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Découvrer un nouveau métier : Digital Planner

Publié le 07 octobre 2009 par Darkplanneur @darkplanneur

Cyroul-ascii Le Planning Stratégique évolue en une nouvelle spécialité : Le Digital Planning. Darkplanneur a interviewé pour vous, le plus célèbre des Digital Planners : Cyroul. Il vous dit tout, sur une nouvelle profession.

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Qu'est ce qu'un Digital planner

On voit fleurir, depuis peu chez les agences, de plus en plus de personnes qui s'auto-proclament Digital Strategist, Web Strategist ou encore Digital Expert. Des appellations diverses qui recouvrent le même métier que l'on va appeler Digital Planner (à ne pas confondre avec Digital Media Planner).
Ce métier se définit comme la capacité à rationaliser, organiser et utiliser la complexité des territoires digitaux (regroupant le web, l'internet mobile, mais également les consoles de jeux vidéos en réseaux, les objets connectés, etc.) dans un but de communication.
Car les territoires digitaux sont complexes et mouvants ; et ceux qui vous disent le contraire essaient de vous vendre quelque chose (certainement une campagne d'e-pub vite torchée). Les territoires digitaux s'organisent en effet autour de profils utilisateurs, d'évolutions technologiques, de nouveaux usages spécifiques à certains supports, d'évolutions et trouvailles marketing, mais aussi d'une culture endémique à Internet.
Il faut donc une compétence nouvelle pour prendre en compte toute cette complexité, l'organiser et l'utiliser. Ce metier est celui de Planner Digital, un métier qui s'est crée spontanément à partir du besoin émergeant des agences et des annonceurs de relativisation de l'ère numérique, un peu comme le métier de concepteur-ergonome de sites web s'est crée vers la fin des années 90 pour rationaliser la réalisation des sites web). 
Digital planner vs planner stratégique
Une définition simplifiée du planner stratégique pourrait s'articuler autour de la gestion de la complexité de la marque d'une part et de la société (les gens et les comportements) d'autre part pour la rendre utilisable  par un créatif publicitaire à des fins de communication.
Le Digital planner va, lui, gérer la complexité des territoires digitaux pour atteindre les mêmes objectifs; ce qui va lui demander des compétences différentes car les territoires digitaux ne sont pas du tout le reflet exact de la société.
Ainsi, partageant une base de connaissance commune concernant la compréhension des comportement et attitudes des individus, les compétences du Planner stratégique toucheront spécifiquement le monde réel (sociologie, psychologie, histoire, art, culture), alors que celles du Planner Digital toucheront les comportements numériques (memes internet, technologies, usages digitaux, cyber-culture ...).
Mais la plus grande différence entre les deux metiers est certainement le temps de réaction et de remise en cause des certitudes. Là où le Planner Strat a le temps de travailler sur des études quali ou quanti, où il a le recul historique pour juger de telle ou telle stratégie de marque,  et a la chance de pouvoir faire de s projections de comportement hautement probables, le Planner Digital est à poil, manquant cruellement de données stables (quand déjà elles sont fiables) sur les usages des internautes.
Les territoires digitaux sont effectivement constamment en mouvement. Qui aurait pu dire il y a 3 ans que Facebook allait devenir le premier SN en France ?
De nouveaux services se créent chaque minute pendant que d'autres meurent. Ceux qui survivent peuvent créer de nouveaux usages qui changeront la face d'internet ou pas. Qui peut savoir ?
Mais là où le planner strat peut réutiliser son expertise sur un sujet spécifique, le planner digital doit constamment réactualiser ses acquis, car 6 mois après, la même campagne sur le même sujet aura des effets différents.
Les talents indispensables du Digital planner

Mais d'où viennent donc ces stratèges digitaux, quelles écoles ont donc pu les former ?
Depuis quelques mois, dans les agences de pub, on peut constater une migration subite de certains Planners Stratégiques ou Directeur de clientèle web vers l'appellation de Planner Digital. Forcément les clients en font la demande, donc il faut bien leur montrer que l'agence se modernise, et autant le faire avec les ressources internes : de la création de valeur facile par le biais d'une promesse uniquement sémantique.
Alors le Planner Digital viendrait-il du commercial ou du stratégique ?
Certes, non. Le planner digital n'est pas un publicitaire qui a un compte Facebook et qui envoie à son agence des liens YouTube tous les jours (et qu'il qualifie de veille Internet) et ce n'est pas non plus le métier d'un redac pub qui fantasme depuis des années sur des opés virales.
Tant pis pour l'agence, trop contente d'avoir trouvé, pas cher, quelqu'un qui peut leur expliquer ces appellations abscons que sont SEO, Twitter, Flickr... Car la seule véritable compétence que ces "planners digitaux" peuvent avoir est leur capacité commerciale, car ils ont bien su se vendre. Je n'en dirais pas autant du produit de l'annonceur, car ce n'est certainement pas eux qui vous parleront de blackhat way, de Web Squared, des possibilités publicitaires du XUL ou du potentiel média des MMO F2P. Et pourtant toutes ces techniques permettent de faire de la pub (même si j'éviterais le blackhat si j'étais vous).
Donc non, le planner digital ne se trouve pas dans une agence de publicité, le planner digital ne se trouve qu'à un seul endroit : sur les territoires digitaux. Le planner digital est un individu qui doit avoir une présence (encore) active sur Internet. Quelqu'un qui a une dizaine de pages de résultats quand on googe-lise son pseudo ou son nom.
Mais comment savoir quelles sont les compétences indispensables à cet activiste numérique ?
J'avais écrit il y a un an un article sur les 10 compétences idéales du planner digital (savoir faire, culture internet, culture e-marketing et enfin, pédagogie.
Le  savoir faire
Le DP a besoin d'une culture technique indispensable nettement plus poussée que le quidam lambda. Et la meilleur façon d'apprendre c'est de faire. Un prétendant au rôle de digital planner qui n'a jamais rien fait sur Internet ne sera qu'un très bon commercial. Et oubliez le profil Facebook; c'est bon, même ma mère en a un.
Pour une agence, la meilleure façon de vérifier le passif web d'un prétendant Planner Digital, c'est donc Google : "c'est quoi votre pseudo ? Et votre site ?".
La culture internet
De plus en plus de campagnes de pub sont basées sur les memes Internet, des parcelles de culture endémiques au web. On peut y trouver des pratiques spécifiques comme le Unboxing (déballage) ou encore des succès médias mondiaux comme Susan Boyle ou le Starwars kid. Des phénomènes qui débordent de plus en plus des territoires digitaux pour envahir l'IRL (la vraie vie quoi).
Une excellente culture internet est donc indispensable pour pouvoir utiliser ou rebondir sur parcelles de culture.
La culture e-marketing
Votre client n'a que 120 K pour sa campagne ? Le bon vieux publicitaire de base va lui proposer une campagne de bannière avec un site flash, une appli Facebook ou même une campagne virale parce que c'est à la mode. Le digital planner sérieux, lui ne travaillera pas sur la notion floue de "buzz" (notion qui n'enrichit que les agences de pub et certainement pas les annonceurs), mais sur de véritables objectifs de communication qu'il atteindra en en concevant des dispositifs mélangeant bouche à oreille, e-influence et e-publicité classique.
Mais il ne pourra dresser cette stratégie optimale que s'il a de sérieuses notions de e-marketing. Il doit en effet savoir combien coute une bannière de pub, un réseau d'affilié, une campagne d'adwords. Il doit aussi connaître la notion de KPI (indicateurs de performance) Car l'argent et les ressources sont au coeur des dispositifs digitaux, obligeant à faire des choix stratégiques.
Mais le digital planner doit savoir parler budget mais également "marque". Et c'est là qu'intervient le travail en collaboration avec le planner stratégique, qui lui sera garant de la marque et de son histoire, alors que le planner digital lui sera le véhicule. Hélas, les planneurs stratégiques sont encore trop souvent absents des stratégies Internet (par peur, ou par manque de ressources).
Pédagogie
Savoir faire et savoir expliquer sont les 2 compétences indispensables du planner digital. Il est là pour représenter et expliquer la complexité à ceux qui ne sont pas dans le digital mais qui vont savoir (et souvent mieux que lui) parler d'une marque ou inventer des concepts publicitaires. Il doit donc avoir des compétences pédagogiques poussées, ce qui implique d'une connaissance pointue de son sujet, partant de l'adage: on ne peut bien expliquer que ce que l'on connait bien.


La bible du digital planner

Pour essayer de me faire passer pour un professeur d'université respectable, je devrais citer Rules for Revolutionaries (2000, Guy Kawasaki), All Marketers Are Liars (2000, Seth Godin), No Logo (2002, Naomi Klein), et le fameux Netocracy — The New Power Elite and Life After Capitalism (2000, Bard & Söderqvist).

De bonnes références bien sérieuses... Ah, et il manque le grand Whole Internet User's Guide and Catalog (1992, Ed Krol) sans lequel cette liste ne serait pas complète. Quoi ? Il date de 92 ? Et alors ? Le pavé soit-disant de référence que vous venez d'acheter sur le e-marketing sera obsolète dans 6 mois (sauf si c'est une traduction française et dans ce cas là, il est déjà dépassé).

Le digital planner doit constamment remettre en question ses dogmes et théories. Il doit être capable de s'adapter, de changer de point de vue en fonction des usages des internautes. Il doit lire (et même tester) toutes les nouvelles théories, nouvelles approches et solutions e-marketing ou technologiques qui sortent sur la toile. Elles seront de toutes façons analysées, disséquées, critiquées bien avant d'être imprimées et distribuées en librairie. Et à ce moment, elles seront peut-être déjà obsolètes. Oui, le Digital Planner passe son temps sur les territoires digitaux, mais ce n'est pas un métier, mais un sacerdoce.

La seule bible du digital planner devrait peut-être être le Yi Jing (le livre du changement) ?

Quel type d'agence pour le digital planner ?

Avant de regarder le type d'agence, il peut être interessant de regarder l'environnement idéal pour travailler. Par expérience, je sais que le digital planner doit travailler au coeur de ses pairs. Le digital étant tellement complexe que je ne vois pas comment on peut être expert en tout. Le travail en commun est donc indispensable à la fois pour profiter des retours d'expérience de ceux qui font les campagnes, mais aussi pour être sans cesse stimulé intellectuellement par d'autres passionnés. Le territoire digital est infini, on ne peut être partout, autant avoir plusieurs yeux. Et puis, comment faire un taff créatif et innovant dans un environnement constament mouvant qu'en s'éclatant à le faire. Oui, l'ère du funky business (2000, Ridderstrale et Nordstrom) est revenue, pourvu que ça dure.

La pire configuration pour un Digital Planner est de se retrouver coincé dans une agence de publicité qui imagine s'y connaitre (ayant lu le dernier Stratégies sur la question) et qui va exiger de lui des marges au moins aussi grandes que celles réalisées sur le print et la TV, et en utilisant les ressources internes de l'agence (créatives et techniques).  Mettez un Planner Digital là dedans et il deviendra fou (ou au moins extrêmement malheureux).
J'ai vu des campagnes à 5000 euros mieux fonctionner en terme que des campagnes à 60 Ke (hors média en plus). La raison ? La marge abusive de l'agence (une agence qui se fait 50 à 60% sur un site web, ça se voit) qui transforme la strat digitale en strat commerciale. Ce qui ne signifie pas que le digital ne coute rien. Mais avec 3 personnes digitalement compétentes, un digital planner est capable de mettre en place une campagne d'e-influence en 3 jours. Quelle agence de pub peut se targuer de faire de même sur de la tv ou du print ? Comptez le nombre d'aller-retours, d'intermédiaires, (stagiaires, dcp, chef de groupe, directeur de clientèle, directeur conseil, directeur de création, boss, etc.), de réunions de validation, ...

Alors comment parler de GTD, de développement agiles, voir de campagnes de pub iteratives dans ces boites qui travaillent de façon quasi-administratives? Non, ce n'est définitivement pas l'endroit idéal pour un Digital planner et je pense qu'il n'y a que 3 types de structures d'accueil idéales possibles pour lui.

  • L'agence qui n'y connait rien en digital, qui le sait et qui le dit mais qui en a besoin, car ses clients en veulent. Cela permet au Digital Planner d'obtenir une certaine autonomie budgétaire, mais aussi stratégique. C'est le cas en ce moment de beaucoup de boite de RP qui décide d'intégrer la dimension digitale dans leurs stratégies en dépassant le cadre des traditionnelles opérations RP blogueur. Partant de zéro, ces agences préfèrent s'entourer convenablement dés le départ. 
  • La grosse agence de publicitdique ce é qui a compris que le digital nécessite une structure souple et adaptable et qui crée un Think tank spécialisé dans les stratégies digitales. Là, le Digital Planner  sera comme un poisson dans l'eau, entouré par des collaborateurs aux profils similaires ou complémentaire. Il reste que ce pôle spécialisé doit être constamment challengé pour ne pas devenir obsolète au bout d'un an.
  • Sa propre structure spécialisée. Pourquoi croyez-vous que les petties agences de consulting web se multiplient en ce moment ? Parce que les deux structures précédentes sont extremement rares et que l'alternative est d'aller faire le commercial en agence de publicité (ce qui n'a rien à voir avec le métier de digital planner). Alors le Digital Planner va monter sa boite pour faire des stratégies digitales intéressantes. Pas le choix.


Il est évident que cet état va changer. Les annonceurs n'étant pas idiots, ils vont vite s'appercevoir qu'ils ont le même niveau en digital que les agences de publicité. Ils vont donc naturellement se tourner vers des structures spécialisées et expertes, ce qui va donc forcer les agences de publicité à vite s'adapter. Certaines le font déjà, mais pas forcément dans le bon sens, en embauchant des planners digitaux inappropriés.

Alors pour éviter ces erreurs, je vous propose un petit quiz qui permettra de vérifier vos compétences en tant que planner digital.


Le quiz du digital planner
Répondez aux questions et additionnez vos points.
Sauf mention contraire, vous pouvez cumuler plusieurs réponses.
A la question "qu'avez-vous fait sur Internet" vous répondez ?
a- Heu, j'utilise FB tous les jours... Ah et j'ai MSN ! (5 pts)
b- Un compte Twitter avec au moins 20 followers (5 pts)
c- J'ai un profil Myspace et Facebook, et même un ziki ou plaxo ou un autre. (10 pts)
d- J'ai un blog sur une plateforme de blog du genre wordpress, blogger, ...  qui fait bien ses 5 visites par jour (15 pts)
e- J'ai un blog hébergé par moi même qui fait bien ses 30 visites par jour (30 pts)
f- un compte Twitter avec au moins 700 followers (45 pts)
g- J'ai plusieurs blogs, sites ou forums qui fonctionnent dont certains avec du adsense, oui monsieur (50 pts)
h- J'ai déjà programmé un site en php+html, accessible WAI et utilisable (50 pts)
A la question "quelle culture web avez-vous ?" vous répondez ?
a- Je lis mon Facebook tous les jours... et aussi les news de mon provider Orange, free, ou autre... (5 pts)
b- Je suis régulièrement 30 blogs  et je suis abonné à 15 newsletters et mailing-list diverses. Ah, j'adore tester les jeux-concours organisés par les marques. (15 pts)
c- J'ai un netvibes qui contient 4 onglets d'environ 10 flux RSS chacun. (30 pts)
d- Je joue à des MMO et/ou à des FPS sans me faire massacrer ni traiter de noob (35 pts)
e- Je connais 5 quote de chuck norris par coeur, la chanson internet people, la liste des téléphones mobiles du top 10 marketing de Wikio, la choré de Matt de where the hell is he. (45 pts)
f- Mon Netvibes est dispersé sur 6 pages thématiques, chacune contenant 10 onglets d'une vingtaine de flux et applications. (50 pts)
A la question : "Votre client à 120 Ke pour faire sa campagne de e-pub, que faites-vous ?" vous répondez (une seule réponse):
a- Pas de problème, une bonne vieille campagne bannière à 100 Ke et un mini site à 20 Ke (5 pts)
b- Une campagne et une application Facebook pour concourir avec vos amis (10 pts)
c- Une campagne media à 60 Ke et un advergame (10 pts)
d- Un jeu concours à gratter avec de belles dotations et une campagne d'affiliation (5 pts)
e- Un jeu MSN avec le pack tout en un (10 pts)
f- Un super blog avec des widgets qui tuent et 60 Ke d'achat média (5 pts)
g- Je demande quels sont les objectifs précis de la campagne et je valide les KPI avant de proposer une stratégie. (70 pts)
A la question : "Quels enseignements pourriez-vous dispenser ?", vous répondez :
a- L'email à ma copine/mon copain (5 pts)
b- La sécurité Internet mon petit-frère (10 pts)
c- Facebook à ma mère (20 pts)
d- Les blogs, comment ça marche (30 pts)
e- L'histoire d'internet, d'arpanet et des protocoles IP (40 pts)
f- Les wiki, les réseaux sociaux, et les services de folksonomie (50 pts)
g- La gestion de l'e-reputation d'une marque et la nécessité du personnal branding (60 pts)

Résultats :

Moins de 70 pts : vous rigolez ou quoi ? Et vous voulez expliquer aux gens comment faire pour communiquer sur Internet ? Vous avez tout appris le web dans Strat et Cb news ou quoi ?
70 à 120 : Ne me dites pas que vous ne passez que 8 heures par jour sur Internet ?
120 à 200 pts : va falloir bosser encore un peu. Et pourquoi vous ne vous feriez pas un petit blog, ça vous mettrai les mains dans le cambouis. Et puis pourquoi ne pas analyser sérieusement quelques campagnes loupées pour éviter les bêtises de e-marketing.
200 à 300 pts : vous y êtes presque. Il vous manque un an d'experience et encore un peu de curiosité. L'exploration et l'expérimentation doivent être les 2 activités principales du planer digital, alros explorez et testez. Quelques erreurs vous feront de l'expérience en plus.
plus de 300 : qu'est ce que vous attendez, vous êtes la pooule aux oeufs d'or des agences du futur. Mais n'arrêtez jamais d'explorer et d'expérimenter, sinon vous retournez à la case départ.
Cyroul :
Co-fondateur et gérant de Curiouser, société de marketing digital un peu particulière travaillant pour des agences de communication et des annonceurs qui veulent des stratégies digitales intelligentes. Associé du groupe Enjoy, et professeur stratégies digitales (E-marketing et publicité interactive) au CELSA (La Sorbonne, Paris).
http://www.cyroul.com

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