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Et le dopage, merde ?

Publié le 07 septembre 2009 par Lben

Un internaute me demande de parler du Tri Nations et des résultats cet été. Même si ce blog a pris quelques vacances, je n’ai pas complètement dormi et j’ai suivi dès le mois de juin les différentes rencontres et notamment l’opposition entre les Lions Britanniques et l’Afrique du Sud. C’était quand même 3 tests matchs qui opposaient ce qui se fait de mieux en termes de joueurs avec, d’un côté, les champions du monde et, de l’autre, les meilleurs du Royaume-Uni. C’était effectivement à voir non seulement parce que l’intensité des combats a été énorme et des plus spectaculaire mais aussi parce que ce type de rencontres pourrait, malheureusement, avoir des répercussions sur l’avenir du rugby. Malheureusement ? Vous êtes étonné que j’emploie cet adjectif ? Explications…

La course à l’armement.

Cet été risque, pour moi, de marquer une évolution forte dans le rugby de ces prochaines années. Une évolution qui est déjà, depuis longtemps, dans la tête des entraîneurs, « c’est toujours les équipes avec la meilleure défenses qui l’emportent », mais qui, là, risque de passer à un niveau encore plus extrême avec une dimension physique qui prend le pas sur la technique et la tactique. En effet, la domination actuelle de l’Afrique du Sud m’inquiète pour les différents messages négatifs qu’elle envoie. Lorsque, en 2007, l’Afrique du Sud remporte la Coupe du Monde, au delà de la déception française, il y a quelque chose de sympa à voir cette équipe l’emporter avec des joueurs comme Habana et Steyn et l’espoir d’une équipe dont le futur semble passer par un meilleur équilibre entre avants et trois-quarts. Même si culturellement, génétiquement et stupidement, les Sud-Africains ont fait du défi physique l’élément central voire unique de leur approche du rugby, on peut, à la fin de la Coupe du Monde 2007, penser qu’ils vont naturellement évoluer pour se servir de la qualité d’une nouvelle génération de joueur et que l’ouverture sur le monde de ce pays depuis le début des années 90 va avoir enfin des répercussions positives même sur son rugby. Quelle déception de voir que ce n’est pas le cas. Pire même. Quelle déception de voir qu’ils ont même régressé dans leur approche avec une mise en avant de la dimension physique encore plus exacerbée depuis la Tournée des Lions.

Je n’ai pas de problème à ce qu’une équipe veuille s’appuyer sur la force pure de ses joueurs et axe son jeu sur ce qui a toujours culturellement été son code génétique. Au contraire. Avoir des disparités dans les styles de jeu et des expressions du rugby très différentes comme en France à la fin des années 80 l’opposition entre Toulouse, le jeu, et Toulon, le combat, me ravit. Non, ce qui me pose problème aujourd’hui, c’est la sensation que le rugby est en train de dériver vers une course à l’armement physique de plus en plus extrême sans que cela ne semble gêner qui que ce soit dans les instances dirigeantes ou médicales. Cela va avoir très vite des conséquences négatives sur la qualité du rugby pratiqué qui est en train de devenir uniquement un sport de combat collectif et plus cet équilibre entre jeu de balle et combat. Mais, pire cela va avoir surtout des effets dévastateurs sur la santé des joueurs. Entre la manière dont ceux-ci vont être obligés de se préparer physiquement et médicalement et la manière dont leurs corps vont subir des chocs de plus en plus dévastateurs par la vitesse et la puissance qui entrent en jeu, les conséquences sur leur santé, à court terme mais surtout à long terme, peuvent être dramatiques.

Le rugby comme le vélo des années 90.

Prenons l’exemple du football américain. Les lignes défensives sont composées de joueurs dont le physique moyen est de 1m90 pour des poids de corps oscillant entre 120 et 150 kg, les running back ont un poids de corps situé entre 90 et 100 kg et sont capables de courir le 100 m en un peu moins de 11 secondes. Et surtout les instances dirigeantes ne se sont jamais cachées de préparer « médicalement » leurs joueurs de manière à offrir le meilleur spectacle possible aux télévisions et aux américains. Le problème c’est que la moyenne d’espérance de vie des joueurs doit se situer autour de 55 ans. C’est un peu jeune pour mourir, non ???

Sans vouloir me montrer alarmiste, j’ai quand même l’impression que l’on n’a plus grand chose à envier à ce sport. Des joueurs de 1m90 et plus qui dépassent les 120 kilos, on commence à en avoir de plus en plus. Et ceux-là, en plus, arrivent à courir pendant un certain temps. Des joueurs de plus de 90 kg qui valent moins de 11 secondes sur 100 mètres, là aussi le rugby commence à être bien pourvu. Alors quoi ? Les joueurs de rugby auraient réussi naturellement de telles performances là où la plupart des autres sports sont touchés par le dopage ? On nous prendrait pas pour des cons, plutôt ? Il est difficile de voir les physiques évoluer, et pas seulement au niveau musculaire avec des structures osseuses qui changent, des visages, même, où les mentons se développent à des âges où la croissance est loin derrière, sans penser que certains joueurs sont passés d’une alimentation classique aux cocktails médicamenteux d’aide à la performance.

Vous me trouvez rapide à tirer des conclusions et à accuser sans preuve ? Mais vous croyez quoi ? Que le rugby n’est pas touché par le dopage comme tentent de le faire croire les instances de ce sport en faisant payer les lampistes une fois de temps en temps et en nous ventant les vertus de contrôles longitudinaux dont les critères sont de toute façon larges et les méthodes pour les contourner bien connues ? Il faudrait que les joueurs de rugby soient soit très intelligents soit très cons pour qu’il n’y ait pas de dopage dans ce sport ! Très intelligent pour penser que le dopage n’est pas bon pour la santé et présente trop de risques pour qu’ils soient tentés. Ou très cons pour ne pas y avoir penser alors que des produits donnent la possibilité de s’entraîner plus en souffrant moins.

Je pense que le rugby, à l’image de tous les sports, est touché naturellement par le problème du dopage et bien plus qu’il veut bien le dire. C’est normal et même naturel alors que l’on demande aux joueurs d’être de plus en plus performant et de s’entraîner de plus en plus ( voire même de jouer tous les 3 jours ). Ce serait même mieux pour tous le monde, les joueurs peuvent s’entraîner plus et les spectateurs profiter d’un spectacle de meilleure qualité. Le problème c’est que la santé des joueurs est ainsi mise en danger ( confer la moyenne d’âge de la mortalité des footballeurs américains au début de l’article ) et là on ne peut plus être d’accord et faire comme si de rien n’était. La politique de l’autruche n’a jamais mené nulle part, la preuve en est des séismes qui ont agité le cyclisme à la fin des années 90 alors que rien n’avait été fait pendant des décennies.

On pourrait penser que le dopage est un mal nécessaire pour aider le spectacle à être meilleur. Le problème c’est que lorsque l’on regarde un match comme le Brive – Clermont du 28 août 2009, on ne peut se satisfaire de ce que l’on a vu. Effectivement, le combat physique a été des plus intense. A tel point que les joueurs relâchaient les ballons sur le moindre impact tellement ceux-ci étaient violents et que personne n’osait passer la balle de peur de se faire découper par un plaquage. Résultat un match émaillé de fautes sans aucun intérêt en terme de jeu. Mais, bien sûr, comme vous le diraient si bien les instance qui dirigent ce sport, cette faiblesse technique n’est aucunement liée à une quelconque intensification de la course à l’armement vers un rugby de plus en plus physique. Ni d’ailleurs avec le fait qu’une partie du staff d’une de ces équipes était en place au moment où le médecin de ce même club a tellement fait de prescriptions médicales de produit normalement prescrits dans le cadre sportif qu’il en a été interdit d’exercer par l’ordre des médecins pendant une année. Bien sûr, cela n’est que divagation de blogueur en mal de sensation et le rugby est évidemment un sport sain puisque l’on n’arrête pas de nous le dire à grand coup de contrôle anti-dopage longitudinaux, transversaux ou verticaux. Mais, putain, y aura t’il un jour quelqu’un pour se soucier de la santé des sportifs ???


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