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Numéro six

Par Liliba

Véronique OLMI

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Quatrième de couverture
La famille Delbast est catholique. Cinq frères et sœurs précèdent Fanny, qui est arrivée bien après les autres, sans qu’on l’attende et sans qu’on la souhaite. Petite fille solitaire, Fanny adore son père, mais il ne la voit pas. Trop de choses les séparent, trop de vie, de retenue aussi. A cinquante ans, Fanny lit les lettres envoyées du front par son père, qui lui dévoilent un jeune poilu pétri d’angoisse très différent de l’homme autoritaire qui l’a élevée. A la lumière de cette découverte, elle tente alors de trouver, auprès du veuf centenaire dont elle prend soin désormais, une place qui ne lui sera plus contestée. C’est avec une sensibilité remarquable que Véronique Olmi aborde le thème de l’amour filial comme prétexte à une critique subtile de la bourgeoisie catholique, et de l’insidieuse violence dont est capable ce monde bien-pensant

Voilà un petit livre qui ne donne pas envie d'être une dernière de famille dans ce milieu bourgeois étriqué, bien pensant et parfaitement hypocrite, renfermant bien au secret ses sentiments et ses pensées ! La petite Fanny, enfant non désirée et mal aimée ne réussit pas à trouver sa place dans la fratrie et à attirer l'attention de son père (ce père, ancien combattant, médecin réputé, catholique très pratiquant qui suscite l'admiration de tous) et l'amour de sa mère (qui, elle, ne regarde que le père). Elle grandit, solitaire avec cette souffrance qui enfle en elle, ce non-amour qu'elle ressent chaque jour un peu plus ; on se trompe même parfois de prénom quand on l'appelle ! Enfant, elle use de stratagèmes pour attirer l'attention de ce papa pour lequel elle est presque transparente, inexistante, elle va même jusqu'à vouloir se noyer, simule ensuite une maladie pendant une année entière et copie les attitudes de ses frères et soeurs en pensant que cela attirera l'amour sur sa petite personne... Mais rien n'y fait...

On ne sait pas très bien si Fanny extrapole tout ce qu'elle ressent ou s'il y a effectivement un manque d'amour vis à vis de ce dernier enfant arrivé sur le tard. Ou bien est-ce cette éducation rigide bourgeoise qui ne laisse rien passer des sentiments que l'enfant, plus sensible que ses frères et soeurs, ressent comme un manque d'amour cruel. Cette éducation qui fait qu'un père peut renier son fils si celui-ci a dérogé aux règles de bonnes conduites, et empêcher par racisme le mariage heureux d'une de ses filles ? Education qui a encore cours dans certains familles traditionnelles ou le paraître est bien plus important que l'être, où les sentiments sont honteux même s'ils sont purs, où l'on ne montre pas ce que l'on pense, où l'on fait bonne figure face à l'adversité...

Malgré toute cette souffrance accumulée, Fanny sera la seule, devenue adulte, à s'occuper de son papa, veuf et malade. Cherche-t-elleCherche-t-elle encore une reconnaissance, n'est-ce que du devoir filial ou bien veut-elle inconsciemment prendre la place de sa mère, la seule femme que cet homme ait jamais considérée ?

Voici une histoire belle et très triste. Le style de Véronique Olmi est un régal, tout en finesse, en non-dits, en retenue, et le texte en ressort avec d'autant plus de force, l'histoire est d'autant plus poignante qu'elle est sobre. C'est un cri d'amour désespéré que cette femme aura retenu toute sa vie entre ses lèvres, un cri pour remplacer les mots qui n'ont jamais été échangés entre eux, les mots d'amour jamais dits... Fanny vieillit mais s'est vouée à son père, elle est finira seule : "Je porte toujours ton nom. Tu me l'as beaucoup reproché. Je n'ai pas voulu quitter ce nom-là, emprunter celui d'un autre homme. Comment s'appelaient les autres hommes ? Je m'en souviens à peine. L'homme de ma vie, c'est toi."

Laure avait bien trouvé que "certaines pages sont d'une telle beauté qu'on les relit avec l'envie de les garder précieusement".


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