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Le premier jour de mes cinq derniers mois de congé parental

Par Theclelescinqt

Le premier jour de mes cinq derniers mois de congé parental

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Rentrée le jeudi 3 septembre 2009. Tous à l'école.

Vous pensez bien que toutes les démarches d'inscription pour Nina sont faites depuis longtemps, en mairie. Puis j'ai reçu un courrier à la maison me demandant d'appeler le 31 mars le directeur de l'école maternelle où va déjà Andréa, pour prendre rendez-vous et me rendre par la suite à une réunion collective avec le directeur en question et en compagnie de l'enfant.

Le 31 mars, 8h36, j'avais le directeur en ligne. Il me demande mes disponibilités.

Mais quand vous voulez! La nuit, le jour, à cinq heures du matin...?

Quand il a su que j'avais déjà un gamin en maternelle, il a été prêt à me dispenser de réunion. Il pensait que les puînés, en général, connaissaient déjà l'école. J'ai protesté avec énergie. Les choses devaient être faites dans les règles de l'art. Je suis tellement fière et folle de bonheur que tous mes gamins aillent enfin à l'école que je ne veux manquer aucune étape. Et il n'est pas question que ma Ninette fasse une petite mine, ne serait-ce que le jour de la rentrée. Si je pouvais déjà l'emmener moi-même en toute petite section chaque matin et rester avec elle, je le ferais.

J'essaie de le souffler à ce gentil directeur chaque fois que je passe devant depuis des mois, mais rien n'y fait :

"Ah, elle pleure! me dit-il.

- Oui, c'est qu'elle est tellement prête à aller à l'école! Elle aimerait tellement rester!

-Ah ben oui!...Bientôt!"

Et c'est tout. Il n'y a pas moyen. Il faut dire que Nina est du 30 août. On ne peut guère avoir trois ans mieux à propos, à part le jour de la rentrée, peut-être. Enfin depuis le mois dernier elle a droit à deux jours de garderie par semaine, c'est déjà ça. Si j'avais eu droit à une structure collective tous les jours pour elle, et à tarif abordable, du moins jusqu'à ce que je décroche un job, je l'y aurais mise sans aucune hésitation.

Mais embaucher une assistante maternelle, un mode de garde qui ne me convient pas, la payer 900 euros pour chercher un travail, sans recevoir d'aides parce que justement, je n'en aurais pas encore, de travail, je n'ai pas pu. Il faut être pragmatique dans la vie. Au Relais assistantes maternelles, où je ne remettrai plus les pieds à moins qu'il fasse moins quinze le mois prochain à Verte-Ville, car la dernière fois j'ai cru crever d'ennui, mes copines et moi avons virtuellement "choisi" deux ass'mat auxquelles nous confierions nos mouflets d'un coeur à peu près tranquille. Ce n'est pas une question d'affinités : ça crève les yeux, c'est tout. Par exemple je n'ai pas beaucoup d'affinités avec ma belle-mère, mais je vois bien qu'elle aime ses petits-enfants et que ceux-ci l'adorent, qu'elle s'en occupe, qu'elle leur prépare des petits plats, qu'elle met des activités en place, que chez elle tout est propre parce que c'est une obsédée ménagère mais ce n'est pas mon problème. Donc je suis bien contente de les lui confier, ça me fait des vacances et tout le monde est content.

J'ai moins confiance dans mes parents. Mon père je lui ai dit non, jamais de la vie, si tes maisons et tes relations avec autrui  ont été un taudis tout au long de ta vie, ce n'est pas pour que mes gosses vérifient si c'est encore le cas tous seuls en live! Ma mère, c'est d'accord, mais accompagnée de son ami qui est une bonne pâte d'homme, gentil, prévenant et plein d'idées pour occuper les enfants. Et surtout, qui m'empêche de penser sans cesse à ce qui se passerait si ma mère se retrouvait toute seule coincée dans les toilettes, les gamins dehors. Car ça lui est arrivé une fois.

Mais les ass'mat, ça n'a jamais été une solution envisageable pour moi. Certaines sont très sympas, d'accord, et certainement fiables, mais il faut les connaître, en avoir entendu parler, et puis elles sont prises d'assaut, et puis elles ont leurs conditions; ce que je ne critique pas, c'est leur travail. Mais ça n'a rien à voir avec le mode de garde que j'appelle de mes voeux, c'est à dire un vrai service collectif de qualité, non pas gratuit mais abordable, aussi règlementé que les crèches et les maternelles. La différence serait que tout le monde pourrait y aller, et pas seulement les 1% de chanceux et les 2% de pistonnés.

Bon, c'est vrai que question ass'mat, ma propre expérience m'a bien desservie, au contraire de mes parents qui, première génération de leur branche depuis des millénaires à travailler à l'extérieur tous les deux et confier leurs enfants dès le berceau, ne se sont jamais posé de question. Pour eux il était bien évident que la première Madame Groseille venue, habitant à côté, ferait très bien l'affaire. Et puis, il fallait bien travailler, non? Alors pas le choix. Et puis, pas de problème.

Moi j'ai eu le choix. Aidée par un mari au revenu suffisant et d'une aide de l'Etat, je me suis empressée de refermer cette brèche dans l'espace temps et de remettre ma lignée en marche correctement. Car, si les perles existent sur le marché, si des dames très bien, gentilles et intelligentes, s'occupent des enfants qui leur sont confiés de manière dévouée et professionnelle, il est extrêmement fréquent de tomber sur du grand n'importe quoi. Je les vois bien, je fréquente les PMI, les RAM et les parcs publics depuis dix ans. A Neuilly-sur-Seine, pas d'assistantes maternelles, ou peut-être moins d'une dizaine dans la ville -parce qu'une assistante maternelle reçoit les enfants chez elle et qu'elles sont rares à pouvoir habiter à Neuilly. Les femmes sans emploi habitant Neuilly s'achètent des manteaux de fourrure, pas des poussettes doubles pour garder les enfants des autres -. C'est la mafia des nounous, qui viennent en transports collectifs de partout pour garder les gosses à domicile. Les mères, souvent à l'emploi à responsabilité et aux revenus conséquents, n'ont pas pour autant le choix d'embaucher une perle. Elles prennent qui elles trouvent, en faisant confiance comme on fait un triple salto en espérant qu'il y aura assez d'eau dans la piscine. Je les voyais chaque jour, ces nounous, et je continue à les voir à Verte-Ville,  à la différence que je vois aussi ici des ass'mat, car la ville est plus mélangée socialement. Il y a notamment plus de HLM, à la différence de Neuilly qui a toujours préféré payer des amendes plutôt que de permettre aux gens aux revenus ordinaires de vivre dans la limite légale pour la ville de 20% de logements sociaux.

Et ça papote sans jeter un oeil aux gosses, priés de s'occuper tous seuls avant de savoir marcher, ça laisse en choeur les détritus du goûter derrière soi, ça laisse les gamins engoncés dans des parkas et avec bonnet, par de belles journées de printemps, et de manière générale ça s'en fout.

Pas toutes, bien sûr, pas toutes. Mais alors que vous verrez rarement un tout-petit amené au parc par un parent se balader une demi-heure avec sa morve, c'est une chose tout à fait courante au milieu d'un gang de nounous. J'entends souvent des nounous parler durement aux gamins dont elles ont la charge, vraiment durement, du genre, si la gamine veut qu'on la pousse sur la balançoire : "Nan! Tu t'démerdes."

Hier au square, j'ai tancé moi-même un gamin qui s'amusait à aller chercher des mottes de terre pour les flanquer sur le toboggan. Sa nounou était à côté -il y avait un monde fou- mais elle ne disait rien.

Ca va être gai, la société, quand tout le monde aura été élevé comme ça, tout-petit par des nounous qui s'en fichent, les parents dix minutes par jour, l'école publique où les profs ne font pas de "politesse", puis après le chacun pour soi des collèges, lycées et tutti quanti.

Mercredi je recevais deux gamins de CM2 qu'avait invité Eudes, pour passer un moment à la maison. Comme il se fait traiter d'"enculé d'intello" par ses pairs de CE2, ses copains ont à présent, donc, deux ans de plus que lui. Je m'attendais donc à des mômes les pieds bien ancrés sur terre.

Que nenni! A l'heure dite, ils se sont chacun engouffé dans l'appartement sans même me saluer, j'ai dû exiger un "merci" à la remise d'une belle assiette de goûter et insister quatre fois pour qu'ils répondent quand je leur parlais.

Dès le départ je me suis tournée vers mon fils : "Il est hors de question que dans deux ans tu sois comme ça. Tes copains ne sont pas méchants mais très mal élevés."

Il en a convenu. Un manque de politesse, c'est la mort! Où vont-ils être invités s'ils se comportent comme des sagoins?

La réunion avec le directeur au sujet de la première rentrée de Nina a eu lieu ce matin. Nous avons visité des locaux remarquablement propres, neufs et spacieux. Comme j'étais le seul parent à avoir un gamin déjà scolarisé dans ces locaux, j'ai fait ma maligne, soulignant le fait qu'avec un centre de loisir adjacent à la maternelle, ouvert jusqu'à 19 heures, nous bénéficions d'un des meilleurs services de France.

Une mère s'est un peu agacée des contraintes qui lui étaient imposées : l'enfant doit être propre en journée, par exemple, ce qui est partout obligatoire. Facile, grâce aux grandes vacances précédentes? Oui, mais si on n'a pas de vacances? Je suis d'accord avec le directeur mais ces règles me font rire, car toutes l'administration n'a pas encore pigé que nous n'étions plus dans les années 70. Pour eux, les parents ont tous un emploi, en CDI, ne peuvent être en intérim ou en période d'essai, peuvent prendre des congés illimités et à la demande, bref "dans l'intérêt de votre enfant" la rentrée serait reportée pour lui si l'enfant n'était pas propre (et vous vous démerdez pour le garder, même s'il n'est plus inscrit nulle part et que vous avez donné congé à sa nounou) Donc opération commando propreté, d'accord, plus adaptation progressive de l'enfant, à raison de la présence d'un parent les deux ou trois premiers jours, puis école seulement le matin durant une quinzaine de jours.

La petite maman allait faire une crise d'apoplexie. En tout cas, moi, à ce rythme, ce n'est pas début septembre que je vais pouvoir me mettre vraiment en quête d'un emploi. Mais bon, me connaissant je n'aurai pas de scrupule existentiel à la coller d'emblée en douce à la cantine et au centre de loisirs jusqu'à 19 heures.

Mais non je plaisante! Comme si je savais comment j'allais me démerder en septembre! Ils sont drôles, eux, ils sont fonctionnaires, savent très bien ce qu'ils vont faire dans six ans, sont prioritaires pour les crèches et ne se posent pas la question de la propreté pour leur propre progéniture, attendu qu'ils ont plus de deux mois d'été pour y remédier.

Quant à moi, dans l'intérêt de mon enfant, je vais donc profiter de mon congé parental au maximum, et, début octobre, alors que les 500 euros de congé parental d'éducation me seront à juste titre retirés, puisque ma gamine aura eu trois ans (mais que la Caf verse l'allocation un mois de plus, puisqu'elle a tardé un mois a la verser, si je ne m'abuse, donc ça me mène à début octobre), plouf! je saute dans le premier job venu entre l'école et mon domicile, afin d'avoir enfin la joie de gagner ma vie. Parce que jusqu'à présent je gagnais surtout la vie des autres, si on regarde bien. Enfin, la retraite des autres.

Ah, j'ai hâte d'aller bientôt enfin me reposer au bureau! Pouvoir taper sur un clavier sans être dérangée sans cesse! Laisser la maison à vau-l'eau! Avoir le plaisir de rentrer le soir face à cinq lits défaits, les lessives à faire tourner, le dîner à préparer!

Mais comme me dit ma copine Rosanna :

"Parce que tu crois que ton boulot de parent est presque fini ?! Mais t'en as encore pour 20 ans ma pauvre!

- Heeeiiiin, mais t'es folle? Que racontes-tu? "

C'est pourtant vrai nom-de-d'là. Mais je vais quand même avoir mes journées, enfin! Et peut-être une liberté d'aller et venir pendant une quinzaine de jours (le temps que je sois admise dans le premier merveilleux emploi venu, genre assistante ou standardiste. J'ai hâte.)

Dans cinq mois.

Happy Girls I


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