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Interview de Jean Louis Brossard.

Publié le 06 janvier 2010 par Minisym

Interview de Jean Louis Brossard, programmateur du Festival des Transmusicales à Rennes qui avait en 1988 invité Moondog à venir jouer au Festival. J’ai réalisé cette interview le 07 janvier 2010.

Amaury : Où, quand et comment, avez vous découvert ce personnage qu’est Moondog ?

Jean Louis Brossard : C’était avec son premier album sur CBS, “Moondog”, enfin, le premier qui était un peu connu ici celui produit par James William Guercio. Parce qu’avant il y avait ceux des années 50. Mais s’il y a un disque de référence de Moondog c’est bien celui-là. C’est le premier que j’ai acheté avec le suivant “Moondog 2″. Les autres fallait habiter aux États Unis pour trouver les 25cm ou les 78T, ça se trouvait pas comme ça, et fallait connaître le bonhomme. Donc ce disque “Moondog” je l’avais acheté en Angleterre, mais pas à l’époque, j’avais surtout écouté quelque morceaux, et c’est dans les années 70 que j’ai réussis à les trouver, lui et le second.

A un moment je me suis demandé ce qu’il devait, parce que souvent aux Trans, j’ai fais des artistes du passé, des gens que j’aimais bien, je me rappel avoir fait Georgie Fame , Tony Joe White, Bo Diddley, ou cette année Rodriguez, des gens qui ont un parcourt intéressant et qui sont toujours d’actualité, et puis pour moi la musique elle a pas d’âge. Et donc là dessus avec Hervé Bordier et Béatrice Macet on se rencarde, on avait appelé Daniel Caux à Paris il nous a dit que Moondog avait fait un concert y a 10 ans et que c’était Jean Jacques Lemêtre qui s’en était occupé. Donc on avait été voir Jean Jacques Lemêtre à Paris, on a été chez lui, on s’était mangé des petites tartines de rillettes avec des petits oignons dessus, il avait des alcools qui venaient de tous les pays du monde parce que c’est un mec qui voyage beaucoup, et un mec fort sympathique d’ailleurs. Et donc il m’a dit “oui le truc avec Moondog c’est qu’il faut qu’on choisisse quels morceaux il jouera”. Parce que c’est un musicien qui à tellement d’oeuvre et qui adore tellement qu’on joue sa musique qu’il y avait des tonnes de possibilité. Donc on a décidé avec Jean Jacques de certaines oeuvres qu’on voulait prendre et il en a fait part à Moondop évidement. Et on a décidé de prendre des musiciens additionnels, une pianiste, un hoboiste avec des parties beaucoup plus solos, on avait pris Gilbert Artman – le mec d’Urban Sax et le batteur – et c’est la première fois que Moondog jouait avec un musicien qui lit pas la musique, mais le feeling était passé.

Amaury : Comment s’est passé l’arrivée de Moondog à Rennes ?

Jean Louis : Quand Moondog est arrivé à Rennes, une quinzaine de jours avant le concert de façon à ce qu’il répète avec l’Orchestre. Donc je me rappelle on va le chercher à la gare et il avait très fin donc on est allé dans un Restaurant qui était tout près de la gare et là si tu veux je me suis mis à pleuré parce que j’étais vraiment ému parce qu’à un moment il s’est mis à manger donc à pris sa barbe et il l’a mise dans son pull donc ça lui faisait une tête pas possible. Et il mange avec les doigts, Moondog c’est ça quoi ! Et puis il a une voix, assez incroyable, c’est un type quand il parle il dégage quelque chose.

Donc il était avec Illona qui l’accompagnait et là dessus on a commencé à bosser avec l’Orchestre, y avais Jean Jacques qui était là, les répétitions… Donc déjà les mecs ils tiraient un peu là gueule parce que quand ils ont vu Moondog et Jean Jacques Lemêtre qui est quand même un personnage aussi un peu “moondoguien” quelque part – grosse barbe, costaux, aimant la bonne chaire, jouant de 200 instruments, c’est un mec qui joue du basson qui est un instrument qui est très difficile à jouer donc quand tu joue de ça tu peux jouer de tout le reste, vraiment un mec incroyable. Je me rappel être allé à quelques répétitions où carrément, ils jouaient le morceau en hommage à Charlie Parker et puis y a un petit solo de sax et donc il demande au mec qui était responsable du pupitre des saxophones – le professeur du Conservatoire – de jouer un peu plus Jazz cette partie là et le mec il y arrive pas parce qu’il a pas le feeling pour ça et il comprend pas vraiment. alors à ce moment là y a Jean Jacques Lemêtre qui descend de son pupitre, il va vers le mec, lui dit “passe moi ton sax” et il joue le truc et il lui dit “voilà, il faut que tu le joue comme ça”. Donc Jean Jacques était capable de jouer la partie du saxophoniste. Génial !

Et Moondog avait besoin d’un traducteur donc ça a été Phlippe Maujard – le chanteur d’un groupe qui s’appelait Ubik – qui a été beaucoup en relation avec Moondog, il l’accompagnait pour tout ce qui était répétitions, filages etc… Et il était sur scène à coté de lui pendant le concert.

Donc tout ça se passait à la Maison de la Culture, et Moondog me reconnaissait toujours à mon pas, parce que j’étais souvent avec ma chienne donc il voyait bien qu’il y a avait le chien, il avait une oreille super forte évidement, et au bout d’un couloir t’as un mec qui est aveugle et qui dit “Ah salut Jean Louis ça va bien !” je me disais putain mais comment il fait. Il savait qui tu étais, c’est incroyable il était assez rigolo. Et d’ailleurs une fois dans un couloir il m’a monté sa corne de brume, dans laquelle il boit, il en a une mais il la planque parce qu’Illona elle l’empêche de faire tout ses trucs un peu Viking, tout ses trucs un peu barré. du coup il était super mal fringué elle l’habillait vraiment comme une merde. Et donc il m’avait montré sa corne de brume en me disant “tient regarde, j’te montre le truc” comme un gamin, il avait un esprit vachement juvénile.

Amaury : Qu’a joué Moondog aux Trans en 1988 ?

Jean Louis : Faudrait que je le retrouve, j’ai un enregistrement du concert sur CD. Je l’ai pas là mais je te l’enverrait sous peu. Tu pourras savoir absolument tout ce qu’il a fait. Il jouait Paris qu’il chantait qui était assez rigolo, c’était un chouette moment. Bon après tu sais qu’il y a eu des gros problèmes pendant le concert…

Amaury : Oui, donc que c’est t’il vraiment passé pendant le concert ?

Jean Louis : Ce qu’il s’est vraiment passé si tu veux c’est que le concert commence, ça dur à peu près 20 minutes, et là dessus il y avait une équipe qui faisait un documentaire sur Moondog. Le réalisateur c’était le copain de Clémentine Célarié qui était là d’ailleurs, donc le mec il enregistrait, ils avaient été filmé Moondog dans la forêt de Brocéliande, ils avaient fait tout un truc avec lui déjà. Et donc là ils filmaient une partie du concert. Et à un moment donc t’es là t’es assis tu écoutes, et un moment t’entends un son dissonant, complètement faux, et tu te rend compte que le premier violon de l’Orchestre qui était sorti de scène sans qu’on le voit, qui était monté dans une loge et qui jouait faux. Donc là dessus, tout le monde quitte la scène, à part évidement Jean Jacques Lemêtre, Phillippe Maujard, Moondog et les musiciens additionels qui étaient là. Et tout le monde se barre, alors moi j’essaie de me rencarder, et le truc c’était que, pour des raisons syndicales, seulement 20 minutes devaient être filmé et l’équipe avait dépassée. Mais au lieu de nous en parler à nous en temps qu’organisateur, en demandant qu’on aille voir le mec et lui demandé d’arrêté, ils ont fait ça tout seul. C’est scandaleux, les mecs ils jouent la musique d’un compositeur qui est encore vivant et qui est sur scène avec eux, t’hallucines. J’étais fou furieux, le premier violon il se dit musicien mais franchement ça se fait pas, enfinil y a d’autres façon de le faire, et c’était que des morceaux qui étaient très courts, il aurait pu attendre la fin d’un titre pour essayer de parler à l’administrateur de l’Orchestre, y a des choses que tu peux faire, mais pas ça ! C’est inhumain pour moi ce mec là c’est pas un musicien et il le sera jamais de toute manière.

Après moults discussions le concert repart. Il y a un autre moment où le concert s’est arrêté mais ça c’est Moondog qui a fait arrêté parce qu’ils avaient mal démarré un morceau donc il a tapé sur son tambour et tout le monde s’est arrêté et ça à repris comme il le voulait. Et après en réaction à ça avec Hervé on a décidé d’annuler le concert du lendemain, ce qui était une connerie quelque part. Mais on était tellement énervés ! Mais c’était con parce que Moondog aimait tellement qu’on joue sa musique… Moi je m’en suis énormément voulu après de pas avoir fait ce deuxième concert. Ça a fait un scandale, y a eu un plateau le lendemain où ont été diffusés des extraits du concert, Clémentine Célarié était invité sur le plateau qui a dit que c’était vraiment lamentable. Parce qu’à la fin du concert de Moondog y a Jean Jacques Lemêtre qui présente Moondog, donc tous les applaudissements, les musiciens additionels mais quand ils présentent l’Orchestre les gens se sont mis à huer, des gens ont jeté des pièces de monnaie sur scène *rire*. Et l’Orchestre il a splitté, ça a fait un scandale terrible après dans les médias.

Amaury : Après cet épisode des Trans vous l’avez recroisé autre part ?

Jean Louis :
Malheureusement non mais j’avais pas mal de nouvelle de la part de Stefan Eicher. Parce que Stefan a connu Moondog aux Trans, et c’était pour lui une grande histoire comme il habitait en Suisse allemande il habitait pas loin de là où habitait Moondog, donc il allait le voir assez souvent, il l’a fait joué, il l’a aidé, il s’est vraiment pris d’une amitié très forte envers Moondog. Ils ont fait un 45T où il avait la Face B pour lui.

Amaury : Des anecdotes ?

Jean Louis : Après y a des histoires, je me rappel avec Moondog on se baladait dans la rue, on avait été boire un coup dans un bistrot et à un moment il me dit “je sais pas ce que j’ai, j’ai l’impression d’être bourré alors que j’ai rien bu”. Mais c’était sa copine Illona qui titubait mais comme elle le prend par le bras, lui il titubait en même temps.

Une autre fois on était parti mangé, et j’avais un copain qui s’appelle Phllippe Echard qui bosse pour les Services Internationaux de la ville de Rennes, on avait été mangé chez lui avec Moondog et Illona et Phillipe nous fait goûter du lait ribot – une spécialité bretonne – et après il lui fait goûté du calva, tout l’intéresse Moondog il avait une super curiosité. Et après il avait mis un disque du Bagad de Lann Bihoué, et Moondog à trouvé ça super, il prend son diapason, il fait le LA et il dicte à Illona qui sort tout de suite une partition, et il compose une Symphonie pour un Bagad quoi. Ça c’est Moondog !


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