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Tournant de siècle et noir et blanc

Par Karinehuard

Pour ceux et celles qui ont lu les quelques mots écrits sur moi dans les pages d’information, vous savez que j’ai fait mes débuts avec du film noir et blanc et une chambre noire dans le sous-sol de mon père. Et bien voilà, le temps passe à vitesse grand V et nous voici déjà 10 ans plus tard. J’ai pensé que ça serait amusant de vous scanner quelques photos que j’ai gardé et de vous montrer mes tout premiers essais. Question de rendre le tout plus anecdotique puisque ça fait un bon petit bout que je vous ai pas jasé, je vais vous raconter un peu ce qu’elles présentent.

Tout d’abord, mise en situation:

 C’était en 2000. On venait de survivre sans accroc majeur au changement de siècle et je me disais qu’à 22 ans, il était temps que je fasse ce que j’avais vraiment envie de faire: du cinéma ! Eh oui ! C’était pas la photo… je rêvais d’être cinéastre. J’avais décidé d’entrer à Concordia comme étudiante adulte et pour ça il me fallait un portfolio d’au moins trois disciplines différentes en art visuel. J’ai toujours été un peu naïve, alors je me suis dit que la photo noir et blanc ça ferait sûrement bien et c’était pas difficile. Après tout, il suffisait de trouver des sujets intéressants et d’appuyer sur le petit bouton. Et on connaît la suite… je suis tombée en amour avec la photographie et je ne suis jamais entrée à l’Université Concordia.

Je dois d’abord vous parler de ma toute première caméra. Je me souviens que j’étais alors serveuse dans un petit resto et que le montant que j’avais dépensé ce jour là était l’équivalent d’une semaine complète de salaire, pourboires inclus. Je suis repartie avec une caméra (une Pentax ME super que j’ai toujours d’ailleurs), deux lentilles (50mm Pentax et un vieux téléphoto Tokina 70-300 vraiment, mais vraiment cheap) et deux films noir et blanc (Ilford HP5 +, je m’en souviens !). Et c’était même pas du neuf on s’entend. Alors que je marchais vers chez moi, je n’ai jamais ressenti le moindre pincement au coeur. C’est difficile à expliquer, mais dans mon fort intérieur j’étais juste convaincue que je ne regretterais jamais cet achat… et ça c’est avéré vrai. Comme vous pouvez vous en douter, on ne nait pas avec le mode d’emploi d’une caméra manuelle intégré. Je suis donc allée me procurer un petit livre (le moins cher car j’étais officiellement fauchée) qui s’intitulait « la photographie sans professeur » (et malheureusement pour moi sans images !).

Les premières photos que je vous montre ont été réellement tirées de mes deux tout premiers rouleaux de film achetés avec la caméra. Le contraste laisse à désirer puisque le développement a été fait en magasin… mais bon, faut bien commencer quelque part non ? Alors voilà !

Mon chat, Néné, qui pour une raison inconnue adorait dormir dans l’évier ou le panier à linge sale, c’était selon. J’avais évalué, à l’époque, que l’évier était plus prometteur comme mise en scène pour une photo. J’ai donc patiemment attendu qu’il fasse comme à son habitude.

mon chat qui dort dans l'évier

mon chat qui dort dans l'évier

Sabrina était le premier bébé de notre nouvelle famille reconstituée. La fille de ma demie-sœur Nathalie. Sabri avait 10 mois sur ces photos et avait quelques dents qui sortaient… l’état des oreilles de son lapin rose en font foi.

 

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Ma sœur faisait de la compétition de vélo de montagne et Will était l’entraîneur de leur équipe locale. Il avait une boutique de matériel de sport usagé juste à côté de mon premier appartement et j’allais y traîner régulièrement. Il s’était prêté au jeu le temps de quelques portraits en cet après-midi de février. C’est d’ailleurs lui qui m’a présenté Joel, le photographe qui m’a initié au travail de la chambre noire.

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Les suivantes sont tirées de mes 2-3 premiers rouleaux suivants. Cette fois, j’avais fait la connaissance du fameux Joel et il était « monté » à Montréal avec moi. Oui, oui c’est une expression… quand tu viens de Granby tu montes ou tu descends partout et le sens géographique n’a pas grand chose à voir ! Bref, je suis repartie de chez Photoservice et L.L.Lozeau avec quelques centaines de dollars de matériel, de chimie, de papier, etc. Joël, avait eu la gentillesse de me laisser utiliser son vieil agrandisseur. J’étais en appartement depuis déjà un bon moment mais comme c’était pas très grand, mon père me laissait utiliser une pièce au sous-sol. Les photos suivantes sont donc mes premiers essais en chambre noire.

Le portrait de ma grand-mère Madeleine est vraiment un de mes tout premiers essais en chambre noire. Ma grand-mère nous a quitté au jour de l’an 2009 et ce portrait est le seul que j’ai fait d’elle de toute ma carrière. Bien sûr, j’ai pris des photos d’elle avec des appareils automatiques « point and shoot », mais je ne l’ai jamais photographiée par la suite en tant que photographe. Je dois avouer pour ma défense que j’avais dû user de beaucoup de persuasion pour la convaincre de se laisser photographier cette fois-là.

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On était déjà rendu au printemps, il commençait à faire chaud dehors et ma modèle préférée était Julie. On s’amusait le plus souvent à faire des photos de style mode. Celles-ci ont été faites dans mon 2 et demi. Dans ma chambre car c’était la seule pièce avec une fenêtre. Peut-être mes premiers balbutiements en photographie de boudoir qui sait. Julie était une amie, mais il m’arrivait souvent de recruter mes modèles dans la clientèle du resto où je travaillais ou dans les bars la fin de semaine (plus particulièrement La Maison Blanche pour ceux du coin). J’étais effrontée comme ça !

 

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La saison de vélo de montagne était commencée et j’ai volé ce portrait de loin avec la Tokina cheap à 300 mm. Charles-Antoine était le copain de ma sœur dans ce temps-là et détestait se faire prendre en photo (et déteste sûrement encore ça aujourd’hui). Parfois, on doit juste prendre une chance. On était dans le stationnement de la Coupe du Monde de vélo de Montagne au Mont Sainte-Anne et quand j’ai vu Charles au loin, j’ai ajusté ma caméra, j’ai crié « heille Charles ! » et puis CLIC ! Et voilà ! La photo aurait pu juste être moche car je l’avoue, ce genre de portrait c’est toujours plus ou moins un coup de chance… mais malgré la pauvreté technique , je l’aime toujours. Je trouve qu’elle représente bien Charles. Et pour une fois, il se trouvait beau sur une photo. J’étais vraiment fière de moi.

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La dernière a été faite un peu plus tard, mais toujours dans mes premières années. Je me souviens que ce soir-là je voulais vraiment faire un portrait de mon père. Comme il faisait noir, j’ai dû me contenter d’une lampe de lecture de 60 watts. Mon père s’était étendu sur son lit et j’avais installé la caméra sur trépied car ma vitesse d’obturation était assez basse. Je lui avais fait un agrandissement 8×10, mais ce scan est tiré d’un petit test que j’avais fait d’environ 4×5. Je me souviens qu’au début, il trouvait l’image un peu sombre, mais il a avoué qu’à force de la regarder (oui oui, il l’avait quand même mise sur le mur) il avait fini par l’aimer beaucoup. Surtout l’effet de la main qui paraît plus imposante à cause de la longueur focale de la lentille (j’étais limitée dans l’espace) qui donne toute la masculinité et la force à l’image.

 

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Et voilà ! Certains de mes amis m’ont demandé si j’avais vraiment envie de mettre mes toutes premières photos sur internet et je leur ai répondu «  bien sûr que oui ! ».  Après tout, y’a pas de gêne. Tout le monde a commencé quelque part, moi comprise. Oui, elles sont parfois pas très nettes, oui il y a des sacs à main derrière mon sujet parce que j’avais pas vérifié mon arrière plan, mais elles ont le mérite d’être sincères. Dans ce temps là, je ne savais pas grand chose de la composition et ça m’a pris au moins 6 mois à comprendre ce qu’était la profondeur de champ. Tout ce qui m’importait c’était la personne que je photographiais et d’avoir une bonne exposition. J’étais à peine consciente du reste.

Je vous montre mes débuts aussi pour encourager ceux qui commencent. Souvent, j’entends des gens me dire que ça ne va pas assez vite. Ils aimeraient tout maîtriser tout de suite. J’ai travaillé pendant 3 ou 4 années en lumière naturelle avant même de mettre les pieds dans mon premier studio… Si on compte pas mes essais avec les lampes 60 watts !

Continuez juste à pratiquer et concentrez-vous sur l’important, et prenez ça une étape à la fois. J’ai retenu une ou deux choses au cours de ces dix dernières années : qu’on apprend les choses lorsqu’on est prêt à les comprendre et à les recevoir, que parfois des détours son nécessaires pour nous permettre de confirmer nos choix et qu’il n’y a pas qu’une seule façon d’apprendre quelque chose, mais il y a votre façon à vous c’est certain.


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