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De la banlieue au Grand-Paris de la police, du Kärcher à la Kalachnikov, du rêve de Ville à la réalité électorale

Publié le 22 mai 2009 par Jean-Paul Chapon

Contrairement à ce que l’on pouvait penser, Fadela Amara n’a pas disparu et elle fait toujours partie du gouvernement Sarkozy. Elle l’a prouvé cette semaine en envoyant un communiqué de presse cité par le Parisien (mais a priori introuvable sur le site de la secrétaire d’Etat pas plus que sur celui du ministère de la Ville) dans lequel elle salue « le courage et le professionnalisme » des policiers attaqués dans la nuit de samedi à dimanche dernier à La Courneuve, « alors qu’ils participent quotidiennement au retour de la République dans nos quartiers populaires ». Le Parisien poursuit les citations de Fadela Amara : « Le retour de la République est en marche », « rien ne saurait faire fléchir la détermination de l’Etat à lutter contre l’économie parallèle et les bandes mafieuses… Aucun territoire ne doit être abandonné. Le retour de la République ne doit oublier personne. La République continuera à être juste et ferme: juste pour donner la même chance à tous les citoyens et ferme pour garantir le droit à la sécurité à tous les Français ».

Dommage que la secrétaire d’Etat à la Ville, mère du Plan Espoir Banlieue, ait choisi de telles circonstances pour réapparaître au grand jour, et n’ait pas jugé utile par exemple de publier un communiqué sur le  retour de la République dans nos quartiers populaires  lorsque Nicolas Sarkozy dans son discours sur le Grand-Paris le 29 avril dernier  déclarait : « Le Grand Paris cessera d’être une agglomération pour devenir une ville quand on ne parlera plus de banlieues, quand il n’y aura plus de zones urbaines sensibles, quand le destin de chacun ne sera plus déterminé par le quartier où il habite, quand l’adresse cessera d’être un facteur de discrimination sociale ».

Discrimination justement, c’est sur ce thème que le maire (PC) de La Courneuve Gilles Poux à décider de saisir la HALDE, la Haute Autorité de Lutte Contre la Discrimination et pour l’Egalité, une plainte pour « discrimination territoriale » fondée sur trois « grandes ruptures », une rupture urbaine, une rupture liée aux infrastructures de transports et une rupture économique et sociale. Paris est sa banlieue a contacté le cabinet de Gilles Poux pour une interview, demande restée sans réponse à ce jour. Soyons réaliste, le maire de La Courneuve avait mieux à faire à commenter sur toutes les chaînes et antennes le guet-apens contre les policiers pour redresser l’image de sa ville que d’expliquer les raisons de son dépôt de dossier auprès de la HALDE dans un modeste blog ;-)
 
Bien sûr, dans son discours lors du Colloque de l’Association des maires Villes&Banlieues du 12 mai dernier, Fadela Amara avait salué le discours du Président de la République, mais le fait que la secrétaire d’Etat à la politique de la Ville se soit fendue, après l’intervention de Michèle Alliot-Marie d’un tel communiqué est assez symbolique. Symbolique d’une part d’un nouvel acte d’allégeance d’un ministre dit d’ouverture à un moment où l’on l’échéance du remaniement s’approche. Surtout qu’en terme de discrimination positive au sein du Gouvernement, Yazid Sabeg peut revendiquer la même case avec une visibilité plus grande au bout de seulement quelques mois, plus grande mais pas forcément plus stable, son rapport sur la diversité ne déclenche pas un consensus évident. Mais symbolique aussi de l’entrée en période électorale, dans lequel le thème de l’insécurité s’installe en sinistre majesté, chassez le naturel, il revient au galop. Pendant le temps d’une inauguration, la banlieue était devenue le Grand-Paris, elle allait disparaître, la tache des zones sensibles nettoyée non pas au Kärcher, mais à grands coups de projets d’urbanisme et de gestes architecturaux. Le Beau vanté par le président urbaniste devait faire rentrer la République dans nos quartiers populaires.

Hélas, c’est raté, une nouvelle fois ! Le rêve passe, les violences urbaines sont là. Violences urbaines ou grand-banditisme se demandent certains médias ? Au-delà de tout angélisme, on peut se poser la question. Mais soyons clair, je ne cherche pas à nier l’exsitence de cette ou de ces types de violences, violences urbaines d’une part et (grand) banditisme d’autre part. Et il est vrai que tous les trafics de l’économie parallèle dénoncés par Fadela Amara restent malheureusement plus efficace pour rouler en BM que d’aller faire la queue aux Assedic hier et au Pôle Emploi aujourd’hui, en attendant d’hypothétiques effets du Plan Espoir Banlieue demain ou après-demain. Les annonces de violences urbaines se multiplient chaque matin dans les médias. Est-ce une recrudescence soudaine du mois de mai ? ou une montée en puissance à trois semaines d’élections européennes, qu’à gauche comme à droite on détourne de leur objectif réel pour les mener sur le seul terrain national, l’insécurité étant offerte en réponse aux attaques de la gauche contre le gouvernement ?

Toujours est-il que si le Grand-Paris patine en ce moment, Paris-Métropole devant enfin être officiellement installé le 10 juin prochain à Clichy-sous-bois, presque un an après l’annonce de sa création (il était temps), il est un secteur dans lequel les choses semblent progresser plus vite. « Le Grand Paris de la police, voulu par le président Nicolas Sarkozy, plaçant la sécurité de la capitale ainsi que de la petite couronne sous l’autorité du préfet de police de Paris, devrait voir le jour cet été » annonce l’AFP le 20 mai.. Le Grand-Paris de la police première concrétisation de cette Ville réunifiée, tout un symbole ;-)

Jean-Paul Chapon


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