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Scène poétique

Publié le 18 juin 2009 par Lironjeremy
Scène poétique

Un moment s’épaissit des expériences précédentes. Toute émotion esthétique est cultivée. Et du coup, écoutant cette scène poétique qui, hier soir, réunissait Fred Griot (avec Yann Féry) et Armand Dupuy, je ne pouvais me retenir de penser à la fameuse soirée où Ball au Cabaret Voltaire donna cette représentation en costume dont il donne témoignage dans son journal. Pas plus que je ne pouvais empêcher le reflux des phrases d’André Martel lorsque Fred Griot parlait sa « lang basale », et par un jeu de ricochet, sans pertinence critique aucune, je pensais à Dubuffet (il avait illustré un texte de Martel) et sa langue de tourbe et de boue. Et poser là le mot boue nous emmène encore jusqu’à la genèse. On n’en sort pas. L’impression parfois aussi furtivement d’écouter quelque chose qui serait de l’ordre de l’improvisation sur un phrasé de Rabelais, portée par les sonorités par ce qu’elles imposent au corps comme posture, comme bouche. Jouer la langue en bouche. (pas la même chose de lire que d’écouter) Les mots se répètent, martèlent un rythme, tiennent des sommets avant de se laisser rouler et de fixer à nouveau un autre point culminant. On voyage dans le texte comme sur une carte en relief. Et cette musicalité portée par des accents chantants me faisait penser à Loïc Lantoine. L’impression que le texte devient une coulée, coulée de bout charriant des morceaux reconnaissables de rues, d’hommes. La poésie parlée est comme une manière de rompre la solitude laborieuse et procure cet enthousiasme, cette petite transe de la scène quand l’auteur tout physiquement devient porte-voix

La soirée commençait avec une lecture d’Armand Dupuy, ses fragments sur Pollock que j’avais lu et dont j’avais parlé ici. Ce qui me touche particulièrement dans ce texte c’est sa proximité avec son sujet, son empathie, ce qui le travaille de l’intérieur et qui apparaît avec une singulière clarté. Par un retournement Pollock devient sa peinture, le peintre et la couleur tout deux versés lorsque Pollock verse la grolle, lorsqu’il s’égoutte et se boit lui-même. Un tel retournement, une telle confusion détruisent l’homme et font l’œuvre portée par l’homme devenu mythe. Et, incorrigible, je pense alors à l’Invention de Morel de Casares, à Cortazar.

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