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Logement : défiscalisation, piège a cons !

Publié le 24 juillet 2009 par Objectifliberte

Robien-a-stgaudens Le sénateur Scellier, contre lequel j'eus le plaisir de débattre de la loi sur le droit au logement opposable lors d'un débat sur RFI dont on peut retrouver la trace sur ce blog, passera à la postérité aux côtés de MM. Pons, Périssol, Besson, Robien, Borloo, comme ayant donné son nom à un dispositif de défiscalisation dans l'achat immobilier locatif.

Des propriétaires désemparés

Toujours la même histoire... Cet article du Figaro, pour la énième fois, nous alerte sur les malheurs de nombreux propriétaires de logements Robien, Borloo ou Scellier qui ont cru faire une affaire en or en souscrivant un achat de logement défiscalisé, dans une ville moyenne dont ils connaissaient mal le marché locatif. Ils se retrouvent sur-endettés ou ruinés, parce qu'ils ne trouvent pas de locataire, ce qui leur fait perdre leur prime fiscale, ou alors ils doivent louer bien en dessous de leur budget d'équilibre.

Ajoutons que nombre d'entre eux découvrent que leur logement est plein de malfaçons et que le revendre, dans un marché déjà déprimé, relève de la mission impossible. Il y aurait, selon le Figaro, 30 000 propriétaires piégés par du mauvais placement défiscalisé,  soit environ 4 milliards d'épargne mal-investie, et encore, ce chiffre n'est que provisoire et n'inclut que les épargnants franchement dans le rouge (*).

Bref, notre mini scandale des subprimes à nous, c'est le Besson-Robien-Borloo-Scellier !

Défiscalisation, piège à cons !

 M. Scellier, à la suite de ses prédécesseurs sus-nommés, restera donc dans la très petite histoire comme un des responsable de la ruine de bien des épargnants à cause de ce grand piège à cons que l'on nomme investissement immobilier défiscalisé, dont je vais rappeler les grands principes. Je précise que vous pouvez  retrouver ces explications, plus beaucoup d'autres sur toutes les politiques du logement, dans mon livre, dont il reste toujours quelques exemplaires à vendre, dépêchez vous !

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Nos gouvernants ont pris la mauvaise habitude, depuis des années, de surtaxer l'immobilier locatif et de multiplier les chausses trappes législatives envers les propriétaires. Résultat, l'offre locative spontanée est notoirement insuffisante. Nos gouvernements, au lieu de se pencher sur les sources du mal, appliquent à la lettre le petit manuel du parfait socialiste selon Ronald Reagan : "If it moves, tax it, if it moves again, regulate it, and when it's not moving any more, subsidize it". Ils créent donc une subvention fiscale pour "relancer l'investissement locatif". La persistance de ces politiques lors des phases d'alternance montre ô combien, si besoin était, que l'ignorance économique la plus crasse transcende tous les clivages politiques dans notre beau pays.

Comment ça marche ?

Les anciens dispositifs défiscalisés (Besson, Périssol) ont permis, avant que la bulle immobilière ne se forme, à des gens qui, pour la plupart, auraient eu les moyens de se faire un patrimoine tous seuls, de se le constituer avec nos impôts. Effet d'aubaine classique. Sachant que les investisseurs immobiliers appartiennent rarement à la classe des RMistes, nous avons là un cas parfait de spoliation des contribuables de toute conditions matérielles au profit de gens que nous qualifierons d'aisés, ce que je ne leur reproche pas d'ailleurs: le gouvernement leur ouvre un pot de confiture sous le nez, comment pourraient ils résister ? Encore un cas de "socialisme au service des riches", ou Business as usual en social-kleptocratie.

Puis, grâce à nos extraordinaires lois de gestion des sols conçues par des admirateurs avoués des Gosplans, couplée à la baisse des taux d'intérêt, une bulle se forme. Nous noterons d'ailleurs que les dispositifs de défiscalisation ont sans aucun doute contribué à en augmenter l'ampleur et/ou la durée.

Toutefois, cette bulle ne se forme pas partout à la même vitesse, car Saint-Gaudens n'est pas aussi dynamique que Toulouse. C'est alors que des margoulins, appelons un chat un chat, se disent qu'ils vont monter des programmes juteux en "Robien" et assimilé, là où la pression foncière est moindre, donc la bulle moins formée, et où ils pourront par conséquent maximiser le rapport entre le coût d'investissement initial et le bénéfice attendu de la vente 18 à 24 mois plus tard.

Bien sûr, ces gens construisent du collectif, car il veulent tirer le maximum du foncier dont ils se sont rendus maîtres. Ce qui fait sens à Paris et à Toulouse, mais nettement moins à Montauban, Figeac, Agen ou Tarbes, voire Saint-Gaudens (photo en haut de l'article) où la demande se porterait plutôt vers la petite maison individuelle avec jardinet, au grand dam de toutes les pleureuses bureaucratiques qui nous affirment, la main sur le coeur, que la maison individuelle, c'est l'étalement urbain, ce mal absolu. Mais c'est un autre débat.

Ces immeubles peu adaptés à la demande ont donc été construits là où la pression foncière était la moins forte, donc la demande la plus faible : louer sera plus difficile qu'au centre de Paris ! Il apparait donc que les logements ainsi construits partent avec un certain nombre de handicaps au départ. Qui achèterait des daubes pareilles dans un marché non distordu par l'état ?

Les méfaits de l'aveuglement fiscal

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Mais qu'importe, l'investissement est dé-fis-ca-li-sé. Par conséquent, des représentants débarquent un beau jour chez vous ou à votre bureau, après qu'un télédémarcheur vous ait mis l'eau à la bouche, et vous tiennent à peu près ce discours: "Avec la déduction machin, c'est le fisc qui va payer la moitié de votre investissement pendant 5 ans, ce qui vous permet de rembourser plus vite vos prêts les premières années et de de vous retrouver avec des mensualités pratiquement égales, ou à peine supérieures, un p'tit chouia tout au plus, aux pharamineux loyers que vous allez encaisser ensuite. Par ailleurs avez-vous vu comme l'immobilier grimpe ? Au bout de neuf ans, vous pourrez revendre en faisant la culbute. "

Naturellement, le logement de Montauban n'est pas vendu à un Montalbanais, qui ne sait que trop bien qu'en temps normal, une telle cochonnerie n'est pas adaptée au marché local, mais à un cadre Parisien ou Strasbourgeois surmené. Celui ci, du fait de la défiscalisation, et parce que "de toute façon, l'immobilier grimpe", ne regarde pas la qualité "intrinsèque" de son investissement -- grave erreur en toutes circonstances ! -- mais ne voit que la prime fiscale, parce que la perspective d'échapper aux avanies que lui font subir nos gabelous est une motivation tout à fait suffisante pour l'appâter.

Cette façon de procéder a un intérêt supplémentaire, vu des promoteurs : elle permet aux plus margoulins d'entre eux de tirer sur les coûts de construction et de vendre (cher) des logements mal finis aux investisseurs aveuglés par l'avantage fiscal: le Parisien ne viendra pas superviser son chantier une fois par semaine. D'où le nombre de propriétaires qui constatent après coup que les logements qu'ils ont achetés sont dans un état absolument minable. Ajoutons que l'impossibilité de faire fonctionner correctement les copropriétés dont la plupart des membres sont disséminés à des centaines de kilomètres rend très difficile la bonne maintenance des lieux. Tout pour plaire !

Entendons nous bien: il y a aussi eu des promoteurs qui ont fait du Robien sérieux, et des réseaux de vente qui n'ont pas tiré sur la ficelle pour vendre n'importe quoi. Mais la bulle et le manque de locataires solvables dans une économie en pleine dégringolade risque de transformer aussi des programmes a priori "non véreux" en mauvaise affaire tout de même. Au final, les "gagnants" du défiscalisé (à mes dépens de contribuable, rappelons le) ne seront pas si nombreux.

En effet, la période de conservation d'un logement Robien, par exemple, pour ne pas perdre l'avantage fiscal, est de 9 ans. le dispositif a été mis en place en 2003. Si vous avez du cash, en réserve, ou un banquier encore en vie, rendez vous en 2012 pour rafler les meilleurs logements à prix massacrés lors de la grande braderie qui s'annonce, car ceux qui me lisent savent que je ne pronostique pas un retour à une économie vibrante pour cette époque, du fait des politiques de réaction à la crise tout à fait calamiteuses mises en oeuvre par tous les gouvernements du G8. Les autres dispositifs défiscalisés seront également touchés par le phénomène des "dates cliquet", à d'autres moments.

Conclusion

Nos gouvernants sont persuadés qu'aider tel ou tel secteur favorise l'économie dans son ensemble. C'est évidemment un sophisme. Toutes ces aides, répétons le inlassablement, ne créent pas de richesse. Non seulement elles ne font que la déplacer, mais elles la détruisent, en orientant les investissements vers des projets intrinsèquement non rentables, financés par des effets de levier tout à fait excessifs. Au final, elles conduisent à appauvrir les épargnants et le pays.

Nos gouvernants devraient, à la lumière de tels exemples, comprendre que leur potentiel de nuisance est infini, alors que leur capacité à créer de la valeur est proche de zéro: qu'ils se désengagent totalement de l'économie, avant qu'ils ne la ruinent totalement ! Qu'ils se consacrent enfin sérieusement au maintien de l'ordre public, tâche régalienne dont la prospérité est tellement dépendante, mais où les résultats obtenus depuis quarante années sont en chute libre. 

La défiscalisation est au logement ce que la cocaïne est à la fête en boite de nuit: euphorisante à très court terme, destructrice dans la durée. Pire, le risque de manque conduit le gouvernement à augmenter les doses quand le marché commence à mal tourner, aggravant le mal. C'est ainsi que lorsque le Robien s'essoufle, il faut lancer le Scellier, plus beau, plus fort, encore plus défiscalisé ! Mais l'acheteur n'a que peu de chances de s'en porter mieux, seuls les dealers gagnent à tous les coups.

Si vous pensez que les problèmes que nous créons sont fâcheux, attendez d'avoir vu nos solutions !

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(*) L'article du Figaro a le très bon goût de fournir une carte interactive des programmes Scellier qui arriveront sur le marché dans les deux prochaines années dans des villes où le locatif est atone: à FUIR absolument.



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