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Le combat des livres - Jour 2

Par Fibula
Aujourd'hui, Christiane Charette est de retour de sa bronchite. Elle semble jubiler à l'idée de présenter le premier round du combat des livres...
Sa recherchiste rappelle l'importance du site Internet de Radio-Canada, sur lequel on peut trouver photos et entrevues des panélistes. On peut également donner nos propres arguments pour aider les combattants ou juste les encourager.
Le site du combat des livres ici.
Un tour de table des panélistes :
- Emmanuel Bilodeau défend La fabrication de l'aube de Jean-François Beauchemin, prix des libraires du Québec 2006, «Prix des libraires du monde».
- Janette Bertrand défend Borderline de Marie-Sissi Labrèche, «un livre extraordinaire et pas cher».
- L'Abbé Raymond Gravel défend Mistouk, de Gérard Bouchard, «Il parle de nous là-dedans».
- Brendan Kelly défend Parfum de poussière de Rawi Hage, «le meilleur livre selon moi».
- Esther Bégin défend Vandal Love ou perdus en Amérique, de D.Y. Béchard, «un des livres les plus achevés que j'ai lu».
Le livre que les panélistes veulent éliminer aujourd'hui :
Emmanuel Bilodeau : Mistouk
Janette Bertrand : Vandal Love
L'Abbé Raymond Gravel : Vandal Love
Brendan Kelly : Mistouk
Esther Bégin : Mistouk
Je n'aurais pas pensé que Vandal Love se retrouverait au premier tour des éliminations.
L'argumentation peut commencer, Esther Bégin face à l'Abbé Raymond Gravel !
Esther Bégin pense que Mistouk de Raymond Bouchard a d'énormes qualités historiques mais l'auteur n'a aucune qualité de romancier. L'écriture est très serrée, très compacte, elle a eu l'impression de lire une thèse de doctorat. Elle a comparé l'écriture de Gérard Bouchard et de D.Y. Béchard en lisant des descriptions de combats de boxe, que l'on trouve dans les deux livres. «Il n'y a pas cette poésie et ces émotions dans Mistouk».
L'Abbé Gravel se défend en disant qu'il pense qu'on élimine son livre parce qu'il est trop long seulement. De son côté, il a été transporté par le livre. Esther Bégin pas du tout.
Brendan Kelly soutient Esther Bégin. Il a cherché des «zones grises» dans Mistouk, mais n'en a pas trouvé, alors que c'est ça qu'il aime. Il a trouvé le livre intéressant comme histoire, mais pas comme roman.
Janette Bertrand, de son côté, défend l'Abbé en disant que «l'on compare des oranges et des bananes» (Mistouk face à Vandal Love). Elle s'est identifiée au livre Mistouk, car quand elle lit un livre, elle aime s'identifier aux personnages.
Emmanuel Bilodeau, quant à lui, n'a pas été «transporté ni emballé» par Mistouk.
Cette première partie du débat ouvre des questions sur ce que l'on recherche dans un livre. Certains aiment s'identifier aux personnages, d'autres s'attachent plus à la poésie, au style, à la folie de l'histoire. Ce débat existera toujours, évidemment, car comme le précise Janette Bertrand, chacun lit «avec son vécu, avec sa vie. Le lecteur est subjectif»
Brendan Kelly renchérit en disant que Mistouk et Vandal Love abordent tous deux une même thématique (la fuite) mais d'une manière totalement opposée.
Esther Bégin reprend l'importance pour elle de vivre une expérience littéraire, artistique en lisant un roman. «Doit-on tout comprendre ? Est-ce que l'auteur doit prendre le lecteur par la main pour le mener d'un point A à un point D en passant par B et C dans l'ordre ?»
«C'est un fouillis ce livre là (Vandal Love). J'ai dû reprendre la lecture au début quand j'ai commencé la deuxième partie», précise l'Abbé Raymond Gravel.
On voit bien dans ce débat que l'Abbé Raymond Gravel et Esther Bégin ne recherchent pas du tout la même chose dans un roman. Le débat est donc un peu stérile...
Mais Raymond Gravel poursuit avec un argument sorti de nulle part ! «C'est une famille de fuckés! Ça ne me rejoint pas du tout...» dit-il en parlant de la famille Hervé Hervé, imaginée par D.Y. Béchard dans son livre.
Esther Bégin réplique que dans Borderline aussi, ils sont fuckés... Mais pour l'Abbé Raymond Gravel, tout se tient mieux dans Borderline...
Le débat pourrait sérieusement déraper. Encore plus quand l'Abbé réplique que Brendan Kelly n'aime pas Mistouk parce qu'il est anglophone... (le livre parle de la colonisation du Saguenay)
Il n'en fallait pas plus pour allumer la mèche du journaliste. «Je ne veux pas de bataille des Plaines d'Abraham. Je viens de Glasgow, j'ai immigré au Québec, à Montréal, et j'aime Vandal Love plus que Mistouk, point.»
C'était le mini scandale du jour.
Janette Bertrand explique que l'on lit aussi avec ses tripes.
Emmanuel Bilodeau conclut : «J'aurais dû aimer Mistouk plus que ça, mais je n'ai pas été bouleversé. J'ai été plus séduit par Vandal Love, par le style.»
En conclusion, Christiane Charette demande aux deux personnes mises en danger de faire un dernier discours pour défendre chacune leur livre, avant la décision finale.
L'Abbé Raymond Gravel : « Je n'ajouterai rien car je sais que quand trois personnes sont contre toi, tu n'as aucune chance. Je suis désolé d'être éliminé au premier tour. Vandal Love, j'ai trouvé ça épouvantable. Je suis déprimé d'être éliminé avant Vandal Love».
Esther Bégin : «Je comprends que Vandal Love ne fasse pas l'unanimité car c'est un livre qui demande beaucoup, mais il faut se laisser aller dans la fiction. Pourquoi ne pas être dérouté ? Ça vaut tellement la peine, il y a tant de poésie. Il ne peut pas être éliminé au premier tour.
Janette Bertrand tente une dernière charge contre Vandal Love, qui à son sens est déstructuré.
Après le vote, Mistouk est éliminé par trois voix contre deux.
Le combat des livres - Jour 2
À mon propre avis, l'Abbé Raymond Gravel a mieux su expliquer ce qu'il n'aimait pas dans Vandal Love que ce qu'il aimait dans son livre. Son plaidoyer n'était pas très vigoureux et depuis hier, je prédisais déjà sa défaite rapide. Dommage qu'il ait eu recours à des arguments parfois douteux, au lieu de chercher et exprimer la beauté qu'il a pu trouver dans son livre, que je n'ai par ailleurs pas lu. J'ai eu un peu peur pour Vandal Love car j'aime énormément ce livre que j'ai presque fini et, comme Esther Bégin, j'y trouve beaucoup de beauté et de poésie. Il laisse place à beaucoup d'imagination, il est certes déstabilisant et pas évident, mais quelle expérience ! Et quel premier roman !
En recopiant mes notes, j'écoute Late of The Pier, Fantasy Black Channel (Parlophone, 2008)

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