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Figures et chimères

Par Villefluctuante

La résidence, je ne sais pas. Personnellement après les premiers enthousiasmes des nouveaux appartements je me suis aperçu que je devenais rapidement assez indifférent à l'endroit où j'habitais. Habiter longtemps de suite dans le physique, le matériel, cela demande un effort soutenu. D'abord, comme dit Proust, l'habitude efface tout. Ensuite on habite par nature ses affects, soucis, ruminations et autres, on habite ses humeurs et nullement le monde réel ou alors par intermittence.

Alors voilà mon postulat: nous n'habitons nullement le monde réel. Nous nous fabriquons un monde où tout nous est intentionnel, dédié. Tout nous est message, signification, renvoi, reflet. Ultimement nous habitons notre propre âme.

Nos paysages assez minables, ils sont à chaque fois "à côté": à côté de l'autoroute, de la ville, à côté du nom qui permettrait d'en faire quelque chose. Ils ne nous sont rien, nous n'avons rien pour les saisir. C'est ce que j'ai appelé: l'envers du paysage, l'envers de la vaste toile fantasmatique que nous appelons ville, civilisation, sens.

Après quelques efforts, pourtant, des bribes de significations surgissent, le feu du langage peut reprendre, cela peut reprendre... au prix de nouvelles fantasmagories.

Les astronomes arabes du moyen-âge, scrutant le ciel noir, voient des figures. Ils les voient réellement, elles sont là.

La moindre chimère nous est plus familière que la réalité. La réalité, nous n'avons rien pour la saisir, biologiquement. Nous n'avons ni membres, ni yeux, ni outils: elle nous échappe comme du sable.
JPD


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