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Critique de “Veckatimest” (2009) de Grizzly Bear

Publié le 19 avril 2009 par Eddie

Veckatimest (2009)Veckatimest

par Grizzly Bear

Album 5 étoiles

Année : 2009
Label : Warp
Stéréotypes : Folk, Rock, Expérimental
Liens : Site - MySpace - Spotify - Deezer
J’dois vous avouer un truc : j’ai jamais été super fan de la musique de Grizzly Bear. J’trouvais ça plutôt emmerdant, même si j’aimais bien la voix de Ed Droste. Je crois que si je n’avais pas commencé ce blog, que si je ne m’étais pas plus investie dans la découverte musicale qu’avant, je crois… je crois que je n’aurais pas non plus aimé Veckatimest. C’est une intime conviction que je ne saurais trop expliquer : mes cages à miel sont sans doute plus entraînées, plus aptes à distinguer toutes les subtilités… Ou alors je me suis fait retourner le cerveau par ces ânes de Pitchfork et consorts qui n’arrêtent pas d’encenser “leur” scène indé folk-rock. Ou alors je n’avais jamais vraiment pris le temps d’apprécier. Ou tout simplement parce que je ne me suis jamais enfilé plus d’albums de folk que ces 10 derniers mois, et quand quelque chose d’hors du commun se présente, je le repère plus facilement. Allez savoir. En tout cas ce Veckatimest n’a pas eu de mal à me convaincre, même si ce fut très progressif.

J’ai eu récemment une conversation avec mon frère sur la série Les Sopranos. Je n’ai jamais regardé, mais il m’expliquait que chaque épisode de la série était conçu comme un film à part entière, et qu’il était difficile de se faire 3 épisodes à la suite. J’sais si vous êtes comme lui et moi, mais je ne sais pas regarder 2 films d’affilée comme d’autres. Après un film j’aime bien me le repasser dans ma tête, essayer de comprendre un peu mieux ce qui vient de se dérouler devant mes yeux, trouver des choses à dire quand on me demandera “De quoi ça parle ?” ou “Est-ce que c’est bien ?”. Avec la plupart des chansons de ce disque, j’ai ressenti à de nombreuses occasions le besoin de m’arrêter deux minutes, de la repasser, de la repasser encore et encore pour me donner l’occasion de tout saisir, de ne rien manquer.

Prenez “Southern Point”, celle qui ouvre le disque. Cette chanson est incroyable : elle dure 5 minutes à peine, mais arrivée à la fin j’avais l’impression d’avoir fini un véritable voyage. Vous savez, cette nostalgie qui vous prend quand vous repensez à tout ce que vous venez de vivre, en ayant l’impression de ne pas avoir assez profité de chaque instant. La plupart des chansons de Veckatimest sont tellement RICHES que c’en est parfois assez renversant.

Et pourtant c’est toujours du folk-rock. Mais amené à un niveau d’excellence et de créativité que ça me fait mal de l’enfermer dans ce terme. C’est baroque, psychédélique, carrément pop de temps à autres, avec des climax comme disent les anglophones, ces moments assez dingues comme… comme… bon sang j’ai plein de métaphores qui me viennent à l’esprit là ! Vous avez déjà pris l’avion ? Vous savez ce moment où l’avion passe au-dessus des nuages et soudain tout s’éclaire et vous vous prenez le ciel bleu et le soleil de plein fouet ? “Southern Point”, “Two Weeks”, “All We Ask”, “Ready, Able” et même “White You Wait for the Others” arriveront sans doute à vous faire ressentir ce genre de choses. Si vous laissez ces chansons s’ébattre tranquillement dans vos têtes, vous pourrez apprécier le talent de ces types.

La plupart d’entre vous êtes étrangers à tout sorte de hype, et grand bien vous en fasse. Car il est difficile de se lancer dans la découverte d’un disque sans avoir dans un coin de sa tête tout ce qu’on a lu sur celui-ci. C’est ce qui m’emmerde le plus en tant que chroniqueuse de disque : en voulant se tenir au courant de tout ce qui se passe, vous tombez forcément sur des avis, des opinions de toutes sortes, et ce avant même de vous être fait le vôtre. D’une manière ou d’une autre, tout ça vous influence ensuite.

Après une bonne vingtaine d’écoutes, dans des conditions différentes à chaque fois, Veckatimest a toujours réussi à m’impressionner. Certaines chansons ont moins d’ampleur que d’autres, sont moins évidentes, immédiates. “About Face” et “Hold Still” sont beaucoup trop molles à mon goût, et je trouve “Dory” assez horrible, surtout la deuxième moitié de la chanson. Je les ai vite zappées car elles me rappellent pourquoi je n’étais pas fan de Grizzly Bear auparavant. Le groupe de Brooklyn est souvent considéré comme un groupe de musique expérimentale, et comme pour toute expérience, il y a parfois des petits ratés. Mais quand Grizzly Bear touche juste, ce qui est le cas sur la majorité du disque, quand tous les rouages de leur folk-rock baroque s’enclenchent sans accroc, quand les cordes, le synthé, les choeurs sont en parfaite harmonie, croyez-moi, ça monte très haut sur l’échelle de la magnificence. C’est coloré, raffiné, sans être non plus le truc super prétentieux, se refusant à tout ce qui se rapproche de près ou de loin à de la pop. C’est surtout à des lumières d’être un “concept album”, malgré l’étiquette “expérimental” que je m’accorde à leur attribuer.

Ce disque ne vous explose pas au visage à la première écoute. Au début je l’ai trouvé plutôt plat et j’ai vraiment pas compris pourquoi on les présente comme des génies. J’irais pas jusqu’à l’admiration béate, mais je suis persuadée que j’écouterai encore ce disque dans 20 ans, malgré les quelques pistes moins magnifiques que les autres. Tout simplement parce que Grizzly Bear est au-dessus du lot et impossible à comparer avec aucun autre groupe, de cette décennie ou des précédentes. Et j’peux vous dire que ça, c’est pas donné à tout le monde.

PS : Merde, moi qui espérait passer au travers du débat Merriweather Post Pavilion vs Veckatimest pour le titre de meilleur album de l’année, je suis en plein dedans… Que quelqu’un sorte une méga-tuerie svp !

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