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Henri Matcharariani relate son parcours

Publié le 09 avril 2009 par Orsérie - Le Journal Du Beau & Du Bien-Etre

  Henri Matcharariani relate son parcours  Un artiste dont les expositions passées sont encore dans nos esprits et des projets que nous allons découvrir. En quelques mots, comme il dessine un visage en « un coup de crayon », Henri Matcharariani relate son parcours : dessins de mode, réalisme, couleurs...de la photo à la peinture...et à l’illustration. 

Place à l’influence japonaise.

« Mémoires de soie » est une expositiondatant de 2003. Un hommage au Japon et au kimono.

J’ai toujours admiré Hokusai et les maitres de l’estampe japonaise. Il faut retenir la force et la souplesse du pinceau, l’écriture indissociable de la peinture, l’articulation du vide et du plein. Chaque mouvement est unique.

Hokusai. Voilà un immense artiste qui a écrit ceci :

« Tout ce que j’ai produit avant l’âge de soixante ans ne vaut pas la peine d’être compté. C’est à l’âge de soixante treize ans que j’ai compris à peu près la structure de la nature vraie, des animaux, des herbes, des arbres, des oiseaux, des poissons et des insectes. Par conséquent à l’âge de quatre vingt-dix ans je pénètrerai le mystère des choses ; à cent ans je serai décidément parvenu à un degré de merveille, et quand j’aurai cent dix ans, chez moi, soit un point une ligne, tout sera vivant. » Le point et le trait d’Hokusai sont devenus pour moi la référence absolue.

Nous sommes là face à l’infini. Je fais donc référence aux kimonos pour lesquels j’ai un intérêt particulier. Un kimono est un vêtement précieux et intime qui raconte beaucoup de choses.

Modigliani m’a considérablement influencé. Les yeux clos, sans prunelles, le regard est plein de mystère et d’infini. 

J’aime cette phrase qui définit souvent le travail que je fais : « Juste quelques traits... » Intitulé de ma dernière exposition comme de plusieurs autres ».

Et votre rencontre avec l’art, le dessin, la photo... ?

Lorsque j’étais adolescent j’avais un besoin irrépressible de dessiner.

A l’époque, je dessinais beaucoup et travaillait le temps des vacances chez Monsieur Valbert dans une ferme perdue sur le plus haut plateau du Jura. Je gardais ses vaches et dans mes moments perdus je dessinais ces vaches dans l’étable et puis la nature tout autour. Dessiner m’a tellement plu que j’ai décidé d’en faire ma profession. J’ai passé un examen dans une école d’art où j’ai été reçu et c’est comme ça que tout a commencé.

Vos influences, références ?un artiste préféré ?

Modigliani, j’aime les visages longs car cela me fait penser à des icônes. Comme je suis orthodoxe, j’y suis très sensible.

Le Japon, cela est venu à 20 ans. Le film « Harakiri » du réalisateur Shinoyana m’a beaucoup inspiré.

Attiré par ce monde, j’ai effectué cent fois le voyage dans ma tête. Ne m’étant jamais rendu au Japon, j’ai recréé un Japon imaginaire, le mien, fait de réalité et de fantaisie. Je m’inspire aussi de sa calligraphie. Je tends à l’envol du trait, à la légèreté, à l’espace, au vide et au plein.

Christian Dotremont, l’un des créateurs du groupe Cobra (Copenhague, Bruxelles Amsterdam) avait une très belle définition de l’esprit de ce groupe « Peindre l’écriture et écrire la peinture ». Devise que je me suis appropriée sans peine.

Ayant choisi le trait pour m’exprimer, j’écris la peinture.

Qu’elles sont vos directions ?avez-vous plusieurs projets ?

Oui, en ce moment j’ai plusieurs projets. Lorsque j’étais illustrateur, je travaillais sur commande, à la demande. Ce qui me permettait de passer d’un sujet à l’autre facilement.

Puis j’ai eu un choc violent dans ma vie en 1999, j’ai arrêté le dessin. Ici ou là, la vie nous contraint, nous oppresse, nous écrase parfois. En général, je réagis en exprimant le contraire. Je peins des fleurs, des femmes, des courbes, des hanches, des seins, la rondeur de la vie. Je peins des choses qui ne correspondent pas à ce que je vis. Je n’aime pas la tristesse.

Fernando Pessoa, le grand poète portugais est l’exception qui confirme la règle. J’aime ce vers de lui exceptionnel :

« je ne sais quel est ce sentiment encore inexprimé qui, soudain comme un étouffement m’étreint ».

En partant de là, j’ai envie de dessiner Pessoa parce que ce vers m’a bouleversé.Mon atelier est rempli de dessins, de croquis, d’affiches


(Monsieur Henri, avant de partir, regarde son atelier et me dit : « Il faut absolument faire le vide pour pouvoir faire le plein. Il faudrait que je me débarrasse de tous mes dessins pour retrouver la pureté absolue, la simplicité de ce qui vient ».)

La photo est aussi l’une de mes passions également. Je faisais du nu, des portraits, du noir et blanc exclusivement. En peinture et en dessin, je suis passé des femmes nues aux fruits et je peins les femmes comme je peins les fleurs et les fruits et réciproquement. D’ailleurs l’une de mes expositions avait pour titre : « Femmes fleurs, femmes fruits, Courbes et Parfums ». C’est tout dire.

Une rencontre marquante ? Un parcours atypique ?

Tout d’abord ma découverte du film « Les enfants du paradis  » de Marcel Carné. C’était fabuleux, du décor aux acteurs. Un choc. Puis je suis allé voir le spectacle du mime Marceau à Paris. Puis encore un choc déterminant, la rencontre d’avec Félix Leclerc qui par la suite devint un ami. Au cours d’un spectacle, une de ses chansons était mimée par un mime canadien, Claude Saint Denis. Celui-ci me mit sur la voie de Monsieur Etienne Decroux, grand maître du mime qui fut le prof de Marcel Marceau et de JL Barrault entre autres. Je me suis engagé à suivre ses cours pendant près de trois ans. J’y ai découvert le mouvement et l’espace et mon corps dans cet espace.

Faire un dessin nécessite une participation physique. J’ai donc introduit le mime dans mes dessins. Donc je crée quelque chose qui « n’est » pas. Je « donne » à voir ce qui n’est pas.

Dans mes dessins, femmes, fleurs et fruits sont plein de sensualité. Regardons l’image de cette femme entourée de fruits. La bouche immensément rouge en forme de fruit est un appel au baiser, non ?

Exposition : « Juste quelques traits... » (2009).

Et avant de devenir illustrateur que faisiez-vous ?

J’ai commencé ma carrière en étant Directeur Artistique pour de grandes agences de publicités :

Havas, NCK, Mc Cann, Publicis. J’y ai réalisé de grandes campagnes de pub et ai fait tourner de nombreux films publicitaires avec Jean Becker, Jean Jacques Annaud, Claude Miller et bien d’autres. J’ai même obtenu deux prix importants pour deux de ces films : un Lion d’Argent à Cannes et un Clio d’Or à New York.

Plus tard, comme j’avais fait le tour de la question et que beaucoup de monde me demandait des dessins, j’ai choisi de devenir illustrateur et peintre.

Allain François, qui était un des meilleurs agents d’artistes de l’époque, m’a pris dès lors dans son équipe et tout est parti comme une flèche. Air France, campagne de presse et affiches, France soir, Salon du Prêt-à-porter, des magazines de mode, Fiat, le Salon International de l’automobile de Turin, Montedison-Italie, automobiles BMW-Hollande, Woolmark, l’Oréal, Marie Claire Italie, les décors et les costumes d’Opéra, le magazine Joyce, Melsa au Japon...

J’ai ainsi enchainé le travail, toujours dans la finesse, un trait fluide et direct qui était ma marque.

Vous êtes installé dans cet atelier depuis un certain temps. Avez-vous eu des collaborateurs ? Un souvenir inoubliable ? Une de vos dernières expositions ?

Il y a quelque temps, j’ai travaillé à une œuvre commune avec une grande calligraphe, Bénédicte Gerin. Mais, malheureusement, l’expérience ne s’est pas poursuivie.

La rencontre d’avec le mime Marceau est un de mes plus beaux souvenirs. J’ai pu

Comprendre l’espace et le corps dans l’espace. Cela m’a considérablement servi pour mon travail.

J’aime les corps qui bougent, qui évoluent. Je suis très sensible au corps et la voix. Le silence a autant d’importance que les mots. Les espaces dans mes dessins sont des pauses. Un espace vide de traits est comme un silence. Cela à son importance. Il y a ce qui est donné à voir il y a ce qui est laissé à imaginer. Vide et trait, parole et silence, tout cela est très proche. Un espace est comme une respiration.

Il faut rentrer dans l’histoire.

Dernière exposition en date  :

« Juste quelques traits... », Parsons School Paris, 2009.

Les œuvres présentées là ont été réalisées pour de grands magazines de mode, des campagnes d’affiches publicitaires et des expositions.

Tags : Art  


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