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Québec : La nation Abenaki

Publié le 30 mars 2009 par Kanawata

Avant l’arrivée de Jacques Cartier, les Abénakis occupaient un territoire immense, des côtes du Maine (u.s.a.) jusqu’à la vallée du fleuve saint Laurent. Il s’agissait d’une zone de transition entre les forêts boréales fréquentées par les chasseurs Algonquins et la région agricole des Algonquins du sud. Ce qui suppose que ses habitants présentaient un type de subsistance mixte (mi-chasseur, mi-agriculteur). Ces indiens formaient une sorte d’entrecroisement de population entre les Iroquois et les Algonquins de l’est. Parmi eux ont trouvait les Pennacook, les Passamaquody, les Penobscot, les Piguaket, les Taconic, les Noridwork.
C’est dans un contexte de guerres incessantes que ces différents peuples se déplaçaient vers le Nord où ils devinrent les alliés des français en échange de vivres et de protection de leurs familles. De 1670 à 1760, les Abénakis furent considérés par les Jésuites, tout au moins, comme " les anges gardiens des Français ". En effet, ils étaient les avants-postes de la Nouvelle France et subirent chaque fois le choc des troupes anglaises lancées à la conquête de ce nouveau territoire. Ils faisaient office de tampon, retardant les troupes pour que les Français puissent organiser une contre-attaque.
Durant ces guerres ils payèrent un lourd tribu. A la fin des guerres coloniales, plusieurs Abénakis retournèrent vivre aux Etats-Unis. D’autres s’installèrent définitivement à Odanak et à Bécancour. Ils prendront les armes de nouveau pour protéger le pays des Américains en 1812 et combattront avec les Patriotes lors des événements en 1837.
A l’époque des contacts avec les blancs, ils adoptèrent rapidement des comportements sociaux et religieux européens. Même s’ils vivaient près d’une chapelle catholique, ils n’en utilisaient pas moins des crânes d’animaux pour leurs incantations rituelles. Ils vivaient dans des wigwams, dont le matériau principal était l’écorce de bouleau. Le maïs constitue l’aliment de base. Deux à trois mois suffisaient à faire mûrir les plants. C’est aux femmes que revenaient les semailles, l’entretien et la récolte de cette précieuse céréale, elles cultivaient également des fèves. L’importance de l’agriculture varie selon les groupes. Les canibas de la kennebec cultivent beaucoup tandis que les Etchemins de la rivière Saint-Jean ne le font que sporadiquement.
D’une façon générale les Abénakis plus " nordiques " compenseront par la chasse et la pêche les lacunes de leur agriculture. C’est la tâche des hommes : avant que le maïs ne soit mur, ils doivent chasser durant l’hiver (orignal et castor) et pêcher durant la saison chaude. Au milieu de l’hiver on peut voir tout un village entier se disperser par groupes de chasse. En cette occasion les femmes soutiennent l’activité des chasseurs en apprêtant la viande et les peaux. Après une chasse ou une pêche fructueuse, la " tabagie " ( festin) est de rigueur, on y mange abondamment, faisant ainsi honneur au pourvoyeur. Cependant les Abénakis ne manquaient pas de faire des réserves. On moulait le maïs pour obtenir une farine facile à conserver en la faisant bouillir on obtenait la " sagamité ". Quant à la viande et au poisson, ils étaient fumés. Le menu se complète par la cueillette de fruits de mer ou d’œufs d’oiseaux sauvages.
Les Abénakis sont de vrais athlètes, forts et bien composés, de grande taille et coquets. Des couleurs rouge, bleu, noir teignent le visage tandis que les " matachias " (arêtes ou aiguillons de porc-épic) ou les " wampums " (coquillages taillés et polis) ornent les diverses parties du corps. Les tribus à l’Ouest de la kennebec portent des bracelets ou des ceintures de cuivre. Hommes et femmes portent des cheveux longs attachés derrière la tête. Pour vêtements les Abénakis se couvrent le bas du corps avec une peau d’animal passée entre les jambes et retenue des deux côtés par une ceinture. Une autre peau attachée par-dessus une épaule enveloppe le haut du corps. Pour affronter les durs hivers ils rajoutaient d’épaisses manches, pour chausses des " mekezin " (mocassin) et probablement une couverture de peau supplémentaire sur les épaules. Tous ces vêtements étaient confectionnés à partir de peaux d’orignaux ou de castors. Toutefois les tissus européens firent leur apparition dés le début du 17éme siècle.
Le wigwam était une maison d’écorce de bouleau tendue sur des perches formant un cône. Dix à douze personnes y prennent place. Ces wigwams s’avéraient parfaitement étanches : les Abénakis cousaient avec des racines de sapins les plaques d’écorces de bouleau pour les colmater ensuite avec de la gomme du même arbre. A l’intérieur des branches de sapins servaient de tapis et de siège en plus des peaux d’ours et d’orignaux. Une énorme marmite en bois trônait au milieu du wigwam. Son usage exigeait la plus grande patience : c’est en jetant des pierres brûlantes que les autochtones en réchauffaient le contenu. Aussi préfèrent-ils les chaudrons de cuivre européens, plus maniables et plus légers. Voilà comment petit à petit les Abénakis s’entrouvrirent sur le monde moderne...
Ils avaient des rapports constants avec les Malécites et les Micmacs et s’unissaient fréquemment à eux par mariage. Très tôt, ils firent le tissage de la laine, du lin à base de lisse et du tricot à la manière européenne. La vannerie de frêne et de foin d’odeur fait partie de leurs traditions, mais ils empruntèrent des Attikamekw l’art du travail de l’écorce de bouleau. Ils adoptèrent aussi la structure des paniers micmacs qui ne comportent pas d’ossature. La culture matérielle des Abénakis atteste l’existence des relations avec d’autres groupes amérindiens et les nombreux emprunts culturels sous-jacents. Cela témoigne dont les Abénakis ont su évoluer en acceptant les changements technologiques et sociaux jusqu’à ce jour. Cependant, la tradition orale a quand même réussi à transmettre une partie importante du patrimoine.
On raconte qu’un jour, un conseil eut lieu pour déterminer parmi tous les clans et les tribus présents lequel désormais désigneraient le groupe des Abénakis. On se rallia sous trois clans différents : l’Ours symbole de la force et du courage, la Tortue symbole de la sagesse et le castor symbole de l’effort. Chaque clan était présent dans toutes les communautés, celles-ci adoptèrent une signature unique. Les clans d’Odanak utilisaient l’Esturgeon comme signature et ceux de Wôlinak le Lynx.
C’est vers 1700 que les Abénakis se fixent définitivement à Odanak qui est aujourd’hui un village calme qui invite à la détente et à la découverte. Plusieurs maisons centenaires lui donnent un cachet particulier.
Les Abénakis connaissaient ce lieu avant de s’y établir. C’est un lieu de richesse où outardes et oies blanches font une halte lors des migrations. Perchaudes et dorés (sandres) y abondent et remontent l’Alsigontegok " la rivière aux grandes herbes " pour aller frayer. La terre y est riche et fertile. Une étude récente a démontré que la plus grande concentration d’herbes médicinales au Québec se trouve au lac Saint-Pierre à 16 km d’Odanak. La population est mixte, les Abénakis représentent 70% des résidents et nous pouvons de nos jours encore déterminer l’appartenance à l’un ou à l’autre clan. Quelques noms de famille nous rappellent le lien avec la tradition. M’Sadoques signifie "personne de la grande rivière", O’Bomsawin "personne qui entretient le feu".
Depuis 1960 la communauté accueille des visiteurs. C’est à Odanak que l’on trouve le premier musée autochtone. La vie culturelle est jalousement gardée. On y célèbre le temps des récoltes, la pêche sur la glace, ou l’arrivée des outardes. Mais la plus importante fête demeure le Pow wow qui se déroule la première fin de semaine de juillet à laquelle sont conviés tous les Abénakis des Etats-Unis et les autres autochtones du Nord et du sud. Les Abénakis riches de leur passé et fiers de leur présent, vous y invitent. Quant au musée vous pourrez découvrir de la vannerie, des objets archéologiques, des illustrations de la vie ancestrale, des fims-vidéos et des expositions. On vous souhaitera "KOLIPAIÔ " ( bienvenue). C’est un lieu de mémoire, un témoin vivant, sur les bords de la rivière Saint-François, dans un parc ornementé de totems et d’œuvres d’artistes Amérindiens, vous découvrirez un trésor de souvenirs émouvants ainsi que les légendes : " Au début alors qu’il n’y avait que les plantes et les animaux sur la terre le Grand Esprit aurait sculpté l’Abénaki et sa compagne dans le grand frêne droit ".
Ainsi serait né le peuple de l’Est. Cela expliquerait leur attachement pour cette essence particulière qui servait aussi à fabriquer des arcs solides qui gagnèrent rapidement la faveur des peuples voisins. Plusieurs artisans demeurent dans la communauté où ils puisent leur inspiration. Il y en a pour tous les goûts : le perlage sur métier ou sur cuir, la poterie et la vannerie. Depuis une douzaine d’années, un groupe de jeunes composé d’adolescents et de jeunes adultes répètent et perpétuent les chants et danses de leurs ancêtres, ils se produisent lors des cérémonies et des fêtes avec dynamisme et fierté. En 1997 ils ont entamé une tournée dans le sud-ouest de la France qui a eu un franc succès.
Les Abénakis sont devenus chétiens il y a 300 ans, condition essentielle de leur alliance avec les Français. Pour nous le rappeler il y a maintenant deux églises à Odanak, l’une anglicane, l’autre catholique. Le parvis de l’église catholique à la particularité de faire face à la rivière et non à la rue principale comme le veut la tradition québécoise : la première route des Abénakis étant la rivière. Malgré la présence de ces temples chétiens la spiritualité d’origine reprend une place de plus en plus significative. Les Abénakis sont de plus en plus nombreux à vivre en dehors de la réserve. Cependant le village demeure l’endroit où l’on vient se rapprocher de ses racines et où l’on revient se ressourcer, le lieu où on se sent " chez nous ".
Etablie officiellement depuis 1708 prés de la rivière Bécancour, la communauté de Wôlinak est située à une vingtaine de kilomètres de Trois-Rivières. Cette communauté Abénakise paisible se démarque par sa pourvoirie située en Haute-Mauricie. En toutes saisons ce domaine de 120 km2 et pourvu de 40 lacs met à votre disposition un pavillon principal de 4 chambres et 7 camps meublés ; les adeptes du plein air sous la conduite de guides confirmés Amérindiens pourront descendre les rivières, traverser les lacs, observer la faune (ours, castors, orignaux, chevreuils, loups, renards) et participer à la culture indienne vous faisant revivre le mode de vie ancestrale et ses traditions. Un magnifique belvédère construit par les autochtones vous mènera au cœur de la forêt québécoise ou chaque arbre a son histoire. Et lors de votre randonnée vous percevrez une plainte inconnue qui monte dans la forêt, c’est le culte des morts qui s’offrira à vous au détour d’un sentier.
Si vous souhaitez connaître les us et coutumes de cette Nation, un voyage est organisé cet été. Il s’adresse à un large public avide de découvertes et d’aventures aux risques nuls, sur les traces des coureurs des bois.

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