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saines – du balcon

Publié le 16 novembre 2009 par Collectifnrv
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Mais, en même temps, ce qui faisait leur beauté finissait non pas par s’amoindrir, ni s’atténuer, mais… à s’effacer ! Parce que justement, à un moment, on se dit [et c’est pour ça qu’il ne faut pas trop réfléchir ;-], que si elles sont belles, et qu’elles s’offrent aussi « facilement » (pour l’équivalent d’un bon repas au restau), c’est qu’il y a quelque chose qui cloche : chez elles ; mais aussi chez moi ! Bien sûr, on leur trouve des excuses : l’une qui finance ses études, l’autre qui a quitté son pays, ou encore, celle qui attend le jeune milliardaire (même vieux)… Oui mais aussi, forcément, feignasses, cyniques ; avec le raisonnement du genre : « Pourquoi je ferais caissière dans un supermarché, alors que je palpe en montrant mon cul !? »

Tout le jeu de séduction ordinaire (disons, même le truc anodin dans le métro) est déplacé, inversé. D’un côté, on re-déplace ses critères esthétiques, et comme à l’Ecole des fans de Jacques Martin : elles deviennent toutes charmantes. Mais le charme s’évapore. Dans leur attrait, elles deviennent moins mystérieuses ; ou, du moins, le « mystère féminin » se déplace. Elles ne sont plus mystérieuses pour leur féminité, mais pour ce qu’elles ont dans le ventre : de quoi sont-elles capables ? jusqu’où iront-elles ? En deux secondes, une fois le soutif enlevé, elles perdent leur élégance, leur charme : elles s’offrent à mon regard, mais aussi à tous les autres. Cette disponibilité ne me rend pas jaloux, car je ne suis attaché à aucune d’entre elles, mais au contraire me rend chacune trop accessible, de sorte que je n’ai jamais le sentiment de conquête. L’offre est trop rapide ; et la facilité tue l’érotisme. Du reste, il n’y a pas plus d’érotisme que de sexe : tout juste une sexualité sans risque.

Et pourtant, celle, qui en arrive là, elle est quoi ? Le terme qui correspond, et qui peut paraître injurieux au prime abord, mais qui ne peut pas l’être puisque dans les faits, il s’agit de ça, eh bien… c’est « salope » ! Ces « danseuses », qui acceptent, peut-être même sans dégoût, de montrer leur arrière-train et de se frotter contre les clients, ont franchi le pas, sont passées de l’ « autre côté » : celui de la « bienséance ». Mais, ce serait idiot de s’arrêter à cet aspect immédiat. Car, en même temps, dans un registre similaire, on voit bien qu’elles sont restées en deçà de l’autre barrière : celle où les filles – pire encore, pour ceux qui affichent une morale irréprochable (surtout quand les moyens le leur permettent) – se montrent et se font fourrer soit dans le cadre d’une activité à prétention artistique (dans des films, par exemple), soit, lorsque la situation est désespérée : par tout ce qui passe. Bref, « salopes » peut-être, mais pas « putes ».

Ce qui est étrange dans ce type de terminologie, c’est de se demander ce qui les distingue des autres filles dites « normales » (et qui ne le sont pas tant que ça). Qu’est-ce qui fait que certaines vont franchir la ligne, et d’autres pas ? Ce que les unes et les autres acceptent au fond de subir et d’encaisser dans leur amour-propre. D’un côté, en adoptant ce mode d’indépendance, on finit par faire la nique au qu’en-dira-t-on : avec un air de dédain plus ou moins affiché pour celles qui ont été bien élevées, mais surtout bien nées ; et de l’autre, en acquittant des devoirs ménagers, ou parfois en souffrant la tyrannie du foyer, on s’assure une certaine tranquillité (matérielle, ou d’esprit). D’accord, elles sont passées de « l’autre côté » ; mais, pour moi, elles ne sont pas pires que des employées, exploitées et soumises. La question reste : comment s’en sortir ? Et accessoirement, moi, un mec, si j’étais dans une situation (financière ou sociale) similaire, est-ce que je le ferais avec des vieilles peaux, ou des filles quelconques, qui me fileraient leur pognon ? Et, pas même pour cinquante euros !

A ce propos, il y a un truc qui me fait marrer, bien que ce ne soit peut-être pas si drôle… (c’est selon). C’est le décalage avec la « vraie vie »… Si on dit à une fille ordinaire, même un boudin : « Montre-moi ton cul, et frotte-toi contre mon mât » – enfin, il faut mieux dire « ma bite », sinon elle comprendra pas –, en sortant un gros bifton, on est à peu près sûr de se manger une baffe ! Mais, paraît-il : « Pas forcément » !!?

Et puis, celui, qui mate, il est quoi ? un vicieux ? Sans doute. Un maso ? Forcément : un client, qui paie donc, et qui prend un « plaisir » (voyeuriste) sans le risque (ni le plaisir) de l’accouplement ; et en plus, ce plaisir « partiel » est lui-même « encadré »…

Car, dans tout ça, je me sentais quand même bizarre, puisque j’endossais provisoirement l’équivalent du rôle de maquereau… pour mon frère, par surcroît ! Mais, bon, je le voyais aussi comme un casting. Il y a des filles que je trouvais bien pour moi, mais, je m’étais dit : « Oh, non, avec lui, ça ne le fera pas. » Alors, j’ai fini par désigner une fille très « classique », très typée « Playboy ». J’avais même confié à Jennifer : « Oui, je sais, c’est pas très original… ». Je me suis demandé aussi comment elles se « partageaient » entre elles les clients. J’ai remarqué qu’il y avait tout un jeu de regards, pas vraiment de séduction ; en gros : tu en regardes une avec insistance, et la seconde d’après, elle venait vers toi. Ce qui n’est pas fréquent dans la vie quotidienne, en situation « normale ». Donc, évidemment, on le sait, et on fait semblant de l’oublier, et c’est même très important de le faire : elles travaillent, et toi, tu paies. C’est une relation commerciale, mais toi, au moins pour cette fois, tu simules le côté « le client est roi », « elles ne sont là que pour toi (parmi les autres clients) », « tu les attires parce que tu es irrésistible », etc.

Il en ressort qu’il n’y a aucune sensualité entre les protagonistes, car on sait que c’est simulé, et professionnel. Il y a la perte de l’innocence des premiers flirts, ou des premières rencontres avec une inconnue. Ici, c’est purement fonctionnel : montrer son cul pour du fric, à des clients qui viennent se rincer l’œil et avoir quelques frissons. La danseuse est là, comme un objet de désir, et le client est là pour satisfaire un péché véniel (mater des filles nues). A défaut de pouvoir se « défouler » (de se « vider » du matraquage normatif), il pourra trouver une absolution collective : tous les autres qui sont là font pareil. Il y a la faute, sans la culpabilité. Et le plaisir sans effort, et sans responsabilité.

[à suivre...]

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par Albin Didon


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