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Alexandre: "Dubaï a tout tenté pour éviter le procès"

Publié le 13 novembre 2007 par Willy
Par Ian Hamel (Journaliste)   -   http://rue89.com/  - 12/11/2007

De retour de l'émirat, l'adolescent raconte à Rue89 le procès des hommes accusés de l'avoir violé.

Violé en juillet par trois hommes à Dubaï, où il résidait avec sa famille, Alexandre, 15 ans, qui poursuit actuellement sa scolarité dans un internat à Lausanne, est retourné dans le Golfe afin de témoigner au procès de ses deux agresseurs majeurs, le 7 novembre. Nous l’avons rencontré à son retour, samedi, dans l’appartement parisien de sa mère. Véronique Robert, elle, retourne à Dubaï ce mardi pour le procès d’Ibrahim K., l’agresseur mineur de son fils.

Rappel des faits: le 14 juillet dernier, Alexandre et l’un de ses copains sont ramenés en voiture par l’une de leurs connaissances, Ibrahim K., un Dubaïote de 17 ans. En cours de route, ce dernier embarque deux individus, Abu Baker Khamis, 35 ans, et Ibrahim Mohamad Salem Al Daweiss, 18 ans. Le véhicule prend la direction du désert. Les trois hommes, sous la menace d’armes, violent à tour de rôle Alexandre.

L’adolescent, en compagnie de son père, cadre dans l’industrie hôtelière à Dubaï, va porter plainte le soir même à la police de l’émirat. L’accueil est "glacial, désinvolte, méprisant". Ils n'apprendront que bien plus tard que l'un des agresseurs avait le sida et le savait, contrairement à ce qui leur avait été affirmé.

Le pedigree de deux des agresseurs d’Alexandre est particulièrement éloquent. Abou Baker Khamis, 35 ans, a déjà été condamné à 11 reprises pour homosexualité, violence, viol collectif et trafic de drogue. Ibrahim Mohamad Salem Al Daweiss, 18 ans, a déjà violé un enfant de 8 ans. Pour ce crime, il n’a pas effectué un seul jour de prison.

Véronique Robert a décidé de déposer des plaintes en France et en Suisse (Alexandre possède les deux nationalités) pour "mise en danger de la vie d’autrui" contre le Chef de l’Etat des Emirats, contre celui de Dubaï, contre le procureur général, contre les deux chefs de la police et contre le médecin légiste qui, le premier, a examiné son fils.

Grand, brun, Alexandre nous est apparu très calme, s’exprimant avec facilité. Toutefois, le rapport de la psychologue qui l’a examiné montre clairement que le jeune homme est très affecté par cette agression:

"Alexandre me fait penser à un pantin désarticulé comme si son corps n’était plus habité, désorganisé, vide. Il est très agité, se lève plusieurs fois, et n’arrive pas à se concentrer. Sauf quand il est animé de colère et de vengeance."

Comment s’est déroulé le procès?

C’était difficile de se retrouver face à mes agresseurs. D’autant que le plus vieux continuait à mentir, à nier les faits. Il était indispensable de montrer aux magistrats de Dubaï que je n’avais pas peur, que j’assumais toutes mes accusations. Depuis juillet, les autorités de l'émirat ont tout tenté pour qu’il n’y ait pas de procès.

Quelle a été votre réaction lorsque le médecin, qui vous a examiné après le viol, a prétendu que vous étiez homosexuel et consentant?

J'ai très très mal réagi: j’avais envie de lui casser la figure. En fait, ce médecin égyptien avait vraisemblablement reçu des ordres. Avec mon père, je venais de passer près de six heures au commissariat pour faire ma déposition. La nouvelle de cette agression a très vite circulé dans l’émirat. Je suis persuadé que ce médecin voulait par n’importe quel moyen étouffer l’affaire. Il ne cessait de me répéter: "Allez, avoue que tu es homosexuel et que tu as déjà eu des rapports, ton anus est dilaté." Il a osé écrire dans son rapport: "Utilisation antérieure fréquente de l’anus", alors qu’il ne m’a pas sérieusement examiné.

Ton copain Fabrice, 16 ans, était également dans la voiture. Certains médias affirment qu’il aurait également subi des violences sexuelles. Pourquoi n’a-t-il pas porté plainte?

Il dit qu’il n’a pas été agressé. C’est son choix. Je n’ai pas à faire de commentaires. Je l’ai revu. Il va plutôt bien.

Vous avez vécu deux années à Dubaï avec votre père, inscrit au lycée français. Allez-vous y retourner?

Non, je ne reviendrai jamais dans ce pays. En revanche, je n’ai pas de problème avec les autres pays arabes. Si j’étais resté dans ce pays, les autorités auraient été capables de me confisquer mon passeport, et de me menacer d’un an de prison pour "homosexualité forcée"… Il faut savoir que ma première déposition à la police a été totalement tronquée. Il a fallu repartir au commissariat pour en refaire une autre.

Comment vous sentez-vous aujourd’hui?

Plutôt bien. La création du site www.bycottdubai.com (lundi matin plus de 5 000 personnes lui apportaient leur soutien, ndlr) m’aide à me reconstruire. Je reçois des témoignages de gens qui ont vécu à Dubaï et qui révèlent au grand jour que mon cas est loin d’être unique.

Comment voyez-vous votre avenir?

Il n’était pas évident de passer de la 3e française à la 9e à Lausanne, mais cela se passe bien. Je suis forcément bon en anglais, et j’ai pu prendre comme autre langue l’espagnol, et non l’allemand, que je n’ai jamais appris. J’envisage ensuite de suivre une école hôtelière, comme mon frère aîné. Mon père est dans l’hôtellerie à Dubaï. Je souhaite embrasser la même profession, mais surtout pas dans le même pays.


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