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Droit de retrait, par Daniel Faivre

Publié le 09 février 2010 par Roman Bernard
Daniel Faivre est professeur de français, à la retraite depuis quatre ans. Il anime un site consacré aux questions éducatives, l'Observatoire du laxisme à l'école.
Droit de retrait, par Daniel FaivreÀ nouvelles violences, nouvelles résistances. Mieux : nouvelles contre-attaque. Qui en effet aurait pu imaginer que l’École pût devenir dangereuse ? Non pas tel élève, mais telle école ?
On connaît la longue litanie des récriminations dénonçant paroles et gestes incivils qui sont le lot quotidien de la plupart des collèges ; mais ce millénaire accentue la donne : la violence virtuelle ou réelle, parfois mortelle, éclate ici ou là. Jeux violents (du petit pont, du foulard, du brûle-voiture…), mais aussi menaces physiques, voire actes criminels visant les professeurs (cf. la longue liste de Veille-Éducation).
Pressentant cette déliquescence scolaire, les citoyens ont cru y mettre un terme en élisant en 2007 un président dont la profession de foi était de rétablir l’autorité. Rien n’y fait ou rien n’est fait !
Devant cette inertie, que faire ?
Un professionnel de l’éducation a des devoirs, mais aussi des droits. Un décret de 1995 prévoit qu’il peut se retirer d’une situation de travail présentant « un danger grave et imminent pour la vie ou la santé ». C’est ce qu’il fait, individuellement, lorsqu’il craque nerveusement et « se retire » en arrêt-maladie. Parfois même l’avertissement auprès de son administration défaillante suffit. Exemples à Bagneux : une élève d’origine africaine apostrophe un professeur remplaçant d’origine roumaine : « Toi, le Gitan, casse toi tu pues ! » ; un autre de même origine propose à son enseignante de l’enc… Dans les deux cas, sanctions prévues par la principale dérisoires. Après menaces d’arrêts-maladie, elle consent au conseil de discipline !
Plus généralement, lorsqu’une situation d’insécurité est jugée grave par les professeurs (et Dieu sait si jusqu’à la fin de l’année, l’enseignante eut peur de représailles), et que leur hiérarchie reste défaillante pour les protéger, eux et d’autres élèves, le droit de retrait n’est-il pas le moyen le plus efficace et responsable pour réagir ?
Responsable, parce qu’une école sans professeurs alerte les autorités mais aussi les parents et les élèves eux-mêmes. Ce que ne fait pas la grève, noyée dans des considérations idéologiques, encore moins l’arrêt-maladie, invisible et culpabilisant. Le droit de retrait est un appel au secours local et précis, pressant et handicapant, qui risque d’être enfin entendu. Quel élève, quel parent, quel syndicat, quel gouvernement peut rester sourd ?
Bien évidemment, la mauvaise foi cherche à travestir cet appel souvent désespéré en désir de faire grève à bon compte ! Il s’agit sans doute de cette « opposition farouche des esprits médiocres » dont parle Albert Einstein ; ou, plus grave, d’une volonté délibérée de laisser pourrir l’école, « pour que la société pourrisse », comme le souhaitait Jean Genet.
Répondons leur tout de même : la mobilisation est forcément locale puisqu’elle vise toujours un danger précis. Et saluons pour finir nos collègues du lycée Adolphe-Chérioux de Vitry-sur-Seine.
Daniel Faivre
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