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Un paysage politique désolant en Sarkofrance

Publié le 08 juin 2009 par Juan
Un paysage politique désolant en SarkofranceA l'issue du scrutin européen, on ne pouvait faire qu'un constat: le paysage politique est désolant tant il est figé et contradictoire. En France, l'UMP arrive en tête avec 27,87% des suffrages, 29 députés qui rejoindront les 296 conservateurs du PPE à Strasbourg. Les socialistes arrivent péniblement second avec 16,48%, 14 députés dans un groupe rétréci à 182 sociaux-démocrates européens. Europe Ecologie a créé la surprise avec ses 16,28% des voix, 14 députés également au sein d'un groupe de 48 Verts européens (et non 60 comme initialement annoncé). Le Modem hérite de 6 députés, pour 8,45% des suffrages, et s'intègrera au groupe libéral (80 députés). Le Front de Gauche, avec ses 6,05% des voix, ne gagne que 5 députés, dans un futur groupe de la gauche radicale de 31 députés. Le Front National sort 3 députés, Libertas un seul, et devraient rejoindre les souverainistes européens (53 députés).
L'absention victorieuse, des intsitutions délégitimées.
Si les médias ont fait leurs choux gras du taux élevé d'abstention en Europe (et en France), rares ont été ceux qui ont analysé l'abstention et ses motivations. En 1979, l'abstention n'était que de 37%. L'UMP, toute victorieuse qu'elle est, ne pèse que 11% des inscrits. Le Parti Socialiste ou Europe Ecologie à peine 6%... Faut-il débattre encore longtemps du "sentiment européen" ?
  • Les classes populaires, les premières victimes de la crise, ont très peu voté. Dans le Nord Pas de Calais, la participation fut inférieure à 40%, soit 10 points de moins qu'à Paris.
  • Pourquoi donc ce refus de voter ? Une raison peut être trouvée dans les dysfonctionnements institutionnels de l'Union Européenne : le conseil des chefs d'Etat conserve un rôle prépondérant, aux détriments du Parlement; le mode d'élection lui-même des députés européens diffèrent d'un pays à l'autre. La faible lisibilité des groupes parlementaires à Bruxelles et Strasbourg décourage les votes.
  • Comme le notait un commentateur sur le blog Sarkofrance, si l'élection européenne avait été réellement proportionnelle, la répartition des députés aurait été quelque peu différente: 5 pour l'extrême gauche (contre zéro); 29 pour la gauche (contre 33), 7 pour le Centre (contre 6), 26 pour la droite (contre 30), 5 pour l'extrême droite (contre 3).
  • Les partis nationaux défendent des positions vagues sur des thèmes généraux (l'Europe sociale, l'environnement, plans de relance, etc) au lieu de s'engager sur des propositions concrètes.
  • Un dernier motif de découragement peut être trouver du côté du Traité de Lisbonne : tous les pays européens, sauf l'Irlande, ont avalisé le Traité de Lisbonne sans passer par la voix référendaire. En France, les nonistes de 2005 ont pu être dégoutés d'avoir été exclus de juger le Traité de Lisbonne, malgré leur refus référendaire du Traité constitutionnel en mai 2005.
Finalement, le désarroi démocratique devrait interroger la gauche. L'UMP s'en sortira bien évidemment. La présidence française de l'UE a contribué à dévaloriser le rôle du Parlement, en privilégiant les réponses nationales décidées par les chefs d'Etat, plutôt qu'une réponse globale et protectrice votée au Parlement. CQFD.
Sarkozy s'en sort, mais pas son camp.
Le chef de l'Etat a habilement solidifié son camp, tant grâce aux thèmes évoqués (l'insécurité et l'immigration) qu'à sa stratégie de campagne : des listes tardives, peu d'engagements précis sur les sujets européens du moment, et une concentration des messages sur le soit-disant succès de la présidence française l'an dernier. les belles photos avec Angela Merkel et Barack Obama ont complété le tableau. Même sur la réélection de José-Manuel Barroso, l'UMP n'ose pas se dévoiler.
Pourtant, la droite française est en miettes. Les listes Sarkozy ont obtenu l'un des plus faibles scores européens. L'UMP ne dispose de surcroît d'aucune réserve de voix. Et le Front National refait surface avec près de 6,34% des suffrages. Lundi matin, Rachida Dati a eu beau expliquer que l'électorat s'est dispersé, elle n'a convaincu qu'elle même.Autre sujet, le remaniement du gouvernement.  Michel Barnier et Rachida Dati  vont donc quitter leurs postes au gouvernement, respectivement à l'Agriculture et à la Justice. L'un abandonne la crise du lait. L'autre va faire oublier son incompétence. Reste que le gouvernement sera donc remanié. Il y a quelques semaines, on spéculait beaucoup. Maintenant, il faut passer aux actes. La question se pose aussi pour Brice Hortefeux, finalement élu. Enfin, le joli succès d'Europe Ecologie pourrait enterrer l'hypothèse Claude Allègre.
La gauche en recherche de leader et de programmes
La situation du Parti Socialiste et du Parti Communiste est inverse. Ces deux partis ont raté leur élection européenne mais dispose d'une implantation locale et nationale très forte. Le vote utile n'a pas joué en faveur du PS. Les socialistes ont un enjeu programmatique : ils sont fortement concurrencés sur tous les thèmes. Le Congrès de Reims s'est abusivement concentré sur la question des alliances avec le Modem ou avec la Gauche de la Gauche, alors qu'il aurait traité d'idées. On peut tendre la main aux électrices et électeurs centristes sans embrasser François Bayrou. Au lieu de quoi, la direction socialiste, Benoît Hamon en tête, a gauchisé son discours pour découvrir, le soir du 7 juin, que son flanc gauche reste minuscule... Le Front de gauche (6,05%), le NPA (4,88%) et Lutte Ouvrière (1,2%) n'ont pas réussi à s'entendre. Leur score global (12%) reste faible mais aurait pu faire la différence en cas d'union.
L'écologie, vainqueur sans parti
Europe Ecologie est un rassemblement sans organisation. Les Verts n'affichent qu'une dizaine de milliers de militants, José Bové n'a aucun relais institutionnel, et les supporters de Nicolas Hulot restent "a-politique". Comment traduire une victoire électorale en longévité politique ? Cécile Duflot a expliqué que ces résultats devaient conduire les Verts français à beaucoup de modestie.
Le Modem étouffé par Bayrou
François Bayrou et ses proches ont reconnu avoir échoué lors de ce scrutin (8,45%). Le Modem n'a d'autre issue que de lever l'hypothèque présidentielle de son leader. Bayrou a trop concentré son discours sur la défense des libertés publiques et démocratiques: indépendance des médias, nuisance des sondages, fonctionnement des institutions, les thèmes les plus mis en avant par la campagne centriste ont été jugés hors sujets par les électeurs, qu'ils aient voté ou pas. Un sondage sorti des urnes, réalisé par la Sofres, révélait que les absentionistes ont fait plus largement défaut au Modem, au NPA et au FN qu'aux autres partis.
Cette désorganisation générale ne sert qu'une personne, Nicolas Sarkozy.
Sans rival à droite à gauche, il conserve l'avantage.&alt;=rss

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