Magazine Société

La fin de l'hypothèse Bayrou ? (1)

Publié le 10 juin 2009 par Sylvainrakotoarison

Premier article d’une petite série sur les résultats des élections européennes du 7 juin 2009 en France. Celui-ci porte sur le MoDem. Première partie.

La fin de l'hypothèse Bayrou ? (1) Les élections européennes du 7 juin 2009 ont été un désastre pour la participation électorale. Très lentement, la participation s’est effilochée à chaque élection depuis juin 1979. 2% des électeurs de plus ont été indifférents par rapport à juin 2004 : seulement 40,5% de participation.

Faut-il s’en inquiéter ? D’un point de vue général, bien sûr et doublement : dans une démocratie, le taux d’abstention est toujours un symptôme de maladie et plus particulièrement pour des élections sur l’Europe qui est un sujet important. On s’est d’ailleurs étonné à écouter pendant la campagne les leaders politiques dire que l’Europe est importante car x% (x variant entre 60 et 80) des lois votées au Parlement français provenaient de directives européennes et, dans d’autres élections plus nationales, parler d’indépendance, de souveraineté, de technocrates de Bruxelles…

D’un point de vue moins pessimiste, la forte participation de l’élection présidentielle de 2007 et la forte mobilisation des partis et des écuries ont montré que les Français sont prêts à s’investir s’ils le jugent utile. La forte mobilisation des mouvements sociaux le confirme aussi.

Les quatre enseignements du 7 juin 2009 ont été ressassés par tous les médias : effondrement du Parti socialiste, bon maintien de l’UMP (qui parvient à se hisser à un niveau similaire à celui du 1
er tour de l’élection présidentielle de 2007 et qui double ses sièges par rapport à 2004), chute frontale du MoDem et enfin, envolée lyrique des listes Europe Écologie de Daniel Cohn-Bendit et José Bové.

Pour la première partie de cette série d’articles sur les élections européennes, j’évoquerai le MoDem et l’avenir politique de François Bayrou.

Pilule amère
Il est toujours intéressant d’écouter les réactions initiales des personnalités politiques le soir des élections. Aujourd’hui, il est très difficile de nier une terrible défaite. Alors, François Bayrou l’a reconnue, a reconnu sa déception, et a même admis qu’il assumait « [sa] part de responsabilité » (notons que Martine Aubry a assumé son entière responsabilité, pas uniquement une part).

Puis, François Bayrou et Marielle de Sarnez, entre autres, ont fait amende honorable, ont expliqué qu’en politique, il y a des hauts et des bas, qu’il faut savoir encaisser les coups durs et qu’il faut savoir rebondir. Ils n’ont pas tort en théorie, et la carrière politique de Jacques Chirac et celle de François Mitterrand l’ont montré.

Coup final… ou pas ?
J’ai cependant d’énormes doutes sur la capacité de François Bayrou à se relever de cette monumentale défaite.

L’histoire politique montre qu’on ne se relève parfois jamais d’un tel échec.

En juin 1994, Michel Rocard avait perdu toutes ses chances présidentielles pour 1995 après la défaite sévère du PS qu’il dirigeait alors. Il avait pourtant été l’un des Premiers Ministres les plus populaires de France, savait que François Mitterrand ne se représenterait pas et aucun concurrent socialiste ne risquait de lui faire de l’ombre, pas même Jacques Delors avec qui il n’a jamais eu d’atome crochu.

Rappelons-le : alors que François Bayrou faisait plus de 18,6% en avril 2007, le MoDem, qui n’est que l’émanation de son électorat en 2007, est descendu à 8,45%. On pourrait aussi comparer avec le score de l’UDF en 2004 (12,0%) ou encore avec le score assez faible du MoDem aux législatives de juin 2007 (7,6%).

Ironie du sort ? Le MoDem de François Bayrou en 2009 vient de faire une performance similaire à celle de la liste centriste de Simone Veil en juin 1989 dont le directeur de campagne n’était autre que François Bayrou. Simone Veil lui en veut définitivement depuis cette époque, car elle croit que François Bayrou avait tout fait pour faire perdre sa liste.

Paradoxe bayroucentré

C’est d’ailleurs un phénomène assez étrange : François Bayrou a joui (jusqu’à ces élections européennes) d’une excellente popularité depuis deux ans, malgré les nombreux abandons d’amis et d’alliés (depuis Hervé Morin et son Nouveau centre jusqu’à Jean-Marie Cavada et Christian Saint-Étienne). Et paradoxalement, son Mouvement démocrate stagne toujours aux alentours de 10%, à quelques pourcents près, bien loin des presque 19% de 2007.

Faut-il dire que François Bayrou est seul ? Non si j’en juge par les milliers d’élus locaux (aux municipales de mars 2008, il y a eu plus d’élus MoDem que de sortants élus sous l’étiquette UDF en mars 2001). Non si j’en juge par les adhérents du MoDem bien plus nombreux que ceux de l’ex-UDF (mais aussi plus volatiles et moins fidèles). Non si j’en juge par les personnalités autour de lui (Jean Peyrelevade, Jean-François Kahn etc.).

Mais malgré cela, la force du MoDem réside uniquement, exclusivement, sur la personnalité de François Bayrou. C’est d’ailleurs plus un atout qu’un handicap : le PS de François Mitterrand, le RPR de Jacques Chirac, l’UMP de Nicolas Sarkozy ont gagné par cette sorte d’effet culte de la personnalité introduit par la réforme de 1962 de la V
e République sur l’élection directe du Président de la République. A contrario, le PS d’aujourd’hui meurt d’absence de leader incontestable.

Or, le destin politique de François Bayrou est aujourd’hui dans le décor.
Dans la seconde partie de cet article sur le MoDem, je placerai la démarche politique de François Bayrou dans le contexte historique de l'autonomie du centre.


Retour à La Une de Logo Paperblog