Magazine France

Le verre d'eau des tempêtes

Publié le 21 avril 2009 par Omelette Seizeoeufs

En effet, le psychodrame, ou le double psychodrame, qui entoure les "excuses" offertes par Ségolène Royal, servira de cas d'école dans l'étude de la structure médiatico-politique d'une Ve République agonisante. On suppose que ce seront des chercheurs étrangers qui se pencheront sur l'affaire, les éventuels chercheurs français seront bien entendu trop occupés à des projets à rentabilité immédiate pour y perdre leur temps.

L'une des conclusions auxquelles ces chercheurs ne manqueront pas d'arriver, c'est qu'aucune information politique ne saurait exister si elle ne peut pas s'insérer dans le récit fondamental qui est le roman des personnages politiques.

Richard Trois l'explique très bien:

Mais personne ne pose cette question pourtant essentielle :
Si Ségolène Royal n'avait pas écrit ces quelques lignes d'excuses à José L. Zapatero, les français dans leur grande majorité auraient-ils entendu parler du tollé soulevé en Espagne par cette phrase, qui aurait été prononcée par M.Sarkozy, selon Libération, sur M. Zapatero qui "n'est peut-être pas très intelligent" ?
Les Français d'en bas, ceux qui ne suivent pas au quotidien les faits et gestes de Nicolas Sarkozy, auraient-ils su avec quelle condescendance et quel mépris Nicolas Sarkozy a traité Barack Obama devant les députés issus de la representation nationale reçus à l'Elysée ?
Les auraient-on informé de ces costards XXL taillés par la presse internationale tout spécialement pour Nicolas Sarkozy et son comportement à l'égard de ses homologues ?

L'image désastreuse de Lui-Même que notre Très Grand Homme (TGH) donne à l'étranger ne devient une « information » que si elle entre dans la narration déjà rôdée de la campagne de 2007. Vous vous souvenez du test dans Elle : « Êtes-vous Sarko ou Ségo? ». Nous en sommes encore là, malheureusement. Aujourd'hui il n'y a pas d'autre schéma pour expliquer la politique.

Bien sûr, Ségolène Royal n'est pas toujours dans le coup. Excellent exemple d'un coup 100% médiatique : Nicolas Sarkozy est battu à plates coutures par Chirac dans un sondage Paris Match (votre source pour tout ce qui est sérieux en politique : nous attendons impatiemment leur dossier sur les nouveaux emplois précaires ou l'avenir du syndicalisme.) Juan

Un autre baromètre, de Paris Match cette fois-ci, place le président loin derrière Jacques Chirac en termes de popularité. Seul motif de satisfaction, il devance Ségolène Royal. Un sociologue, président de Mediascopie, explique que Nicolas Sarkozy est devenu "inaudible".

Oui, Sarkozy est ridicule, inaubile. Oui, on lui préfère Chirac. Si ce n'est pas Zidane, Laure Manaudou ou l'Abbé Pierre. Mais cela ne donne rien : en désapprouvant Sarkozy, on tombe dans la nostalgie de Chirac, justement un choix non-politique. Avec Chirac, comme dirait Jean d'Ormesson, "c'était bien". Quoi exactement ? Rien, en fait. Chirac, maître du dos rond et de l'hypocrisie politique, est simplement plus sympa que son successeur. C'est trop génial pour nous.

Le gauchiste en nous, notre sur-moi trotskyste (dût-il exister) dirait aussitôt : il faut dénoncer la personnalisation de la vie politique, donc Ségo et Sarko, même combat. Ce qui me fait revenir à l'un des principes fondamentaux que j'affirme depuis le début de ce blog, l'efficacité. Non pas celle de ces socialistes "libéraux" qui veulent produire avant de distribuer, et qui, à force de couper les poires en deux, en quatre et en huit, finissent avec une sorte de compote de droite mais allégée en sucres. Trotsky lui-même était, dans ses jeunes années surtout quand il a livré à Lénine l'Armée Rouge, quelqu'un d'assez efficace, et ce n'est pas sûr qu'aujourd'hui son premier réflexe serait de s'embarasser de principes sur ce que doit être une parole de gauche.

Aujourd'hui, maintenant, le monde est télévisuelle, la République est Cinquième, et il va falloir s'y faire. Une seule personne à gauche est capable, par un simple discours plein de bon sens, de semer l'hystérie dans le camp de droite, de faire sortir de ses gonds la garde rapprochée sarkozyste. J'ai donc du mal à comprendre ceux qui crachent dans la soupe. Il y a si peu de soupe.


Retour à La Une de Logo Paperblog