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Les filles

Par Anne Onyme

fillesLori Lansens
Éditions Alto
577 pages

Résumé:

Nées au plus fort d’une tempête dans le sud de l’Ontario en 1974, Rose et Ruby Darlen mènent une vie à la fois exceptionnelle et tout ce qu’il y a de plus ordinaire, entourées de leurs parents adoptifs, oncle Stash et tante Lovey. L’une aime la télé, l’autre le baseball; l’une se passionne pour les artefacts amérindiens, l’autre pour les lettres et la poésie. À l’approche de leur trentième anniversaire, les plus vieilles jumelles reliées par la tête toujours vivantes entreprennent de livrer le récit de leur existence hors du commun. Au fil de réflexions graves et drôles, d’une justesse émouvante, se dessinent deux destins unis par la fatalité, mais aussi par un amour inconditionnel, plus grand que soi. Lori Lansens nous révèle, à travers leur histoire singulière, une part d’humanité où chacun se reconnaîtra. Ni monstres, ni merveilles, ni phénomènes de foire, Rose et Ruby sont tout simplement « les filles ».

Mon commentaire:

Cette histoire est un roman. Une autobiographie fictive, écrite d'abord par Rose, l'une des jumelles, sur son ordinateur portable. Sous son insistance, sa soeur Ruby y joindra quelques feuillets écrits à la main, qui s'intercalleront entre les chapitres où Rose raconte leur histoire. Nous entrons dans ce roman un peu étrange en visitant la vie des deux soeurs dans leurs plus intimes détails. De leurs sentiments, la façon dont elles vivent leur différence, les événements de leur vie, des anecdotes sur elles mais aussi sur ceux et celles qui les entourent. Elles nous racontent la vie à la ferme orange, les voisins, l'école, tous les événements, petits et grands, qui font d'une vie ce qu'elle est. Ce roman plaira beaucoup, ou pas du tout. Il s'agit en fait d'un collage de souvenirs et d'événements, qui ne sont pas présentés en ordre chronologique. Ils arrivent sur papier au gré de l'inspiration des deux soeurs et des souvenirs qui en enchaînent d'autres. D'une visite au zoo à un goûter d'anniversaire, des visites aux médecins, jusqu'au regard curieux des autres, tout est raconté, et évoque jusqu'à l'odeur des choses, les souvenirs reliés aux événements de leur vie, de la colère, la tristesse, l'impuissance, l'acceptation, la joie et l'amour. Le destin de Rose et Ruby a tout de l'extraordinaire: leur naissance est triste mais belle à la fois, leur vie de jumelles conjointes suscite les regards et la curiosité, leur goûts, leurs pensées et leurs aspirations diffèrent, même si elles ont appris très jeunes à faire des compromis. Elles n'ont pas le choix puisqu'elles vivent en permanence l'une collée à l'autre.

Le roman est si bien documenté et si bien écrit qu'on croirait réellement lire une véritable autobiographie. Les souvenirs des filles sont si réels qu'on y croit tout de suite. C'est une lecture que j'ai bien aimé, troublante pour tout ce qu'elle a d'humain. La simplicité de ce qui nous est raconté est une leçon de vie, de courage, d'humanité et de compréhension face à la différence. Rose et Ruby sont des personnages très difficiles à oublier... Au fil de l'histoire, les différentes confidences des filles nous apprennent quantité de secrets et de choses qui ont remplies leurs vies. En tournant la dernière page, on se dit que, mit bout à bout, ces événements ont créés un destin extraordinaire pour Rose et Ruby.

Les filles est un roman qui laisse des traces et qu'on n'oublie pas de sitôt...

Quelques extraits:

"Je n'ai jamais regardé ma soeur dans les yeux. Je n'ai jamais pris mon bain toute seule. Je n'ai jamais tendu les bras vers une lune ensorceleuse, la nuit, les pieds dans l'herbe. Je ne suis jamais allée aux toilettes dans un avion. Je n'ai jamais porté de chapeau. On ne m'a jamais embrassée comme ça. Je n'ai jamais conduit une voiture. Ni dormi d'une seule traite du soir au matin. Je n'ai jamais eu un entretien en privé. Je n'ai jamais marché en solitaire. Jamais grimpé dans un arbre. Je ne me suis jamais perdue dans une foule. Tant de choses qui ne me sont pas arrivées et pourtant j'ai été aimée, ô combien aimée. Et si l'occasion m'en était donnée, je vivrais mille vies comme celle que j'ai vécue pour être aimée de façon aussi absolue." p.9

"Rose espère drôlement faire publier ces pages. Elle refuse de l'avouer, mais c'est la vérité. Si aucun éditeur n'est intéressé, elle le publiera sur Internet. Je n'y comprends rien, mais elle soutient que c'est possible. Je suis plus réaliste, moi. Qui a envie de lire l'histoire de deux soeurs qui travaillent à la bibliothèque d'une petite ville ennuyeuse comme la pluie, même si elles sont soudées par la tête?" p.116

"Rose a dit que le livre était terminé. J'écris donc pour dire adieu. Elle a dit qu'un récit devait être comme la vie, c'est-à-dire trop court, peu importe la durée de l'existence. Rapiécé, en somme, en non achevé, la fin renvoyant au commencement." p.568


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