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Aria Cantilena

Publié le 02 octobre 2009 par Porky

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A l'instar des articles concernant Jeanne au bûcher et les Carmina Burana, ce billet va s'écarter de l'opéra pour se consacrer à une cantate pour voix de femme et violoncelle : l'Aria Cantilena, extrait des Bachianas Brasileiras n° 5 d'Heitor Villa-Lobos.

S'il y a un chant de ce compositeur brésilien qui a été enregistré, c'est bien cet Aria Cantilena, une petite visite sur Youtube vous le prouvera amplement : on y trouve le meilleur comme le pire, et parfois des curiosités fort intéressantes comme l'interprétation par exemple de Frida Boccara, chanteuse française des années 70 qui n'a jamais réussi à « percer » vraiment. C'est dire que cette œuvre peut être chantée aussi bien par des artistes lyriques que par des chanteuses de variété (Joan Baez par exemple). Seul problème : il faut quand même avoir une sacrée voix, et chanter juste, parce que ce morceau vocal, soutenu uniquement par un violoncelle discret, ne permet aucune défaillance que l'accompagnement pourrait éventuellement masquer.

La difficulté de cet aria ne réside pas dans les notes aiguës : il n'y a aucune note « difficile » à passer et l'étendue vocale exigée n'a rien de redoutable. Par contre, ce qui l'est, redoutable, c'est de savoir contrôler et assouplir suffisamment sa voix pour donner à cette œuvre dont une grande partie se chante sans parole son rythme et son allure de mélopée. La mélodie se déploie comme une courbe somptueuse et mis à part le passage central qui comporte un texte, la voix doit suivre ces volutes musicaux sans faiblir un instant. Exercice périlleux qui demande une technique sans faille et, évidemment, une très grande sensibilité.

Le compositeur de cet aria, Heitor Villa-Lobos, né à Rio de Janeiro en 1887 et mort dans cette même ville en 1959 est l'auteur de très nombreuses œuvres, extrêmement diverses, qui vont de la symphonie à l'opéra en passant par le concerto, les ballets, les quatuors à cordes, des pièces pour piano solo, de la musique chorale adaptée de chants populaires, etc. et même une musique de film pour Hollywood. Son œuvre la plus célèbre et la plus populaire est Bachianas Brasileiras n° 5 d'où est extrait l'Aria Cantilena.

Ce musicien quelque peu autodidacte va découvrir l'univers musical grâce à son père et très jeune, va apprendre à jouer de la clarinette, du piano et de la guitare. Mais ce sont surtout les musiciens de rue qui vont déterminer sa vocation : s'enfuyant de chez lui à seize ans, il parcourt le Brésil et note ainsi, au hasard de ses rencontres, d'authentiques chants traditionnels brésiliens. Pour gagner sa vie, il joue dans les cafés et les restaurants.

Musicien résolument hors norme et bien décidé à ne jamais suivre les règles académiques (il disait « un pied à l'académie et vous êtes déformé »), il étudie quand même, après son voyage, à l'Institut National de musique de Rio de Janeiro. En 1915, il fait sensation à Rio en donnant un concert : cette musique nouvelle, résolument loin des « canons » classiques, provoque un engouement durable. Une bourse lui ayant été accordée en 1923, il fait un voyage à Paris et découvre la musique européenne. De retour dans son pays en 1930, il commence une carrière à la fois politique et musicale. Il est nommé directeur de l'éducation musicale de Rio. Il conçoit alors un système d'apprentissage de la musique qui sera suivi par des générations de Brésiliens ; ce système est avant tout basé sur la culture musicale brésilienne et le folklore. Un voyage aux Etats Unis dans les années 40 lui permet de faire connaître sa musique en Amérique du Nord où il obtiendra un certain succès populaire. Il composera même la musique du film Vertes Demeures, sorti en 1959, pour Hollywood.

A sa mort, en 1959, il laisse environ 1 000 œuvres (chiffre cependant à revoir à la baisse car il y a beaucoup d'arrangements et de réécritures de pièces précédentes) et sa célébrité au Brésil ne faiblira pas, de même que l'engouement pour sa musique, même auprès des jeunes générations pourtant élevées dans l'univers de la Samba.

Si la musique traditionnelle brésilienne est le fondement de ses œuvres, Villa-Lobos n'oublie cependant pas l'héritage européen et sa musique combine les influences européennes, celle de Bach en particulier, et le folklore brésilien.  

VIDEO : Une rareté, et un document exceptionnel : la cantatrice brésilienne Bidu Sayao chante l'Aria cantilena. C'est génial, tout simplement.

Pour l'entendre par Victoria de Los Angelès, magnifique elle aussi, cliquez ici.


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