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S’emplir les poches même quand tout va mal

Publié le 26 octobre 2009 par Jeangagnon

Mercredi, 21 octobre 2009

Dans le journal La Presse de samedi dernier, on retrouvait un texte fort intéressant du journaliste Francis Vailles qui faisait part d’une proximité dérangeante au sein des conseils d’administration d’Air Canada et de sa société-mère ACE Aviation. Il expliquait que la présence de certains individus sur ces conseils d’administration soulèvent des questions d’éthique.

Voici pourquoi. En avril dernier, Colin Rovinescu devient PDG d’Air Canada. Il démissionne alors de son poste de président de la firme de courtage Marchés de capitaux Genuity qu’il a fondée 5 ans plutôt avec David Kassie. Celui-ci lui succède à la tête de Genuity. Quelques mois plus tard, Kassie est nommé au conseil d’administration de ACE Aviation.

Ce n’est pas la première que David Kassie se retrouve dans l’actualité. En effet, c’est lui dirigeait la division de la Banque CIBC, Marchés mondiaux CIBC, qui a été condamnée en 2003 à payer quelques milliards en pénalité pour avoir aidé la société américaine ENRON à créer des montages financiers qui se sont avérés frauduleux.

La semaine dernière, Air Canada procédait à une émission de nouvelles actions d’une valeur de 287 millions. Le principal courtier retenue pour gérer cette émission, opération qui rapportera entre 3 et 5 millions au courtier, vous l’aurez deviné, a été Genuity.

L’autre principal courtier associé à l’émission d’actions est Valeurs mobilières TD. Elle aussi a son représentant au conseil d’administration de ACE Aviation, soit Robert McLellan.

Le cabinet d’avocats Stikeman Elliot a aussi des représentants sur les deux conseils d’administration, soit Marvin Yontef chez ACE Aviation et Jean-Marc Huot sur le conseil d’Air Canada. Stikeman Elliot agissait comme conseiller juridique pour la rédaction du prospectus relatif à la dernière émission d’actions.

Et l’on croyait avoir fait du chemin en ce qui a trait à la gouvernance d’entreprises au cours des dernières années.

Mais doit-on s’étonner de retrouver ce genre de situation chez Air Canada ?

Air Canada est censée être le transporteur aérien national canadien. Mais en réalité, elle n’a été au cours des dernières années qu’une boîte à ingénierie financière qui a permis à certains de faire une fortune, en conduisant toutefois la compagnie à nouveau au bord de la faillite. Celle-ci a perdu à la fois la confiance de ses employés dont l’avenir demeure incertain, et de sa clientèle.

Voici comment on s’y est pris pour s’emplir les poches. En 2003, Air Canada s’est placée sous la protection de la faillite. Elle en a émergé en septembre 2004, restructurée en une société de gestion appelée ACE Aviation, dont les actifs, en plus d’Air Canada, comprenaient le programme de fidélisation Aeroplan, et le transporteur à rabais JAZZ Aviation, actifs que l’on avait réussi à soustraire à la faillite. Un des principaux actionnaires de cette nouvelle société de gestion était le hedge funds américain Cerberus Capital Management. Le président d’ACE Aviation était Robert Milton, celui-là même qui était président d’Air Canada depuis 1999 et qui l’avait conduit à la faillite.

En quelques années, sous la direction de Milton, ACE Aviation a vendu Aeroplan et JAZZ, profitant de la popularité des fiducies de revenu pour obtenir un bon prix. Cerberus et les actionnaires de ACE se sont enrichis, bien sûr. Mais aussi Robert Milton. Selon Derek DeCloet, du Globe and Mail, Milton a touché 39 millions en bonus en 2006 et 2007, principalement pour avoir orchestré ces ventes d’actifs. 

Aujourd’hui, ACE n’a plus qu’Air Canada comme actif. Aussi bien dire qu’elle ne vaut plus rien. Selon plusieurs analystes, et c’est également mon impression, le transporteur se dirige droit vers un autre atterrissage en catastrophe.

Robert Milton est toujours président du conseil d’ACE Aviation, mais son contrat d’emploi a été récemment modifié. Il sera dorénavant payé à titre de consultant, et recevra 270 000 $ par année pour 40 jours de travail. S’il fait du temps supplémentaire, il gagnera 8 000 $ par jour. Il a reçu une indemnité de départ de 7,2 millions.

Quant aux employés d’Air Canada, ils ont déjà consenti des diminutions de salaires importantes, et leurs fonds de pension sont en déroute. Quel gâchis.


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