Magazine France

Des hontes au logis

Publié le 15 mai 2009 par Malesherbes

J'avais déjà consacré plusieurs billets à notre Commission de déontologie  lors de la nomination de  François Pérol à la tête du groupe Banques Populaires - Caisse d'Epargne. J'y reviens aujourd'hui à l'occasion de la prochaine arrivée de Stéphane Richard chez France Télécom.   

 

Tout d'abord, contrairement à ce qu'ânonnent à satiété les médias, il n'est pas nécessaire pour que cette nomination mérite examen que le fonctionnaire en cause ait exercé sur l'entreprise qu'il rejoint des missions de contrôle ou de surveillance au cours des trois années précédant son départ. La loi indique qu'il suffit qu'il ait été chargé de formuler un avis sur des décisions relatives à des opérations réalisées par cette entreprise. C'est peut-être ce qui a décidé  M. Richard à saisir la commission.

Là où l'avis de la Commission dite de déontologie est cocasse, c'est qu'il se fonde sur ce qui pourrait se passer après l'arrivée de M. Richard dans son nouveau poste. Or la loi, elle, ne se réfère qu'à ce qui c'est passé avant. M. Richard a en effet, outre son intérêt professionnel, un intérêt financier personnel à obtenir ce poste de direction, sans doute mieux rémunéré qu'une position dans le public, mais aussi il obtient ce poste, non du fait de ses qualités, qui peuvent être grandes, mais plutôt par la faveur du Prince qui voit d'un bon œil un membre du sérail à la tête d'une grande entreprise privée. Comme les compétences nécessaires à la direction d'une entreprise soumise aux règles de la concurrence sont fort éloignées de celles de mise dans un cabinet ministériel, il est vraisemblable que France Télécom est surtout satisfaite de se voir (pro/im) poser ce Président parce qu'il est étroitement lié avec le pouvoir. Pour ma part, j'y vois comme une prise illégale d'intérêt.

Cet avis est également singulier parce qu'il précise, comme l'indique  Christine Lagarde : «Il faut qu'à partir du moment où il rejoindra cette entreprise, il n'ait pas de contacts professionnels avec les membres de l'équipe qui constituent mon cabinet aujourd'hui». L'expérience nous a montré, dans le cas de M. Pérol, qu'une telle interdiction n'était que cosmétique. M. Pérol, chargé du dossier des Caisses d'Epargne au cabinet de Francis Mer, a pu ensuite piloter  de chez Rothschild la création, avec les mêmes  Caisses d'Epargne, de la glorieuse Natixis,  ce qui lui avait été explicitement interdit. Toute interdiction sans que soient précisés les moyens de contrôle et les sanctions applicables en cas d'infraction est totalement vide de sens.

L'interdiction est d'ailleurs curieuse. Elle porte sur les contacts professionnels. Qu'est-ce qui fait qu'un contact est professionnel ? Il a été précédé d'une prise de rendez-vous inscrite dans des agendas, et réalisé au cours d'une visite au Ministère.  Qu'est-ce qui empêche de le remplacer par un sympathique déjeuner dans un agréable restaurant, où l'on discutera librement entre anciens collègues de choses et d'autres, en particulier de celles que l'on a en tête ?

Décidément ces honorables membres de la Commission ont oublié jusqu'au sens du nom de leur commission, la déontologie. Ce mot a été forgé au XIX° siècle par le philosophe anglais Jeremy Bentham, sur les mots grecs deon, deontos, devoir et logos science, doctrine. Il peut être traduit comme théorie des devoirs ou science du bien et du mal. Il s'agit tout simplement de morale, notion bien éloignée des préoccupations de ceux qui nous gouvernent, pas vrai cher Eric B. ?

Je propose de rebaptiser cette commission « des hontes au logis ».


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Malesherbes 59 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte