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Gulmit à la frontière Pakistan-Chine

Publié le 08 avril 2009 par Argoul

La route pour Gulmit, pays des glaciers, est goudronnée, mais nécessite la jeep. Elle longe de hautes falaises ou des pentes qui, parfois, s’éboulent sur la chaussée, occasionnant un arrêt prolongé en attendant que les bulldozers les dégagent. Le mont Rakaposhi, du haut de ses 7788 mètres, illumine le paysage comme un phare ; les locaux l’appellent le « mur brillant ». Passent des camions beaux comme des afghans.

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Un arrêt au débouché d’un torrent nous permet une vue imprenable sur le Rakaposhi, son sommet et ses glaciers. Un hôtel s’est installé là avec sa boutique de souvenirs et son bar. Nous y consommons un Coca devant l’immensité d’un blanc éclatant des glaces éternelles. Le glacier nous renvoie un reste de sa fraîcheur par bouffées, quand le torrent tumultueux qui chute sous nos pas diffuse un peu de ses embruns.

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Des touristes pakistanais se sont installés à une table, croquant des raisins en grappes. Deux familles sont réunies. Ce qui est remarquable est que les femmes et les enfants de l’une des familles sont habillés à l’occidentale - robes pour les filles, chemise et pantalon pour les garçons - tandis que l’autre famille est vêtue à la manière traditionnelle, robe large et foulard pour les femmes, shalwar kamiz pour les gars (pantalon bouffant et tunique échancrée). La table des hommes adultes est ailleurs car ne sont avec les femmes que des adolescents dont les deux plus âgés avaient à peine 15 ans. Tout ce petit monde se mêle. Un adolescent en kamiz grège lui donnant un air de capucin, au duvet à peine fleuri sur la lèvre, tient par la main un petit cousin en chemise blanche et pantalon noir. L’air sérieux du petit m’a séduit et je l’ai pris en photo. Il s’est tortillé sur sa chaise sans me quitter du regard, toujours impassible. Le grand ne tenait pas en place et s’est bientôt éclipsé pour aller avec les hommes. Il a joué au badaud dans une discussion animée sur la route, entre deux chauffeurs qui s’étaient accrochés.

Notre Coca fini, nous avons repris les jeeps avec, selon les détours de la route, différentes vues sur les massifs enneigés et les arêtes des pics remarquables qui culminent à 6000 ou 7000 mètres. Je me souviens seulement des noms du glacier de Minapine, du sommet de Dobani, du Ladyfinger Peak et du Golden Peak. Le soleil ne tarde pas à disparaître complètement derrière les pics et il se met à faire froid. Nous enlevons les lunettes solaires et enfilons des vestes. Sur le bord de la route, on peut noter que les gamins sont habillés plus à l’occidentale qu’ailleurs, moins de kamiz et plus de tee-shirts et de chemisettes, moins de shalwar et plus de shorts ou de pantalons. Certains vont même torse nu, ce que nous avions peu vu, hors les baignades dans la plaine. Dans cette région de Hunza, où passe la très fréquentée Karakorum Highway, les mœurs sont plus modernes que vers la frontière afghane. La religion y est aussi probablement moins intégriste.

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Nous arrivons au Village Hotel de Gulmit alors que tombe le crépuscule. En prenant le chemin qui y mène, les jeeps dérangent une partie de volley-ball acharnée des jeunes du village sur la place. Nous sommes accueillis dans la guest house par des pommes du jardin, du thé, et même de la bière ! C’est une bière chinoise très légère, achetée hors frontière, à 25 km d’ici. Elle nous fait plus plaisir que le haschich que prépare Taj au même moment. Bien sûr, transport et risques obligent, la bière est chère : 150 roupies, dix fois plus chère que le Coca produit au Pakistan. La vue sur les sommets lointains est belle et le jardin frais, bien ombragé d’arbres. Non qu’il fasse chaud, à cette heure, mais tant de végétation est reposante après les aridités de la route et de ses abords. Les chambres sont spartiates, comme les sanitaires extérieurs, communs à plusieurs, mais tout est propre et agréable comme dans les gîtes ruraux des Alpes. Nous sommes quand même remontés à 2567 mètres.

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Nous prenons le buffet du soir sous les pommiers. Gulmit est un mot turcophone qui signifie vallée des fleurs. Tout y pousse tant l’eau et le soleil sont vifs. Le dîner-buffet est moins varié que celui de Gilgit, mais de bonne facture. C’est notre hôtesse elle-même qui a fait la cuisine, aidé par deux jeunes. La soupe de vrais légumes nous change des sachets dilués. Le mouton-tomate nous change du poulet. Les pommes de terre cuites, puis grillées sont très bonnes, farineuses et avec du goût. Le « vin » de production locale a moins de succès. Au premier abord, comme on me le fait goûter, je lui trouve une saveur de vinaigre dilué dans l’eau. C’est un vin de l’année, acide, vert, aux quelques arrières goûts de framboise et de citron vert. Rien qui nécessite d’en boire, sinon pour agacer les dents. Ceux qui, par pur esprit de contradiction intello, ont dit aussitôt : « ah ! mais il n’est pas si mauvais que cela, il est même bon ! », se gardent bien d’en reprendre - tout compte fait. C’est marrant les profs, faut toujours que ça se pose en contradicteur métaphysique avant même de tester en pratique (lol).


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