Re(cherche)

Plusieurs échanges récents avec des personnes liées à l'enseignement (collèges, universités, grandes écoles) pointent la chose suivante: ceux qui apprennent ne cherchent plus.

Au collège, et plus surprenant, à l'université comme dans certaines grandes écoles (écoles d'ingénieurs dans mes discussions): si l'information/la documentation recherchée n'est pas trouvée en deux clics (Google, Wikipédia), ils ne poursuivent pas et - plus inquiétant - la conclusion est "ça n'existe pas".

Un document ou une réponse à une question qui n'apparaît pas, n'existe pas.

Il serait peut-être urgent de souligner quelques petites choses.

Dans le désordre:

- Ce n'est pas parce que quelque chose ne se voit pas, qu'il n'existe pas (<- non, laissez Dieu de côté!). Tout n'est pas visible. Surtout sur Internet. Faut-il dire à nouveau que seule une infime partie "émerge" (le reste étant dans les grandes profondeurs). Qui plus est, ici, comme ailleurs, plus une chose est visible ... plus elle l'est! Comprenez: plus nombreuses sont les personnes à l'apprécier (la favoriser), plus elle est reprise et plus elle "émerge".

- Il est toujours intéressant d'aller voir se qui s'écrit dans les marges (pas marginal), les notes de bas de pages, les bibliographies, les à-côtés.

- Chercher et rechercher: c'est peut-être la différence. Le premier relève du "deux clics", le second d'une démarche et d'une méthodologie. Google search n'est pas Google (re)search, je sais bien, mais quand même.

- Rechercher: veut dire aussi, s'égarer, emprunter de fausses pistes, revenir en arrière, tâtonner, hésiter, recouper, travailler. La pertinence de la réponse "tout de suite" (Qui a la bonne réponse? Levez la main, ou cliquez, c'est selon) vs le cheminement et la construction.

- A l'école, faire un exposé, veut dire aujourd'hui: recopier Wikipédia (hier: recopier le dictionnaire et un Que sais-je?, peut-être). Que fait-on des méthodes d'interrogation, et de confrontation? Lorsqu'il vous semble avoir trouvé, non pas la "réponse" (justement) mais les éléments qui semblent composer un tableau satisfaisant, prenez du recul, regardez-le sous plusieurs angles. Remettez-le en question.

- Puisque nous sommes à une époque de conversation, n'hésitez pas à questionner les autres. La collaboration n'est pas "Qui peut m'aider à faire mon devoir?", mais "Que pensez-vous de tel sujet, que savez-vous de tel sujet?" (exemple volontairement scolaire). Et, in fine, qu'en pensez-vous vous même, surtout.

Cette constatation (les étudiants ne cherchent plus), est bien-sûr à relativiser. Il s'agit de pointer ce qui me semble être une tendance. Ne mettez pas ceci au compte d'Internet: oui, cet outil facilite les choses, mais (et il est de taille): encore faut-il avoir appris avant à chercher. Sinon, cela ne fera qu'accentuer les choses.

L'outil Internet (et le Web) s'ils sont bien utilisés peuvent alors être une plus-value: sources actualisées, archives, discussions. Au passage: ne pas oublier que chaque jour qui passe voit s'accroître la masse - colossale - des documents/ressources qui s'accumulent en mode numérique. Il faudra les stocker et savoir les retrouver. Selon quels critères sont-ils et seront-ils archivés? Qui sera formé à cela? Que sera ce qui doit être retenu, ou pas? Qu'est-ce qui est distingué, et pourquoi?

Rechercher n'est pas facile, n'est pas immédiat, et suppose souvent d'avoir consulté un nombre bien supérieur de sources et ressources, de les avoir questionnées, et d'en faire la synthèse.

Rechercher relève plus du cheminement et de l'observation, de la surprise (se laisser surprendre), de la remise en question. Mais, ceci est déjà autre chose.

Disons que, pour ce qui est de chercher, il faudrait peut-être songer à renforcer un peu plus l'apprentissage et la méthode auprès des jeunes générations, non?

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