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Congrès de Versailles : y aller ou pas ?

Publié le 14 juin 2009 par Hmoreigne

 Entre discours du Trône et discours sur l’état de l’Union , Nicolas Sarkozy prononcera une allocution devant les parlementaires des deux chambres réunis à Versailles le 22 juin prochain. Un discours qui sera suivi d’un débat sans vote, après le départ du président. Un exercice inédit pour nos institutions qui jusqu’alors autorisaient simplement la lecture d’un discours du Chef de l’Etat par les présidents des deux assemblées. Cette modification de la constitution adoptée en juillet 2008 est tout sauf neutre. Elle marque une nouvelle marche dans la présidentialisation du régime. Dopés par leur succès aux européennes, les Verts ont choisi de s’opposer par le boycott. Le reste de la gauche s’interroge.

Une nouvelle fois, Nicolas Sarkozy a surpris tout le monde. Dans un contexte de crise le président prend le risque de jouer le Roi soleil sous les ors de Versailles. Un petit plaisir qui devrait coûter entre 300 et 400 000 euros à la république. Reste à savoir si le président fera salle comble. Quelque 900 parlementaires (577 députés et 343 sénateurs) seront conviés.

Emmenée par les Verts, l’opposition tente de s’organiser pour ne pas jouer les potiches. Le parlement des Verts, le Conseil national interrégional (CNIR) a donné la couleur en adoptant une motion selon laquelle “l’argent consacré à ce nouveau ‘meeting de l’UMP’ pourrait certainement être mieux utilisé qu’à une accentuation de la présidentialisation du régime“.

Les Verts, qui entendent surfer sur leur succès électoral de la semaine dernière estiment que “la revalorisation du rôle du parlement et, en particulier de l’opposition parlementaire, ne peut se limiter à un simple monologue présidentiel” et appellent “tous les parlementaires qui se sont prononcés contre la réforme constitutionnelle à les rejoindre dans ce boycott“.

Dans la pratique, l’annonce des écologistes forts simplement de 4 députés et 5 sénateurs ne devrait pas troubler l’Elysée sauf à ce que le reste de la gauche emboîte le pas. Le PS semble naturellement tenté.

Ce qui nous choque, c’est qu’une nouvelle fois le Parlement soit contraint à l’urgence pour un show présidentiel qui s’apparente à une opération de politique intérieure“, a déjà indiqué Jean-Marc Ayrault. Le président du groupe socialiste de l’Assemblée nationale doit prendre contact avec l’ensemble des groupes de gauche de l’Assemblée et du Sénat “afin de décider ce qu’on va faire“.

Pourquoi faudrait-il y aller ?“, s’interroge déjà sous forme de question-réponse le porte-parole des députés du PCF. Très offensif, Noël Mamère fustige une dérive monarchique “il n’est pas question de cautionner cette dérive monarchique du régime où le président agit selon son bon vouloir. Même si ça se passe à Versailles, il ne faut pas confondre le Congrès avec la cour du roi.”

Dans ce contexte tendu, il n’y a bien que la droite pour saluer l’initiative présidentielle. En voix de son maître, Frédéric Lefebvre, porte-parole de l’UMP, évoque “une étape importante du quinquennat qui identifie parfaitement la République respectueuse que défend Nicolas Sarkozy, respectueuse du Parlement, respectueuse de l’expression des Français et respectueuse des sensibilités après la réception des chefs de partis“. Selon un communiqué de l’Elysée le Président exposera sa politique européenne et son projet économique et social après le scrutin européen du 7 juin.

Tout en finesse, le député villepiniste UMP Jean-Pierre Grand cultive sa différence. Il ira à Versailles mais regrette “la consécration de la disparition du premier ministre. C’est le président de la République qui va faire une déclaration de politique générale, sans pour autant engager sa responsabilité.”

Même à gauche, il existe bien une poignée de députés non défavorables à une présence au Congrès. Au sein des Verts Yves Cochet n’a pas voté la motion appelant au boycott. Côté PS Jack Lang, seul député du PS à avoir voté la réforme constitutionnelle en 2008 estime “qu’il n’y a aucune raison de s’offusquer”. “Dès lors que la Constitution a été révisée, le débat est clos. C’est une disposition qu’au demeurant je trouve excellente”.

En juillet 2008, François Hollande qui menait comme Premier secrétaire du PS la bataille contre la réforme constitutionnelle s’était vu accusé dans son propre camp “d’anti-sarkozysme pavlovien“. Il avait alors répondu ce qui apparaît aujourd’hui comme une évidence “Je ne suis pas dans un anti-sarkozysme systématique mais dans un anti-présidentialisme que Nicolas sarkozy porte aujourd’hui à son comble“.

A l’inverse des Verts qui donnent le sentiment d’avoir établi un lien avec la population et de coller au tempo présidentiel, la direction actuelle du PS est à la peine. A l’image de la déclaration de son porte-parole qui dénonce certes une exercice de communication mais reste encore axée sur le plan de relance.”J’espère que le président de la République a des annonces sérieuses à faire, car il y a plusieurs mois qu’on attend un second plan de relance, un vrai plan de relance”.

Le PS ne répond pas à la vraie question à savoir que recherche la Présidence de la République en choisissant de s’exprimer devant le Congrès plutôt que devant des caméras de télévision depuis l’Elysée ? A titre personnel, le député PS Jean-Jacques Urvoas avance une explication: “Il est toujours à l’affût d’une solennité qu’il n’arrive pas à acquérir par ailleurs; c’est une tentative pour habiter le costume.”

Reste qu’en offrant un enterrement de première classe à la fonction de Chef de gouvernement, Nicolas Sarkozy dominé par son ego, prend un risque politique majeur. Restreindre une nouvelle fois l’efficacité du fusible Matignon au moment où les effets dévastateurs de la crise, notamment en terme de chômage devraient, dans les mois à venir, devenir pleinement visibles.

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