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Rapport Balladur : pour une nouvelle décentralisation

Publié le 12 mars 2009 par Pierreregnault

Les conseillers généraux socialistes de vendée ont décidé de ne pas répondre à une "convocation" à une réunion extraordinaire du Conseil Général présidé par Philippe de Villiers, avec comme ordre du jour le rapport Balladur, et cela pour ne pas cautionner son habituel "show" qui consiste à utiliser l'actualité pour «faire de la com», confisquer le débat et le restreindre à son seul point de vue conservateur.  Voici le texte de la conférence de presse que nous avons donnée ce jour .


Nous connaissons la réticence du Président du Conseil à toute forme de nouveauté et de changement et son habituel refrain sur l’histoire et l’identité de la Vendée.


Nous avons pris connaissance du rapport du comité Balladur  et nous 
ne sommes pas dupes de la période qui a été choisie pour le « sortir »  et les velléités électoralistes sous-jacentes pour tenter de reprendre des Régions à la gauche. Ceci couplé à la stratégie du leurre pour masquer auprès de l’opinion publique l’impuissance du chef de l’Etat et du gouvernement à répondre aux attentes des Français.

 

Rapport Balladur : pour une nouvelle décentralisation


Le contexte voudrait en effet que le gouvernement s’engage d’abord et pleinement sur les questions sociales liées au pouvoir d’achat et à l’emploi.

Nous ne partageons pas certaines propositions du rapport, et tout particulièrement celles qui n’ont pas été votées par les deux représentants PS dans cette commission, Pierre Mauroy et André Valini.

Nous estimons néanmoins qu’il est temps de réaliser deux nouvelles avancées démocratiques. Seule la gauche peut être porteuse des valeurs d’une République décentralisée. Il faut donc :

1- Engager une nouvelle grande étape de décentralisation 27 ans après les grandes lois Defferre-Mauroy, qui doit concerner l’Etat également.

2- Mettre au point une nouvelle fiscalité locale La fiscalité actuelle est à bout de souffle et plus du tout adaptée aux besoins des collectivités notamment après l’annonce de la suppression de la TP. La mise en place d’une fiscalité nouvelle, dynamique, avec des bases rénovées, actualisées, devrait être un préalable à toute nouvelle étape de décentralisation.

Mais tout cela devrait se faire en concertation avec les associations représentatives d’élus locaux, les partis politiques et évidemment le Parlement. Cette démarche de concertation n’est hélas pas la pratique actuelle du gouvernement Sarkozy !

Le débat doit avoir lieu avec les élus locaux. Ils sont prêts, toutes tendances confondues, à participer à la réforme de l’organisation territoriale de la France dans une approche conforme à l’esprit de la décentralisation et de la République.

Quelques points du rapport Balladur nous semblent toutefois intéressants et méritent d’être approfondis. Nous craignons hélas qu’ils passent à la trappe compte tenu de la façon dont le débat s’est engagé.

1.   Le premier point majeur des conclusions du Comité Balladur : l’intercommunalité.

Nous partageons l’analyse que les deux échelons d’avenir à renforcer sont :

-   le niveau communal et intercommunal

-   le niveau régional

Cette analyse, formidablement bien argumentée par Pierre Mauroy, n’est évidemment pas partagée par Philippe De Villiers, même si nous estimons que le département a, dans la France d’aujourd’hui, toute sa place sous réserve d’en revoir le mode d’élection.

Le niveau Communal et Intercommunalité

Il est important que la carte de l’intercommunalité en France soit achevée, si possible avant 2012 et non pas 2014 comme le préconise le rapport Balladur, pour que les prochaines élections municipales et intercommunales puissent s’appuyer sur une réalité intercommunale déjà vécue sur tout le territoire et des projets politiques intercommunaux.

Une proposition du Comité Balladur d’organiser les élections municipales en « fléchant » les futurs élus intercommunaux va dans le bon sens. Elle semble malheureusement déjà écartée par le chef de l’Etat.

Nous partageons le fait que la commune reste l’échelon de base de notre organisation et de notre démocratie locale, mais rapprocher l’intercommunalité du citoyen par le biais de l’élection ne pourrait qu’améliorer la démocratie locale.

Il faut également renforcer les compétences stratégiques des communautés ainsi que les passerelles entre les régions et les intercommunalités. La région doit devenir le chef de file incontesté de l’action publique au plan régional, en lien avec les échelons de proximité que sont les communes et les départements et cela sans avoir à en répondre en permanence à l‘Etat au plan régional, et les communes et intercommunalités au plan départemental.

Le projet Balladur pour Paris et l’agglomération parisienne n’est pas recevable

Le projet de « Grand Paris » présente un périmètre trop vaste pour gérer les services de proximité et trop étroit pour définir les grandes stratégies (transports, développement économique…). Le syndicat mixte Paris-Métropole est au contraire la bonne formule pour garantir à la métropole parisienne une vision stratégique (allant au-delà des trois départements de la petite couronne, vers les zones d’activités des aéroports de Roissy et Orly, vers le plateau de Saclay, vers les villes nouvelles – Cergy…), et aux départements et intercommunalités la pertinence de politiques de proximité. Le projet conduit par Bertrand Delanoë de ce point de vue, est en train de fédérer tous les élus et collectivités concernés.

Constituer des Métropoles fortes, renforcer les agglomérations et construire des réseaux métropolitains.

L’émergence de métropoles de dimension européenne est indispensable pour notre Pays. Dans l’Europe d’aujourd’hui c’est l’un des points faibles de la France. Il faut donc suivre les préconisations du rapport mais en porter le nombre à 20 ou 25 et laisser la possibilité à d’autres agglomérations de se constituer en métropole. Elle doit cependant s’accompagner d’un soutien aux autres agglomérations, de façon à en faire des espaces de solidarité en lien avec les métropoles de niveau européen.

En fait il s’agit de renforcer à tous les niveaux la puissance des intercommunalités et en faire des réseaux de villes et d’agglomérations solidaires entre elles autour de leur métropole européenne en lien avec le niveau régional.

 
Une source d’inquiétude : l’avenir des régions.

Le faux débat sur la taille des Régions a d’abord été instrumentalisé par Sarkozy lui-même, pour créer une diversion et chercher à diviser la gauche comme le rattachement de la Loire Atlantique à la Bretagne ou l’éclatement de la Picardie. Il s’en est vanté lors de son déplacement en Maine et Loire récemment : on attend autre chose d’un président de la République !

Ce qui compte ce sont les compétences réelles et les moyens dont disposent les Régions qui doivent prendre plus de responsabilités en matière de déplacements : routes et ferroviaires, d’aménagement du territoire, de développement économique, de formation : professionnelle, collèges, lycées, universités, recherche….

Concernant le mode d’élection, nous nous opposons et nous opposerons de toutes nos forces au projet de fusion des élus régionaux et départementaux, sous le vocable « conseillers territoriaux ».

Ce projet est dangereux car :

  • Il remet en cause l’équilibre de la République
  • Il fragiliserait la Région en envoyant siéger au Conseil régional les élus des départements et en supprimant le lien direct avec les électeurs et la collectivité concernée. C’est un choix de la droite qui ne veut pas de Région forte car son choix est d’abord de « recentraliser » les pouvoirs.
  • il fragilise le département qui n’aurait plus l’autorité d’élus d’une collectivité de plein exercice notamment en matière d’interventions sociales.
  • En fait il conduirait au choix qu’a fait la droite, sans le dire, de supprimer le département, à moyen terme.

Il faut au contraire renforcer chaque collectivité, car chacune a son utilité, en clarifiant les compétences des régions et départements, en désignant des chefs de file pour les compétences partagées et en renforçant les modalités de coordination entre départements et régions afin d’assurer la cohérence des grandes politiques publiques. Il ne faut pas exagérer les compétences croisées entre régions et départements puisque d’ores et déjà 80 % des compétences sont bien distinctes.

Concernant le mode électoral des trois niveaux de collectivités, le scrutin de liste est le plus adapté à la représentation démocratique, c’est pourquoi il doit être maintenu au niveau régional et étendu au niveau départemental.

Le cadre cantonal n’est plus adapté aux réalités contemporaines et conduit à des disparités excessives de représentativité démographique, le scrutin uninominal ayant de plus pour effet de contrarier l’effort de féminisation de la vie publique et la représentation de la diversité des sensibilités politiques.

Nous souhaitons ni plus ni moins que le scrutin municipal mis en place par la gauche qui a donné satisfaction à tous, qui a été étendu par la gauche aux régions soit à TOUS les échelons de nos collectivités !

Nous souhaitons que les quatre mois donnés par le chef de l’Etat au chef du gouvernement pour organiser la réflexion autour des propositions du Comité Balladur soient mis à profit pour approfondir cette question et trouver une solution démocratiquement acceptable pour la représentation de nos territoires.

  

Autre source d’inquiétude : la suppression de la taxe professionnelle.

Depuis de nombreuses années, la réforme de la fiscalité locale est une demande des associations d’élus locaux qui ont en la matière de nombreuses propositions, que le pouvoir n’a jamais pris en compte.

Nous dénonçons la suppression de la taxe professionnelle annoncée par le président de la République sans qu’il soit proposé aux collectivités une ressource alternative qui leur assure des recettes dynamiques liées à l’activité économique. Comme l’ARF, l’AMF, la FMVM, l’AdCF et bien sûr le PS, nous demandons une réforme de la fiscalité locale qui remplisse trois objectifs :

 
Le maintien de l’autonomie fiscale des collectivités qui doivent être libres de lever l’impôt : c’est l’un des pivots de la démocratie.

Le maintien de l’équilibre entre les impôts « ménages » et les impôts « entreprises » au sein des recettes des collectivités, pour plus de justice fiscale ; Nous craignons à travers les propositions du comité que le renforcement du foncier bâti ne vienne taxer encore plus les ménages.

Le remplacement de la TP par une nouvelle imposition économique locale (sur les entreprises) fondée en partie sur la valeur ajoutée.

L’Etat doit également pouvoir jouer tout son rôle en renforçant la péréquation entre les collectivités et entre les territoires riches et pauvres : la disparité est trop forte en France.

Les pistes proposées par le Comité Balladur pour compenser la suppression de la TP ne répondent malheureusement pas à l’ampleur des enjeux et doivent être retravaillées pour répondre à trois objectifs : justice fiscale, autonomie financière des collectivités locales, péréquation entre les territoires.

Contre l’abandon de la clause de compétence générale

Le problème n’est pas la clause de compétence générale qui permet aux collectivités d’intervenir en complément d’autres financements (comment, dans ce cas, l’Etat pourra-t-il mener ses projets de grands travaux – TGV, LGV, universités, etc. – largement cofinancés par les collectivités locales, notamment les régions ? Comment les acteurs français, publics comme privés, pourront-ils bénéficier des aides européennes qui sont conditionnées au cofinancement ?)

L’Etat est oublié dans la réforme Balladur !

Il faut mettre fin au « doublonnement » des compétences par l’organisation territoriale de l’Etat (enchevêtrement de compétences, financements croisés, etc.) comme le dénoncent l’AdCF, l’ADF et l’ARF. Il faut aujourd’hui mieux clarifier les compétences, entre l’Etat et les collectivités locales en veillant à ce qu’aucune collectivité ne soit sous tutelle d’une autre.

Il faut aussi, c’est très important, revoir les rapports entre l’Etat et les collectivités locales. Une nouvelle étape de décentralisation doit conduire à supprimer des services de l’Etat en départements, en Régions et au plan national dans les domaines de compétences transférées au bénéfice des collectivités locales

Ce qui veut dire que, parallèlement, l’Etat doit être renforcé dans son rôle régalien, de stratège, d’arbitre et de « péréquateur » des richesses nationales.

L’ensemble de mesures permettrait la montée en puissance progressive de deux collectivités : la région et l’intercommunalité

 

Cette réforme soulève de vrais enjeux et exige, avant tout, le temps nécessaire à une

Rapport Balladur : pour une nouvelle décentralisation
concertation approfondie : la décentralisation et la démocratie locale qui en résulte ne peuvent souffrir d’une réforme bâclée et menée au pas de charge comme toutes celles menées depuis 2007.

Cette réforme, pour être utile au Pays et à nos concitoyens, doit conduire à la réduction des disparités territoriales – et au retour de l’Etat dans ce domaine -, à l’efficacité accrue des politiques publiques et au renfor-cement de la démocratie locale.

Les élus socialistes et apparentés veulent contribuer utilement au débat et rappeler que tout ce qui peut concourir à améliorer la lisibilité de l’action politique et à simplifier l’organisation territoriale doit bénéficier au citoyen, à condition que la réflexion se fasse avec tous les acteurs concernés et qu’il n’y ait pas de calculs électoralistes.

Certaines des préconisations du rapport Balladur peuvent, si elles sont précisées et partagées, redonner un élan à une décentralisation qui marque le pas depuis plusieurs années de gouvernement de droite.

Mais l’acte 3 de la décentralisation ne semble pas à l’ordre du jour et l’ambition n’y est pas comme le déplore Pierre Mauroy.  

Pierre Mauroy disait d’ailleurs lors des premières lois de décentralisation que : "La décentralisation est aujourd'hui le meilleur moyen de réaliser et d'accentuer la démocratie. Elle est, pour tous, la possibilité d'accéder à la responsabilité et à la liberté... (Héritiers de l'avenir, Stock). Nous devons garder à l’esprit cet objectif et le défendre. 


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