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L’ombre des mots: Günter Grass et Gao Xingjian

Par Elisabeth1

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Rencontre de deux prix Nobel de Littérature, au musée Würth, non pas par la plume, mais par les pinceaux. Ils dialoguent avec bonheur avec les peintures à l’encre de Chine de Gao Xingjian et les aquarelles de Günter Grass.
Ils peuvent cependant être qualifiés, l’un comme l’autre, d’artiste total, mêlant dans leur pratique, l’écriture, la peinture, la réalisation cinématographique (Gao Xingjian) et la scultpture (Günter Grass).


Le Musée Würth France Erstein reprend un choix de tableaux de Gao Xingjin, déjà exposé au Musée Würth La Rioja en 2008, mais élargit le concept de l’exposition en opposant l’oeuvre délicate et minimaliste de Gao à une sélection des grands cycles d’aquarelles et de dessins à l’encre de Günter Grass appartenant à la Collection Würth – déjà vues au musée Würth d’Arlesheim , en 2008, sont magnifiées sur les cimaises d’Erstein - fait qui a bien entendu largement contribué à l’idée de cette mise en parallèle.

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L’exposition « L’ombre des mots » propose donc un dialogue entre deux artistes d’abord connus pour leurs travaux littéraires mais qui revendiquent chacun une pratique picturale. Cette peinture a toujours été intimement liée à leur plume ; pour Gao Xingjian, elle prend le relais sur les mots lorsque ceux-ci s’essoufflent. Son travail est une quête intérieure, un langage pictural, un rêve éveillé, qui fait défiler lorsque l’on ferme les yeux, des personnages qui traversent leur vie, malgré les difficultés, avec espoir, reflets d’ombre et de lumière, lumière partout et toujours présente, exprimant la pensée positive qui anime l’artiste.


Tandis que pour Günter Grass, elle naît du même geste graphique. En s’affranchissant de l’écriture pour accéder à la forme peinte, le premier sépare rigoureusement les deux moyens d’expression, tandis que le second noue les deux disciplines l’une à l’autre, aussi bien dans le processus de création que sur la feuille de papier.
Cette rencontre au Musée Würth France Erstein se propose de faire découvrir sous un angle inhabituel le travail plastique de deux auteurs, à la fois poètes, romanciers, peintres et hommes de théâtre.

En août 2006, Günter Grass a révélé son enrôlement en octobre 1944 dans les Waffen-SS après avoir prétendu auparavant avoir servi dans la Flak. Cette divulgation tardive, faite quelques jours avant le lancement de son dernier livre autobiographique: Pelures d’oignon (Beim Häuten der Zwiebel), a suscité malaise et incompréhension en Europe. Elle a été à l’origine d’une controverse entre intellectuels européens, certains d’entre eux considérant que cet aveu lui ôtait son statut de caution morale, d’autres au contraire pensant que cette sincérité, même tardive, ne faisait que renforcer sa légitimité.

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Pendant la Révolution culturelle (1966 à 1976),Gao Xingjian est envoyé en rééducation dans les campagnes des provinces de Jangxi et Anhui, et il est obligé de brûler les manuscrits qu’il a déjà écrits (environ trente kilos de papier). C’est à la campagne qu’il s’imprègne de la tradition de transmission orale. Cet environnement lui paraît plus permissif et plus créatif que le Nord, trop marqué par le confucianisme. En 1975, il repart à Beijing pour reprendre ses activités professionnelles. Le Parti a toujours besoin de gens qui maîtrisent une langue étrangère, mais Gao se sent surveillé et décide de brûler les pages qu’il vient de réécrire, c’est-à-dire à peu près un million de signes.

 Lors de la rencontre avec l’artiste, ni moi, ni personne n’a osé soulevé cette antinomie. Gao a simplement évoqué une courte rencontre informelle avec Günter Grass.

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