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Au bonneteau, à un moment, il faut lever le cornet !

Publié le 29 septembre 2009 par Jlhuss

La plupart des infos dont on nous abreuve, les plus polémiques ou provocatrices, nous cachent en fait des réalités tellement préoccupantes qu'il semble préférable à ceux qui décident de les rendre "inaudibles".Au bonneteau, à un moment, il faut lever le cornet !
Cette manière de gouverner les peuples n'est pas nouvelle; les facéties à la Clearstream ou "le nombre d'Auvergnats" peuvent masquer un moment les réalités, mais les réveils risquent d'être très difficiles.
La dernièreproduction signée Philippe Séguin dans le cadre d'une audition devant la commission du Parlement est évocatrice et n'a pas suffisamment retenu l'attention des médias.

"Nous avons dépassé les limites de la cohérence du système avec son environnement. Une remise à plat est devenue nécessaire"; "quand j'étais ministre des Affaires sociales, dans les années 86-87, la maîtrise comptable des dépenses de santé pouvait donner des résultats et faire faire des économies, mais maintenant les déficits sont tels et les besoins sont à ce point sensibles que c'est devenu impossible d'en rester à cette méthode"; "on peut faire tous les inventaires concernant les économies, il faudra activer le volet recettes"; " on cache les dettes, on maquille l'ampleur des déficits mais à un moment donné du bonneteau, il faut lever le cornet"; "beaucoup de réformes se sont perdues dans les sables"...

Pour la seule année 2008, c'est-à-dire avant que la crise ne vienne accroître les dépenses et réduire les recettes, le fameux trou de la Sécu s'élevait à 11,9 milliards d'euros. La dette cumulée s'établissait à 109,1 milliards. Du jamais vu. Le seul service de la dette s'élève à 7 milliards. Mais ces chiffres - alarmants - sont une aimable plaisanterie au regard de ce qui va se passer en 2009. Ces chiffres tellement énormes sont innapréciés du grand public; ils dépassent les capacités d'appréciation du plus grand nombre.

Selon Au bonneteau, à un moment, il faut lever le cornet !Eric Woerth, ministre du budget (ce n'est pas un opposant), le 15 juin, devant la même commission, ce "trou" de la Sécu doublera sous l'effet de la crise. Le chômage continuant à grimper, la masse salariale sur laquelle sont assises les cotisations ne va cesser de se réduire, ainsi les recettes sont en état de baisse prolongée.

Michel Rocard de son côté prévient : "J'ai la certitude que nous allons être confrontés à une quasi-stagnation pendant plusieurs années avec pour corollaire un chômage important. [...] Depuis 1990, les pays industrialisés s'échinent à retrouver la moitié des taux de croissance qu'ils connaissaient entre 1945 et 1975. Rien n'y fait. Il leur manque 8 à 9 % de part de salaires et de revenus de sécurité sociale dans le PIB pour pouvoir soutenir la consommation et donc la croissance.

En tout cas, l'audition du premier président de la Cour des comptes a une nouvelle fois montré le fossé qui se creuse entre la nécessité de faire face aux montagnes de dettes et la difficulté d'entamer des réformes forcément impopulaires. Pourtant il n'est question que d'un grand emprunt national.

Le rappel à la réalité délivré par Séguin devrait sonner comme un avertissement. L'examen des chiffres ne peut que relancer le débat, que cherche à occulter en partie le gouvernement, sur la conduite des finances publiques et sur la politique fiscale.

la Cour des comptes prévient : Souvent, "L'inflation est présentée comme un remède à l'endettement excessif des États. (...) L'impact sur les finances publiques ne serait pas aussi favorable que, par exemple, dans les époques d'après-guerre (...) Une partie des emprunts publics est désormais indexée sur l'inflation".

Enfin le marché de la finance est bien plus réactif qu'auparavant et les taux risquent de monter très rapidement si une reprise de l'inflation était anticipée. La dette des administrations publiques est à court terme pour environ 15% de son montant;elle en subirait aussitôt l'effet.

Philippe Séguin poursuit :

"On ne peut plus, en effet, se contenter de demi-mesures. Il faut certes lutter contre la fraude, réexaminer certaines réglementations obsolètes : on peut toujours " optimiser " le système existant, mais cela ne pourra suffire ni à résorber les milliards de dette accumulée ni à répondre à l'explosion des dépenses. Il faudra des mesures de plus grande ampleur, tant pour les retraites que pour l'organisation et le fonctionnement du système de santé. Ces mesures seront douloureuses pour beaucoup et seront, à n'en pas douter, impopulaires. Mais elles sont nécessaires si l'on veut sauvegarder au profit des générations futures le bénéfice de ce que nous ont légué ceux qui nous ont précédés.
On en vient même à penser que certaines des mesures ponctuelles mises en oeuvre ont eu, faute de vision d'ensemble, des effets contreproductifs, pour ne pas dire pervers. Que penser du report croissant de charges sur des mutuelles et des complémentaires, alors que l'on connaît le caractère antiredistributif d'une telle évolution ? Que penser également du réflexe consistant à faire porter sur le malade une charge croissante ? La logique de notre système était précisément d'organiser une solidarité entre les Français, entre les bien-portants et les malades, entre les actifs et les retraités." [...]

"Vous lirez dans le rapport que nombre de nos recommandations sont suivies
d'effet, complètement ou partiellement. Pour autant, plusieurs sujets examinés cette année, que j'ai brièvement résumés, révèlent souvent une forme de résistance, au fond assez naturelle contre les adaptations. Résistance des organismes, quitte à s'inventer, comme pour les centres d'examens de santé, d'étonnantes missions dans le cadre d'enquêtes de santé publique,
résistance des régimes qui défendent la spécificité de leurs missions même quand la réalité sociologique qui les fondait a disparu - comme aux mines - routine des procédures du contrôle médical qui empêchent, sous la masse des autorisations préalables, un ciblage qui pourrait être plus rentable... Ce qui est moins naturel, en revanche, c'est la trop grande passivité des tutelles et des décideurs, seuls porteurs de l'intérêt général, devant ces pesanteurs dont les coûts, additionnés, finissent par compter." [...]

"Dès lors, il peut paraître provoquant, dans le contexte médiatique actuel, d'insister sur la nécessité de restructurer les hôpitaux pour améliorer la sécurité sanitaire et pour accroître la productivité, ou encore d'affirmer que la remise en cause partielle des avantages familiaux de retraite est nécessaire. Il nous arrive parfois de nous sentir un peu isolés. Mais, comment justifier le report sur les générations suivantes du coût des inadaptations structurelles entre les dépenses, que nous n'arrivons pas à maîtriser, et les recettes, que ne voulons pas augmenter ?"

Les informations sont là, tout le monde peut s'en saisir et réfléchir, personne ne le fait véritablement (pas plus dans l'opposition qu'au pouvoir). Serait-il à ce point impossible de gagner les élections en disant la vérité et en en tirant les conséquences dans l'action ou les propositions ? Je crois malheureusement que la réponse est OUI ! Et ce syndrome de la peur touche tout le monde, majorité comme opposition; ce serait irréaliste de penser qu'il est réservé à ceux qui dirigent actuellement. Nous attendons toujours les propositions de ceux qui veulent une alternance dans ce domaine de la maîtrise de la dette : "la suppression du bouclier fiscal" n'étant qu'un artifice de plus.

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