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Les banlieues, futurs "Burqanistans" ?

Publié le 09 juillet 2009 par Theatrum Belli @TheatrumBelli

Une enquête longue et pénible à cause de la difficulté des policiers à briser la "loi du silence". Un contexte social délicat, marqué par de nombreuses violences. Des accusés mal intégrés, entre chômage, déscolarisation et polygamie. Les investigations sur les tirs contre des policiers pendant les émeutes de Villiers-le-Bel (Val-d'Oise), en novembre 2007, dont Le Monde révèle les conclusions, témoignent d'un climat extrêmement dur, mélange d'omerta et de règlements de comptes. A l'issue de cette enquête, achevée le 30 juin, 4 hommes, âgés de 22 à 29 ans, ont été renvoyés devant la cour d'assises pour "tentatives de meurtre en bande organisée" sur des policiers. Un cinquième est poursuivi pour "complicité" pour avoir fourni un fusil. Tous devraient être jugés d'ici au début de 2010.

Un premier procès des émeutes - les 2 et 3 juillet à Pontoise, au cours duquel dix hommes ont été jugés pour des jets de projectiles - avait donné un aperçu de l'organisation des violences à Villiers-le-Bel (Le Monde du 4 juillet). L'enquête sur les tirs met en évidence une autre facette, celle de quartiers où la République peine à s'imposer face aux lois implicites de la cité. "Des pressions et menaces" ont été exercées "auprès de témoins ou de leurs proches", constate ainsi la juge d'instruction Magali Tabareau dans son ordonnance de mise en accusation, qui constitue un copier-coller presque intégral des réquisitions du procureur de la République, Marie-Thérèse de Givry.


Faute de pouvoir entendre des témoins à visage découvert, les enquêteurs se sont d'abord appuyés sur des témoignages anonymes. 5 au total. Les déclarations de ces habitants, convergentes, mettent notamment en cause deux figures du quartier, Abou et Adama Kamara, ainsi que Maka Kanté et Ibrahim Sow, aperçus en train de tirer. Mais ces éléments, qui ont conduit à une vague d'interpellations très médiatisées, le 18 février 2008, n'ont pu être corroborés par des preuves matérielles.

Plus gênant, 3 de ces témoignages ont perdu une partie de leur valeur par la suite. Un des témoins anonymes a, en effet, été agressé "dans un cadre distinct". Sérieusement blessé, souffrant de pertes de mémoire, il n'a jamais pu être réentendu. Un second témoin a, lui, refusé de se rendre aux confrontations - anonymes - avec les accusés. Un troisième, qui s'est présenté comme un "copain" des émeutiers, a reconnu agir pour des raisons lucratives, la police ayant promis des récompenses aux informateurs.

Le second pilier de l'enquête repose sur les déclarations des jeunes placés en garde à vue. Aucun des 4 hommes accusés des tirs n'a avoué, ni devant les policiers ni devant le juge. Mais plusieurs suspects ont donné des détails sur les tireurs. "Abou nous disait de leur rentrer dedans, il nous disait de passer par ce chemin plutôt que par un autre, de ne pas reculer, il donnait des ordres comme un militaire", a ainsi expliqué l'un des participants.

La plupart de ces témoins sont revenus sur leurs déclarations par la suite, affirmant avoir subi des pressions policières. "Il y a eu une avalanche de rétractations. Je veux savoir si ces témoignages présentent les garanties suffisantes et s'ils sont corroborés", indique Me Patrick Arapian, avocat de trois accusés. Dans son ordonnance, la juge d'instruction insiste, elle, sur les menaces subies par les témoins pour expliquer leurs "revirements". L'un d'eux a ainsi été victime d'une agression par arme à feu, devant son domicile, mais a refusé de porter plainte. Un autre a subi des menaces de mort. Un troisième, Y., a fait état de pressions sur sa famille. Au moment de la prolongation de sa garde à vue, un des suspects s'était notamment exclamé, devant des jeunes de Villiers-le-Bel : "C'est Y. le traître !"

L'enquête témoigne aussi des difficultés d'intégration des accusés. La plupart avaient déjà été condamnés pour violences et vols. En dehors d'un "chef de caisse à Lidl", un supermarché discount, les 5 hommes sont tous sans profession. Le seul à disposer d'un diplôme a atteint le niveau BEP. 4 des 5 accusés sont issus de familles polygames. Abou Kamara, par exemple, est le deuxième enfant d'une famille de 9. "Ses parents ont divorcé en 1996 pour permettre à son père d'épouser sa deuxième femme, avec laquelle il a 10 enfants", note le juge. Son demi-frère, Adama, ancien médiateur dans la cité, surnommé "le shérif", est le sixième de cette seconde fratrie. Le magistrat relève aussi que l'épouse d'un des accusés n'a pas pu être auditionnée par les policiers, celle-ci s'étant présentée "vêtue entièrement d'une burqa dont elle refusait de dévoiler le haut pour permettre la vérification de son identité".

Source du texte : LE MONDE.FR


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LES COMMENTAIRES (1)

Par Samir
posté le 29 juin à 21:36
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J'ai bien connu la famille Kamara à Villiers le bel,le père et les 2 femmes... les garçons étaient tous mignons quand ils étaient petits..après ça a dégénéré...dommage

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