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Max | Roger

Publié le 14 février 2010 par Aragon

frereroger.jpgQuand je suis arrivé sur la colline, j'ai failli faire demi-tour, parking plein, débordant de bagnoles, la plupart des vieilles guimbardes et du monde, un monde... J'y étais, j'avais fait neuf cents bornes, j'allais pas repartir comme un péteux.

Ah ! Ce temps, quand j'y pense, ça fait plus de quarante ans cette histoire. Je suis resté, planté ma tente, suis allé sentir la foule, la flairer comme un clebs. J'étais sur une super réserve. Rien que de penser à cette marée de culs-blanc ça me flanquait la nausée. Mais bordel, pourquoi j'étais venu ? Très vite pourtant j'ai vu qu'ils étaient sympa. Pas de prosélytisme. Aucun. De la joie. Des discussions de jeunes. Des jeunes hyper bien dans leurs baskets. Je suis resté cinq jours, j'avais planté ma "canadienne" à côté de ma 4L. Peinard.

Puis, dès l'après-midi de mon arrivée je suis "rentré" dans la grande salle de prière. Des jeunes partout, encore et encore. Assis, couchés, debout, à genoux. Discutant, dormant, priant. Puis les offices. Les chants de Taizé qui soulevait le bâtiment entier vers les nuages les plus hauts, les plus beaux.

Puis, Frère Roger. On pouvait tous passer à la queue leu leu pour le "voir" à la fin des offices. Il attendait, patient, pendant des heures. Un mot pour tout le monde. Un regard pour tout le monde. Le regard de Frère Roger personne ne peut l'oublier. Même moi, qui suis redevenu mécréant par la suite, je n'ai pas oublié. Il m'a dit d'une voix brûlante de ne me soucier dans ma vie que de mon coeur. De mon seul coeur. Pas d'église qui tienne, pas d'engagement, il me l'a dit. La voie du coeur. La voix du coeur. Quand il te disait ses mots, il te serrait fort dans ses bras, ses yeux étaient à quelques centimètres de tes yeux. C'était une confidence perso, son souffle rentrait dans ta bouche, dans tes poumons. Circuit direct. Je l'ai vu à quatre reprises. Quatre étreintes, quatre confidences brûlantes comme un brasier, paradoxalement plus tendres que le pain le plus blanc, le plus doré d'une enfance, ce pain des goûters dont on se souvient toute une vie. Une femme lui a planté un couteau dans la gorge le 19 août 2005 pendant la prière commune. Je pense souvent à cette femme.


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