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Copé, la parité et les bonnes recettes électorales

Publié le 08 février 2010 par H16

Je ne lis pas Madame Figaro. Déjà, le Figaro a tendance à se classer dans les feuilles de choux amusantes à lire quand on est aux petits coins; son spin-off féminin m’a toujours fait penser à ces magazines qu’on distribue dans les TGV ou dans les avions de ligne, totalement creux, qui présentent des intérieurs aux agencements stylés et aussi glacés que le papier sur lequel ils sont imprimés, ou des pages de pubs pour des produits d’une futilité galopante comme des montres lourdement diamantisées qu’un Dray pourrait porter sans gêne. Mais cette fois-ci, j’ai été attiré par la présence rédactionnelle improbable d’une interview de Jean-François Copé, le mini-Lui de la République. Ni une ni deux, j’ai décortiqué.

Le sujet ? La parité. Pas de l’Euro avec le Dollar, non non. Ça, c’est de l’économie, du terre-à-terre ! C’est un truc un peu cracra qui donne les mains moites et qu’il faut s’empresser de ne pas traiter, voyons.

Il s’agit de la parité homme-femme dans les conseils d’administration des entreprises. Question absolument primordiale pour les Français. Enfin, surtout pour un Français, Copé : ça lui permet de faire parler de lui dans l’optique d’un job qu’il vise pour 2012 ou 2017, suivant l’usure du patron.

Et comme Mini-Lui a bien compris la stratégie générale de son mentor, le voilà tout effervescent sur des sujets annexes où il pourra dire plus tard « J’y étais », au moment où il faudra compter les points.

L’interview porte donc sur les moyens à mettre en oeuvre pour assurer une meilleure présence des femmes à la tête des entreprises. Et là, découverte de Jean-François : ces cons de patrons entendent s’entourer de gens compétents avant tout ! Evidemment, dans sa bouche, cela donne une chose un peu différente :

J’ai rencontré de nombreux dirigeants, et beaucoup en sont venus à me dire – sans plaisanter – que le principal obstacle à la nomination de femmes aux conseils d’administration était le manque de compétence. C’est un exemple parmi tant d’autres de l’approche machiste qui règne encore dans le monde du travail.

Evidemment, dit comme ça, ces cons de patrons sont misogynes ou machistes : les femmes autour d’eux ne sont pas assez compétentes pour les rejoindre dans les équipes de direction. Zut et crotte. Et là, peu importe, finalement, qu’ils aient raison ou tort, puisque de toute façon, on a déjà la soluce : on va faire une loi pour les obliger à changer d’avis.

En gros, ces cons de patrons pensent que la Terre est plate. C’est idiot, contre-productif, et ça va, à terme, ruiner leur efficacité puisque les autres qui, eux, auront eu la bonne idée de comprendre que la Terre est ronde en réalité, pourront réaliser des choses qu’eux ne pourront pas.

Et plutôt que de laisser ces patrons découvrir par eux-même qu’ils ont tort, on va leur imposer, par la loi, la Vérité :

  • Article 1. La Terre est ronde.
  • Article 2. Toute déclaration dans un sens contraire sera passible d’une amende de catégorie 1.
  • Article 3. Toute récidive de déclaration contrariante sera passible d’une peine d’ostracisme assortie d’une amende de catégorie 2 et d’une mention dans le casier politique.

Vous voyez, fastoche ! Evidemment, on perd en raisonnement et en démonstration ce qu’on gagne en rapidité : d’un coup, tout le monde trouve la terre ronde, et personne ne moufte. C’est génial. On peut ainsi décliner à l’infini ce genre de lois et raboter les difficultés de la vie.

Avec une loi pour interdire les nombres irrationnels et une autre pour imposer une chemise propre tous les jours, on aura ainsi l’assurance d’un monde meilleur et enfin tourné vers des valeurs essentielles. Mini-Lui l’a bien compris : il faut, quand les gens sont rétifs, leur expliquer un peu – pas trop -, et puis bien leur cogner sur la gueule, ce qui permet d’attendrir la viande et de faire pénétrer les messages importants plus vite.

D’ailleurs, ces cons de patrons ne sont pas logiques pour deux ronds de carotte. Ils en sont restés aux bêtes schémas 5 = 5. Alors que tout le monde sait qu’en réalité, 5 peut valoir 4 ou un peu plus, ou parfois que 4 vaut approximativement 5 et emballez c’est pesé, y’a un peu moins mais sachons vivre :

Il faut que l’on cesse de considérer qu’une femme est moins efficace qu’un homme au seul motif qu’elle ne travaille pas le mercredi.

Vous voyez cet homme qui travaille 5 jours, et cette femme qui travaille 4 jours ? Eh bien ils sont efficaces pareil. Alors on va les payer pareil et l’homme, quand il dira « mécédégueulasse, je dois travailler 5 jours pour avoir autant qu’elle », on va lui répondre qu’il ne comprend rien de rien et que la Terre n’est pas plate. Con d’homme. Après, on le méprisera du regard parce qu’il est misogyne. Et s’il moufte, on le vire. Merde à la fin. Après tout, comme le dit Jean-François, …

Le défi est de laisser tomber la vieille dialectique droite/gauche du « travailler moins/travailler plus » pour entrer dans l’ère du « travailler mieux ». Car face à la concurrence de l’Asie et des États-Unis, avec un yuan et un dollar faibles, le capital humain est la plus grande richesse des pays européens.

Bon, évidemment, pour le dollar faible, il s’est planté, le pauvre, il n’est pas au courant du récent coup de calgon à cause que la Grèce et l’Espagne font n’importe quoi mais chut : restons dans le sujet, le terre-à-terre, la dette, tout ça machin bidule ça donne des migraines à Jean-François qui fait dans le plan de campagne (électorale) et pas dans le pâté (de campagne – suivez un peu).

Si l’on omet donc le dollar faible, le message est limpide :  il faut plus de femmes aux Conseils d’Administrations des entreprises parce qu’il faut travailler mieux. La terre est ronde, n’s’pa. M’suivez ?

Et concrètement, mon petit Jean-François, tout ceci donne quoi ? Eh bien c’est très très simple, limpide comme tout le projet, du reste :

Si le quota de femmes n’est pas atteint, nous proposons de considérer comme nulles l’élection de tous les nouveaux membres hommes ainsi que les délibérations auxquelles ces derniers auraient pris part.

Vous voyez ? Si ces cons de patrons ne se plient pas rapidement à la loi, on va intervenir directement dans les conseils d’administration d’une propriété privée histoire de foutre un peu notre grain de sel. Pourquoi ?

Copé, un politicien qui inspire confiance.

Ayez confiance.

Parce qu’on peut, tiens, c’te bonne blague ! On peut même déposséder le con de patron misogyne de sa boîte, tiens. Et puis on peut aussi le jeter dans une geôle froide, pour faire bonne mesure. Ah ah, la terre est plate, hein ? On rigole moins, dans sa petite cellule froide, hein ?! …

Mmmh je crois que Mini-Lui s’emporte un tantinet. La fin de l’interview, heureusement, calme un peu le jeu (un peu). On apprend en effet que Jean-François s’est mêlé des affaires des femmes depuis un moment :

mon mandat de maire de Meaux m’a amené à prendre conscience  sur  le terrain d’un certain nombre de sujets graves, qui vont de la femme qui se retrouve seule, avec le RMI et trois enfants, aux violences conjugales, en passant par les comportements pseudo-religieux inacceptables.

Il est à noter que les femmes seules avec trois enfants au RMI et qui entrent dans un conseil d’administration ne sont pas légions. Grâce à lui, ça changer, z’allez voir ! Mais c’est surtout la fin qui vaut son pesant de chocolat :

Pensez-vous que le prochain président de la République sera une femme ?
Je l’ignore, mais toutes les conditions sont rassemblées pour qu’une candidate puisse  le  devenir.

Ça claque, de la part de quelqu’un qui fera tout pour que justement, ce ne soit pas une femme qui arrive au pouvoir, mais lui.

Vous ne trouvez pas ?


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