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L’autre dimension.

Publié le 09 septembre 2009 par Wilverge

L’autre dimension.
Lac Inle, Birmanie (Myanmar)
Les derniers kilomètres, malgré le terrain descendant, ne sont pas si faciles. Nos pieds en ont assez de marcher et je réussis même à me faire une ampoule en dessous d’un ongle faisant décoller ce dernier.
Mais peu importe, un trek n’en est pas un sans quelques ampoules mal placées. Ceci ne fait que confirmer la règle. Mes chaussures qualité Bangkok n’ont sûrement pas aidé, elles étaient pourtant jolies. Je n’en ai eu que pour mon argent!
Puis il apparaît, ce fameux lac. À première vue, ce n’est qu’un lac, rien à signaler. Mais en s’y promenant en pirogue, il n’a rien de banal. Il est grouillant de vie.
À commencer par les pêcheurs sur une seule jambe en parfait équilibre sur le bout de leur barque pagayant d’une jambe et lançant leurs filets à l’eau à deux mains.
L’autre dimension.
Les jardins flottants au travers des maisons sur pilotis. Ici, on ne fait pas du voisinage en parlant par-dessus la haie de cèdre mais, en barque.
Les artisans y ont aussi élu domicile. Il est possible de visiter les fabricants de textile de soie ou lotus, de bijoux en argent, de cigares ou de produits faits par les forgerons. Tout est fait à la main, à l’ancienne. Aucune technologie moderne. Un vrai travail de moine. On prend le thé un peu partout regardant les artistes à l’œuvre, toujours guidé par Sue.
L’autre dimension.L’autre dimension.
Cette dernière nous invite aussi chez elle, profiter des derniers moments dans ce charmant pays autour d’un repas typique.
L’autre dimension.
Poisson à la coriandre, lime et légumes, curry de bœuf, salade de fèves vertes aux arachides, salade de fèves germées et oignons, fruits frais, un vrai délice. La seule chose qui me trouble un peu est la coutume locale qui veut que l’hôte ne mange pas avec les invités et qu’en plus, toutes ses voisines et belles-sœurs sont venues nous regarder. Nous sommes assis par terre dans cette maison pratiquement vide de meuble à nous délecter pendant que toutes nous regardent manger en souriant à chacune de nos bouchées. Un petit « kondé! » suffit à les faire rire, et nous, on trouve ça bon.
L’autre dimension.
Quelle belle image de la Birmanie. Dans nos dernières chroniques, nous vous avons dépeint un pays riche en sourires et joie de vivre, mais, il revêt aussi un côté sombre en raison de son gouvernement qui n’est pas négligeable.
Comment vous faire un portrait global?
Maintenu dans l’ignorance, ce peuple qui selon l’UNICEF seulement 28% des élèves du primaire finissent leur scolarité dans des écoles au contenu académique pauvre, est complètement dépourvu. Ceux ayant la chance d’avoir de l’instruction comme les moines et certains citoyens des grandes villes se font réprimer par la junte en place.
Dans les rues, c’est craintivement que l’on nous parle politique. Toujours à l’affût, nos interlocuteurs désireux de nous faire connaître la réalité dans laquelle ils vivent risquent gros et s’enfuient à la moindre vue d’un étranger ou policier.
C’est qu’ici, les prisonniers politiques sont enfermés en grand nombre dans des conditions déplorables sans aucun soutien médical.
Certes, une constitution à déjà été écrite mais, suspendue depuis vingt ans, elle est toujours en « réécriture » et loin d’être terminée.
Forcer les gens à travailler sans les payer est normal pour le gouvernement en place : par exemple, pour restaurer les ruines afin de les ouvrir aux touristes…
Fournir des armes aux différentes ethnies dans le pays dans le but de les pousser à se faire la guerre civile l’est aussi.
Heureusement qu’il y a aussi des gens braves qui supportent leur pays comme Aung San Suu Kyi, fille du père de l’indépendance assassiné en 1947. Assignée à sa résidence depuis la victoire à 80% de son parti « la Ligue Nationale pour la démocratie » en 1990, elle continue de se battre et d’espérer malgré sa situation captive qui dure depuis maintenant 14 ans en tout et pour tout.
Il est difficile, pour nous vivant dans un pays démocratique, de voir que des dictatures si dures oppriment des populations entières. De comprendre comment des gens peuvent être assoiffés de pouvoir – et d’argent – au point de laisser son peuple mourir devant leurs yeux. De découvrir que ce même gouvernement, monté au pouvoir par un coup d’état, refuse l’aide humanitaire en cas de sinistre comme lors du cyclone Nargis en 2008, en retardant l’émission de visas aux ONG. En 2009, un an après, les sinistrés ne s’en sont toujours pas remis, sans compter les 100 000 morts et les épidémies encourues.
Ces quelques faits sont bien peu d’information sur une situation bien souvent ignorée par les gens. Moi-même, avant d’y mettre les pieds, je n’y connaissais pas grand chose.
Coupés du monde par un Internet censuré et quasi non disponible, une télévision et des journaux gouvernementaux, c’est en partie à nous, voyageurs, d’aller vers eux et d’être attentifs à leur situation afin que la Birmanie demeure le pays des sourires.
Je ne m’imaginais pas en achetant mon billet d’avion Bangkok- Yangon qu’un peuple me toucherait autant. Ils ont su par leur curiosité, ouverture et grande générosité me rejoindre et me donner envie d’en savoir plus. Ce peuple constamment, dans son histoire, envahi et contrôlé, demeure fier et la tête haute. Brisant la barrière touristes versus habitants, ils m’ont ouvert à une autre dimension du voyage. Je les en remercie.
- Nad plus sensibilisée.


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