé une conscience du genre chez les spectateurs. C’est en partie vrai, mais connaître son alphabet n’a jamais permis à un enfant de lire immédiatement l’Odyssée. C’est cet écueil dans lequel tombe Zack Snyder… Pour mon plus grand plaisir !

Car pour la première fois depuis l’explosion des adaptations de ce genre, j’ai eu l’impression que l’on s’adressait directement à moi, un geek adulte, sans complaisance. The Dark Knight amorçait une évolution, Watchmen la confirme. Violent, charnel, sexy, viscéral, audacieux, Watchmen offre 2h40 dans son montage cinéma, d’un spectacle immédiatement culte ! Oui, le mot est lancé : bien que moins riche thématiquement que son pendant dessiné, Watchmen est un véritable film d’auteur qui ne plaira pas à tout le monde. Si HBO (la chaîne du câble américain qui a commis Oz, Rome, Six feet under ou The Wire) avait financé un film de super héros, il aurait sûrement ressemblé à celui-ci, tant les partis pris esthétiques sont radicaux. En effet, d'un point de vue fan boy tarte dans la gueule, je dois l’avouer, Watchmen déchire ! Les coups font mal, les combats sont divinement chorégraphiés (Sur 300 déjà, on voyait que Snyder n’a peur de rien dès qu’il s’agit de montrer des corps qui se rentrent dedans… Dans tous les sens du terme). Le sang coule à flot ; âmes sensibles s’abstenir. Mais dois-je dire : que c’était bon ! J’ai déjà vu le film deux fois, une fois en tant que puriste jouant au jeu des différences ! Une autre fois en amateur de film de genre. Et je l’avoue, j’ai déjà envie de le voir de nouveau. Alors vous voici prévenu, ne vous fiez pas à cette campagne de pub racoleuse qui voudrait vous faire passer Watchmen pour un énième film de super héros, le Watchmen de Zack Snyder est une conversation dans une langue étrangère qu’il vous faudra malheureusement maîtriser pleinement si vous voulez l’apprécier à sa juste mesure. Une alternative préférable existe bien évidemment, et je souhaite qu’elle emporte votre adhésion : achetez le graphic novel original ; lisez le, dégustez le, c’est une œuvre majeure qui mérite qu’on s’y intéresse quels que soient ses goûts.

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