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Les marionnettes déménagent d'un quartier en état de choc

Publié le 06 juin 2009 par Moi1001
Les marionnettes déménagent d'un quartier en état de chocMèche allumée, traînée de poudre, lorsque l'explosion adviendra, je ne crois pas qu'elle sera contenue aux seuls quartiers dans lesquels elle naît. Dans l'urgence, nous devons quitter les bureaux sis rue de l'arbrisseau à Lille. Oui vite, parce que nous ne sommes plus en sécurité, nous devons abandonner des locaux que nous occupons depuis plus de quatre ans. Je ne sais que trop bien comment tout cela a commencé : cela a commencé alors que nous n'étions pas là ! Dans ces quartiers, on a laissé s'installer des ghettos de fait dans lequel a grandit le sentiment d'injustice et de discrimination. On s'est occupé du centre et on a laissé la périphérie se gérer toute seule. Quand nous sommes arrivés là, les commerces n'étaient plus bien nombreux L'ont-ils jamais été ? Quand nous sommes arrivés, les représentants de l'état, et des administrations locales avaient déjà fermé les quelques permanences qu'ils tenaient encore la veille quand elles existaient. Pour rationaliser les fonctionnements, optimiser l'outil administratif, on a de fait abandonné des pans entiers de la population. Une partie de la population qui plus qu'une autre nécessite l'attention de la république.
Quand nous sommes arrivés, on demandait aux associations de gérer les urgences sociales, éducatives, humanitaires, culturelles et de réduire les faillites du système. Aujourd'hui, plus rien n'est possible. Dans ce micro-quartier, de la briquetterie-arbrisseau, malgré les dires du Préfet  et de la Maire de Lille, grandit une zone de "non droit". Nous ne pouvons plus y travailler, nous devons en partir. Comment faire autrement quand je lis la peur dans le regard des nouveaux salariés, accueillis ces derniers mois. Comment faire autrement quand les incidents deviennent quotidien ; vitres cassé, jets de pierre, insultes et crachats comment faire autrement ? Comment faire autrement quand dans le lieu de travail, résonnent les cris, les bruits de pneus qui crissent, des moteurs qui vrombissent et rendent
la concentration impossible. Comment faire autrement, quand la peur devient le quotidien ? Les habitants du quartier marchent vite, tête baissée ; ne traîne pas dehors celui qui n'a rien à y faire ! Les cultures s'affrontent, le ghetto est installé et une jeune génération multiplie les actes violents qui sont autant de cris de rejets de la société. Alors nous avons envoyé une lettre alertant les pouvoirs publics et notre bailleur de la situation et de l'impossibilité de continuer ; dans l'urgence (il a fallu quelques semaines) on nous a relogé et ces derniers jours, en parallèle de l'installation en résidence à Calonne Ricouart, nous avons organisé le déménagement de nos bureaux. Aujourd'hui et demain dimanche, nous peignons les murs et lundi c'est dans de nouveaux locaux sis au coeur du quartier de Faubourg de béthune à Lille que nous travaillerons. Je le sais, notre déménagement appauvrit encore un peu plus cette zone mais je n'y peux rien ; cela en était arrivé à un point tel que sans déménagement nous aurions tout simplement fermé les portes de notre activité.

Fabrice Levy-Hadida - Cie Les Mille et une Vies - Théâtre de Marionnettes Itinérant


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