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Montaigne : « Que philosopher, c’est apprendre à mourir »

Par Argoul

Dans ce chapitre 20 du livre 1er des « Essais », Michel Eyquem de Montaigne est tout entier. Fils périgourdin d’une époque troublée, emplie de guerres de religion, il vécut de 1533 à 1592. L’œuvre de sa vie, sans préjuger du reste, fut de laisser témoignage. Ses réflexions constantes depuis 1571 sont ces « Essais » de l’âge mûr qui nous ravissent encore et nous font réfléchir. Il s’y est peint lui-même, avec ses contradictions de nature, son impuissance à trouver jamais la vérité comme à rendre bonne justice. L’homme n’est point dieu et l’existence sera imparfaite, toujours, autant l’accepter comme les Stoïciens y invitent. Les voyages confirment à Montaigne la relativité des choses, des mœurs, des jugements. Il n’est pas pessimiste, il se veut « sage ». Ce qui, en son esprit, signifie réfléchi, donc prudent :  tranquille et réglé. La raison, le bon sens, l’expérience, commandent de vivre et de bien vivre, et d’en tirer leçon. Ce pour quoi « philosopher, c’est apprendre à mourir. »

La Renaissance avait fait revivre l’antiquité, dans les âmes comme dans les œuvres. Et les livres étaient si peu répandus encore qu’on en possédait peu. Les érudits du temps les lisaient, les relisaient, les méditaient, en apprenaient par cœur des sentences, sans zapper sans cesse comme papillon de nuit. Ce chapitre commence donc par une citation de Cicéron. Nombre d’autres fleurs de rhétorique le parsèmeront encore.

Que dit donc Montaigne dans cet opus célèbre ?

· Que la raison naturelle ne vise naturellement qu’à notre contentement.
· Que vivre, c’est bien vivre, « en la vertu même, le dernier but de notre visée, c’est la volupté. »
· Que la mort est inévitable par le seul fait que nous soyons né : « faites place aux autres, comme d’autres vous l’ont faite. »
· Qu’il est donc vain de la craindre, puisqu’elle est inévitable. « Sortez de ce monde comme vous y êtes entré. Le même passage que vous fîtes de la mort à la vie, sans passion et sans frayeur, refaites-le de la vie à la mort. »
· Autant faire bonne figure et apprécier d’autant l’heure présente. « Que la mort me trouve plantant mes choux, mais nonchalant d’elle, et encore plus de mon jardin imparfait. »
· Nous ne savons ni le jour ni l’heure, attendons-les partout, car c’est ainsi que naît la liberté. « Qui a appris à mourir, il a désappris à servir. Le savoir mourir nous affranchit de toute sujétion et contrainte. »
· Faisons ce que devons, sans plus attendre, et ne regrettons rien : c’est ainsi qu’une vie sera bien remplie : « tel a vécu longtemps qui a vécu peu ». « Il gît en votre volonté, non au nombre des ans, que vous ayez assez vécu. » « Où que votre vie finisse, elle y est toute. »
· Le cours naturel des ans nous accoutumera à quitter l’existence insensiblement : « le saut n’est pas si lourd du mal être au non être (…) d’un être doux et fleurissant à un être pénible et douloureux » - de l’adolescence sensitive à la vieillesse percluse.
· « Il faut ôter le masque aussi bien des choses que des personnes », ce n’est que l’apparat horrifié et chagrin que nous mettons autour de la mort qui nous effraie. Or la mort est de nature, traitons-la naturellement.

Ce que je retiens de Montaigne ?

1. Le tragique : ce contre quoi vous ne pouvez rien, inutile de le craindre. C’est vain. Faites avec.

2. Le bien-vivre : « Si vous avez fait votre profit de la vie, vous en êtes repu, allez-vous en satisfait. (…) Si vous n’en avez su user, si elle vous était inutile, que vous chaut-il de l’avoir perdue, à quoi faire la voulez-vous encore ? »

3. La liberté fondamentale : qui sait que la fin est au bout, et l’accepte, fera de sa vie ce qui lui semble le meilleur. Sans préjudice d’un quelconque « dieu », d’une quelconque « loi », d’un quelconque « tu-dois ». Et ce « meilleur » sera celui de toute la tradition humaine sans laquelle il n’est rien.

Montaigne was a major French philosopher. He was born in the 15th century, period of civil war in France because of religion. The main opus of Montaigne is “Essays”. In the chapter 20 of the First volume, the philosopher explains how “philosophise is lesson to die”. You cannot do anything against death, so you have to accept it; during your life time, the better you have to do is to live for the best; with that way, you will be free. It is a lesson for our times.


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