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Des contes détricotés !

Publié le 13 mars 2009 par Clarabel

Qui es-tu, Isabelle Sojfer ? En 2006, déjà tu avais commis un premier recueil intitulé A conserver au frais et je t'avais découverte ainsi, totalement scotchée par ton aplomb et ton indécence jamais honteuse. Tu mettais en scène sur un ton ironique des parodies de contes de fée ou de classiques de la littérature. Et le résultat était désopilant ! Cendrillon n'a pas trouvé chaussure à son pied, par contre elle en collectionne des paires. Le roi Lear est chassé de sa tour capitaliste et devient un vieux fou aigri. Le Père Noël est sérieusement déprimé, le Chaperon rouge a perdu de sa candeur et Poucet a été abandonné au royaume du Bon Marché...

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En 2007, tu récidives avec Cent quinze romans-fleuves, un autre recueil d'histoires très courtes, à peine dix lignes au maximum. Cela défile, comme un flash continu, et ça débite des histoires insensées, toujours drôles, cruelles et parfois choquantes. Ce n'est pas la volonté de mousser qui se cache derrière, c'est juste l'envie de débroussailler des idées trop belles et qui correspondrait mieux à cette désinvolture. Tu as trempé ta plume dans l'humour noir, il ne faut pas y voir du mal. J'ai lu quelque part que tes textes courts se veulent saugrenus ou méchants, avec tes victimes préférées : les princesses, les personnages de contes ou de littérature, et même des membres de la famille ou d'anciens amants. Un avant-goût : Robinson Crusoé rencontre Vendredi en surfant sur Internet, les rescapés d'un naufrage tirent au sort pour savoir lequel sera mangé, une jeune femme pond des crottes en vrai chocolat... mais il y a du talent dans chaque page. On croirait un carnet rose, à voir cette délicieuse couverture, laissez-vous berner. Cela me plairait infiniment ! ;o)

Restaurant
Le loup n'a pas envie de manger le Petit Chaperon rouge : c'est trop téléphoné, il voudrait se démarquer. Il l'invite à dîner dans un restaurant végétarien. Il commande des haricots blancs, du vin biologique. Il parle de son métier. Il évoque même la psychothérapie grâce à laquelle il a trouvé sa véritable identité. Vers la fin du repas, il tente de poser sa grosse patte poilue sur la main du Petit Chaperon rouge mais la main se dérobe, il se fait tard, demain le Petit Chaperon rouge se lève tôt.

Union
La Belle et le prince sont mariés depuis deux mois. Leur union n'est toujours pas consommée. A la Cour, on s'inquiète. On les interroge en privé pour démêler la cause de leur abstinence. C'est la Belle qui se refuse au prince. Elle le trouvait sexy quand il était la Bête, avec ses poils partout.

Trop tard
Le loup est marié, il ne laisse pas son numéro de téléphone au Petit Chaperon rouge, c'est toujours lui qui appelle. Il lui fixe des rendez-vous au coin du bois à la tombée de la nuit, il arrive en retard. Parfois même il ne vient pas. Un soir, il trouve un épouvantail revêtu d'une pèlerine rouge, avec un mot épinglé sur le col : "Trop tard ! Je donne ma langue au chat."

Les videurs
Cendrillon regrette d'avoir filé comme une voleuse. Rien ne la forçait à partir si tôt. Elle essaye de regagner le bal mais les videurs ne la laissent pas entrer. Elle n'a plus son invitation. Elle a l'air d'une souillon à claudiquer avec une seule chaussure.

Les Petits Matins, 2007 - 128 pages - 15€

http://sojfer.canalblog.com/

# Pas dupe, de Jeanne Balibar http://www.deezer.com/track/224545

Nota Bene : je trouve que A conserver au frais mériterait une deuxième chance en format poche. La personne qui s'occupe de la collection Nouvelles Voix chez Pocket, par exemple, ne pourrait-elle pas faire un petit effort ??? Ou le milieu éditorial est définitivement un royaume inconnu pour moi, ok je sors.


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