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La fin du monde méritait bien un teasing

Publié le 03 octobre 2009 par Gregleroch

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Les studios de cinéma, spécialistes de la bande annonce, maîtrisent depuis longtemps l’art de susciter l’intérêt. Le prochain film post-apocalyptique (nouveau genre qui ridiculise le film catastrophe de papa) de Roland Emmerich, intitulé sobrement 2012, n’échappe évidemment pas à la règle. Alors qu’un nouvel extrait ahurissant de 5 min vient d’inonder le web, avant la sortie mondiale dans plus d’un mois, je vous propose de revenir sur la campagne de teasing enclenchée il y a près d’un an maintenant.

La technique du teasing consiste à exciter la curiosité en dévoilant au compte goutte des informations sur un évènement à venir, comme le lancement d’un nouveau produit ou en l’occurrence un prochain film à l’affiche. Il s’agit d’un ressort à la fois intellectuel et émotionnel pour obtenir et entretenir l’attention. Alors que vous attendez des réponses, le bon teasing va produire des questions dans votre esprit. Une flopée de question. En ce sens, le teasing constitue un mécanisme de storytelling. Il utilise une forme narrative pour maintenir une situation mêlée d’angoisse et de désir. L’angoisse de ne pas savoir et le désir de trouver des réponses, même partielles. L’intensité du suspense peut alors progressivement augmenter et entrainer un phénomène d’addiction.

1- Novembre 2008, diffusion du teaser :

Mais aujourd’hui, la simple bande annonce ne suffit plus. Aussi réussie soit-elle. Le spectateur lambda est sollicité de toute part. Et s’il avait autrefois vaguement connaissance de la profusion d’offres de divertissement existantes, internet et la généralisation du haut débit l’ont soudain rendu conscient. Qu’il habite Paris ou un bled paumé, une simple connexion lui fournit désormais tout loisir de s’abandonner à la diversité du vaste web. Il faut donc rivaliser d’imagination pour conserver cet intérêt.

2- Janvier 2009, lancement de la plateforme viral marketing « Who Will Survive 2012 » : un premier site, sous une apparence institutionnelle et pseudo-scientifique, organise une loterie pour sélectionner les heureux survivants à la fin du monde.

3- Juin 2009, diffusion du trailer 1

4- Août 2009, lancement des 4 autres sites constituant la plateforme : sous la forme de blogs militants ou page perso, ces sites alimentent le mystère autour du film et donnent une certaine réalité à deux de ses personnages.

5- Septembre 2009, diffusion du trailer 2

Ainsi le teasing devient de plus en plus sophistiqué. C’était déjà le cas pour le dernier né de la licence Batman, The Dark Knight, avec l’impressionnante campagne « Why So Serious ? » récompensée au festival international de la publicité à Cannes en juin 2009. Même si de tels exemples restent l’apanage des grosses productions forcées de rentabiliser les millions investis, le teasing tend alors à s’intégrer dans un dispositif plus global de buzz marketing, à dimension multicanal, et dans lequel internet et les médias sociaux jouent pleinement leur rôle.

Ainsi cette technique s’adapte et tire profit de l’hyperconnectivité de la cible marketing pour créer un contexte immersif. Pour The Dark Knight, la création de ce contexte demandait davantage d’effort. L’univers des super héros reste en effet purement fictionnel, et il paraît plus difficile à transposer dans la réalité du spectateur. Du moins, de manière suffisamment crédible pour susciter son implication, et au delà de la motivation éphémère générée par l’aspect ludique de telles opérations.

Mais pour le film 2012, ce contexte existait déjà et il ne demandait qu’à être réveillé. Le film s’appuie en effet, avant même ses effets spéciaux hallucinants, sur une des idées virus les plus anciennes et les plus persistantes de l’histoire de l’humanité : la fin du monde en 2012. Il suffit de taper ces quelques mots dans google pour voir apparaître quantité de résultat traitant de ce sujet, du docu-fiction vidéo jusqu’au site web mystiquo-mystique. Et c’était précisément l’effet escompté par le teasing. Au regard de la tendance observée sur google trends pour l’expression « 2012 end », on peut dire que cela a plutôt bien fonctionné :

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L’importance du contexte pour créer un buzz prend alors tout son sens. Si vous voulez qu’on s’intéresse à votre histoire. Votre histoire qui jusque là était la dernière des préoccupations de votre entourage. Commencez alors par créer un environnement qui offre une multitude de résonances à votre histoire. De la même manière qu’on prend connaissance d’une actualité incontournable. De la même manière qu’on prend conscience d’un phénomène de société. Lorsqu’on réalise leur omniprésence dans notre sphère immédiate. Ensuite seulement, votre entourage se sentira concerné. Il écoutera attentivement. Et il répètera votre histoire à qui veut bien l’entendre, concourant ainsi au renforcement du contexte.

6- Octobre 2009, diffusion extrait 5 min


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