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Rififi sur le Potomac

Publié le 12 mars 2009 par Toulouseweb
Rififi sur le PotomacLe Pentagone s’achemine vers des révisions déchirantes.
Voici venu le temps des rumeurs. Le nouveau locataire de la Maison Blanche fronce les sourcils, penché sur le budget du Pentagone, et se demande comment concilier la nécessité de coupes sombres et la relance de l’emploi. Il s’agit d’une forme nouvelle de quadrature du cercle.
Hors suppléments consacrés aux opérations extérieures, le département de la Défense sera doté de 530 milliards de dollars, en légčre hausse, pour l’exercice fiscal 2010 qui s’ouvre le 1er octobre prochain. Les délais étaient trop courts pour infléchir immédiatement le cours des événements mais Barack Obama et son secrétaire ŕ la Défense, Robert Gates, se préparent ŕ prendre des décisions importantes qui engageront l’avenir.
L’une d’elles, et non des moindres, intéresse l’Europe, l’achat d’un premier lot de 179 ravitailleurs en vol dans le cadre du programme KC-X, pour remplacer les vénérables KC-135 (notre illustration). Aprčs l’échec de l’année derničre, un nouvel appel d’offres sera bientôt adressé ŕ Boeing et Northrop Grumman …pour autant que le contrat ne soit pas reporté de plusieurs années. Une éventualité longuement évoquée dans la coulisse il y a quelques jours puis fermement démentie.
L’affrontement qui s’annonce est double. Il s’agira tout d’abord de comparer les mérites opérationnels de deux propositions pas tout ŕ fait équivalentes et, ensuite, męme s’il n’en est pas question officiellement, de prendre en considération les retombées économiques de cette commande de portée symbolique. Dans quelle mesure le patriotisme économique jouera-t-il en faveur de Boeing ? Northrop Grumman, partenaire du tandem EADS/Airbus, arrivera-t-il ŕ suffisamment américaniser l’A330-200 aux yeux de l’opinion publique ?
Robert Gates se dit opposé ŕ l’achat des deux types d’avions mais nombre de ses collčgues estiment que ce serait le seul moyen d’éviter un nouveau blocage du dossier. L’affaire s’annonce nerveuse.
Le Pentagone doit aussi trancher dans d’autres affaires délicates. Il s’agit tout d’abord de décider trčs vite d’arręter la production du F-22 Raptor ŕ 183 exemplaires ou, tout au contraire, de passer des commandes supplémentaires. Pour satisfaire l’U.S. Air Force, bien sűr, mais aussi pour préserver les 90.000 emplois qui sont liés ŕ ce programme. Les échanges de vues sont vifs et, point remarquable, une pétition cherche ŕ faire pression sur les décideurs (1). Le F-22 servirait ŕ lutter contre la récession, faute d’ennemi éventuel qui justifierait la mise en œuvre de ce systčme d’armes d’une rare complexité et dont le coűt unitaire est de 143 millions de dollars, trois fois autant en tenant compte de l’investissement initial en recherche et développement.
Il est aussi question d’un report ŕ des jours meilleurs du programme ultra-secret de nouveau bombardier stratégique. On entend dire que les premičres livraisons sont actuellement prévues pour 2018, des prototypes seraient peut-ętre déjŕ en chantier (c’est un Ťblack programť qui n’apparaît pas en tant que tel dans les budgets) et son coűt est probablement pharaonique.
L’essentiel, pourtant, est ailleurs. L’administration Obama, tout en cherchant par tous les moyens ŕ endiguer l’effondrement de l’économie américaine, entreprend la chasse aux gaspillages, lesquelles se chiffrent en dizaines, voire en centaines de milliards de dollars en raison de la dérive financičre de la plupart des grands programmes militaires.
Le débat qui s’amorce, on commence ŕ peine ŕ le comprendre, est susceptible de prendre des proportions exceptionnelles, voire historiques. L’analyste Philippe Grasset rappelle, ŕ ce propos, qu’un discours remarquable de Ronald Rumsfeld, secrétaire d’Etat ŕ la Défense de George W. Bush, a malheureusement été occulté par des circonstances dramatiques.
Le 10 septembre 2001, c’est-ŕ-dire quelques heures avant les attaques terroristes de New York et Washington, Rumsfeld avait avertit que la bureaucratie du Pentagone était Ťla pire menace qu’aient connue les Etats-Unis, une menace pire que l’Union soviétique elle-męmeť. L’effondrement des Twin Towers a bien entendu empęché tout écho ŕ ces propos, une simple reprise des inquiétudes exprimées 40 ans plus tôt par Dwight Eisenhower. Reste ŕ attendre le début de la saison 2 de cette formidable saga.
Pierre Sparaco - AeroMorning
(1) www.preserveraptorjobs.com

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