Magazine Côté Femmes

Mais qui va garder les enfants ?

Par Theclelescinqt

Mais qui va garder les enfants ?

Je cherche un job depuis presque un mois; j'ai envoyé une cinquantaine de CV par mail. Un entretien à mon actif. J'attends la réponse cette semaine. Un job qui me prendra tout mon temps, pas payé des mille et des cents, un boulot qui ne m'emballe pas plus que ça; bref c'est la crise.

Peu d'offres, et des salaires ridiculement bas.

J'attends d'un jour à l'autre la goutte d'eau qui fera déborder le vase, genre :

"Cherchons mouton à cinq pattes pour mission à responsabilités, 22 ans, 10 ans d'expérience dans le secteur de la bergerie, premier prix de beauté à la ferme pendant cinq années consécutives, bêlements des cinq continents lus, écrits, parlés, 1000 euros bruts par mois ou herbage à disposition au milieu du reste du cheptel. CDD 3 mois. "

Je ferais mieux de m'occuper de mes blogs, tiens, ça serait susceptible de nourrir sa brebis femme plus vite qu'une espèce de recherche d'emploi.

Au départ, étant une littéraire pur jus, et ne possédant aucun gène comptatible avec ce qui fait actuellement tourner notre planète (les chiffres, l'export, le commercial, la vente,..), je me suis naturellement dirigée vers les jobs où j'aurais pu servir à quelque chose : correctrice orthographique (si vous voyez des fautes chez moi, fermez les yeux, merci), documentaliste, rédactrice, chargée de veille, assistante dans des secteurs culturels, etc.

Pas de réponse.

C'est mon conseiller de Verte-Ville Emploi qui a eu le fin mot : "Vous avez des réseaux ? Oui parce que les boîtes d'édition, presse, etc., y fonctionnent en réseaux..."

Non, moi je suis une personne normale, une va-nus-pieds issue du Poitou-Charentes, qu'est-ce qu'y me parle de réseaux ?

On ne peut pas tout faire dans la vie, quand on est issu d'un milieu craignos modeste, être la première personne de la famille à faire des études littéraires, se noyer dans les nouveaux-nés, retaper une baraque à ses heures perdues et grenouiller dans les partys, coctails, salons, publier des livres, faire une thèse, mettre 35 000 euros sur la table pour faire une formation "à réseaux", épouser un polytechnicien, faire la mannequin pour de grands couturiers, parler anglais sans avoir même les moyens de partir comme Erasmus, etc.

Il faudrait être raisonnable : ils feraient mieux d'interdire les facs de littérature et sciences-humaines à ceux  qui ne sont pas bien nés et qui néanmoins pensent que certaines choses ont une certaine importance dans la vie, comme la vivre par exemple.

Donc, j'ai fini par répondre aux annonces d'"assistantes commerciales et administratives". C'est bien ce que je pensais. On y a besoin de "minimum bac + 3" (ils peuvent faire leur marché, alors pourquoi se priver), pour des boulots qui il y a trente ans ne nécessitaient pas même un bac. Une aisance dans tous les logiciels que les propriétaires des boîtes eux-mêmes ne vont pas se casser le cul à manier est bien entendu requise. Il s'agit d'ailleurs la plupart du temps d'un CDD; il ne faudrait pas perdre les bonnes habitudes de précarité. On doit bien sûr avoir déjà travaillé un certain temps dans le secteur; ça tombe bien, j'aime bien mentir. Parce que sinon, c'est simple, pour décrocher un job en 2009, comme assistante tout du moins, il faut avoir testé dans une autre vie tous les secteurs du monde professionnel. Vous avez le droit de vous être arrêtée un peu pour élever vos enfants, mais attention, même au bout de cinq ans, vous êtes toujours "une vraie professionnelle". Votre mémoire est d'éléphant, vous dormez toutes vos nuits depuis toujours. En fait, vous n'avez pas vieilli. Vous êtes la Blanche-Neige des assistantes, en train de ronfler dans votre cercueil de verre tout en révisant électroniquement vos logiciels et vos procédures commerciales.

En fait vous êtes un robot, et ça tombe bien, car si vous n'avez pas besoin de manger, pourquoi vous payer ?

A part ça ces charmants boulots sous-payés (genre 1400 euros nets) pour des employé(e)s surformé(e)s (genre bac + 3/4) prennent pratiquement tout notre temps de veille : départ de la maison 8 heures retour 19 h 30, avec quatre mômes, bains et dîner à faire, ménage et repassage, comptes,.. sans parler des courses que je me demande où je vais caser.

Genre je me couche chaque soir à minuit sans m'être épilé un sourcil, épuisée et le portefeuille pas si garni que ça.

Et les mômes, c'est pas la peine de tomber malades, d'avoir besoin de parler à maman ou de penser faire autre chose qu'école/centre de loisirs de 8 h à 19 heures.

Mais qui va garder les enfants ?


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Theclelescinqt 5 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte